Année politique Suisse 1982 : Politique sociale / Assurances sociales
 
Système de sécurité sociale
Peu avant la fin de l'année, l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a publié un rapport sur les problèmes actuels de nos assurances. Les experts y rappellent notamment à quel point font défaut les données statistiques qui permettraient d'anticiper les répercussions des déséquilibres économiques sur les assises financières de la sécurité sociale. Leurs conclusions sont empreintes de prudence: si l'on veut préserver les revenus réels, le maintien de l'acquis est plus important que l'amélioration de l'effet de redistribution obtenu par les assurances. La politique sociale devrait se concentrer sur l'aide en faveur des personnes économiquement défavorisées; elle pourrait s'appuyer davantage sur les prestations des organisations d'entraide, des services sociaux et des organes d'assistance [2].
Le Conseil fédéral a bien précisé que le rapport de l'OFAS ne représentait pas un programme gouvernemental. Interrogé sur la situation atteinte dans le domaine des assurances sociales au moment où il s'apprêtait à quitter ses fonctions, le conseiller fédéral H. Hürlimann a concédé que l'accroissement des charges de la sécurité sociale avait atteint certaines limites [3]. Cette situation a donné lieu à des interprétations diverses. Les représentants des groupements d'employeurs ont répété leur souci de faire subordonner toute prestation de l'assurance sociale à l'existence d'un besoin réel, afin de circonscrire l'évolution de l'«Etat social» [4]. Le professeur W. Wittmann a témoigné de sa foi en la supériorité de l'assurance privée, même dans le cadre de la sécurité obligatoire [5]. Pour les milieux syndicalistes, les diverses branches des assurances sociales forment une oeuvre inachevée. En matière de prévoyance vieillesse ils se sont déclarés prêts, suite aux délibérations parlementaires sur la LPP, à redonner une entière priorité au développement des prestations de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS). Les socialistes ont averti que la redistribution des tâches entre la Confédération et les cantons et le plafonnement des subventions pourraient avoir des effets inacceptables sur la politique sociale [6].
La discussion sur la situation économique des rentiers n'a pas, cette année, abordé le coeur du débat. La commission fédérale pour l'AVS avait été chargée de donner son avis sur les résultats de l'enquête controversée de W. Schweizer. En attendant la publication des conclusions du professeur P. Gilliand, les experts se sont limités à juger que, dans l'ensemble, la condition financière des personnes âgées était satisfaisante. Ils ont, en outre, relevé l'opportunité de recourir davantage aux prestations complémentaires, là où un correctif s'imposerait [7]. Dans un postulat, le conseiller national P. Günter (adi, BE) a réclamé une enquête du même type sur le sort des rentiers de l'assurance-invalidité (AI). Le gouvernement a reçu cette demande favorablement; il compte faire entreprendre, en temps utile, une investigation relative aux bénéficiaires des deux assurances fédérales [8].
Au-delà des considérations pécuniaires, le débat sur les questions du troisième âge s'est étoffé. Fin juillet, une délégation helvétique a participé à la conférence mondiale de l'ONU sur le vieillissement, à Vienne; en plus du document présenté à cette occasion, que d'aucuns ont estimé lénifiant, un recueil publié à Lausanne a présenté un large tour d'horizon des problèmes de la gérontologie [9].
 
[2] Voir supra, part. I, 7b (Politique de la santé), note 4; presse du 25.11.82. D'autres approches économiques avec T. Bandi, Soziale Sicherung in der Schweiz, Diessenhofen 1982 et P. Bürgisser-Peters, Verteilungswirkungen der staatlichen Altersvorsorge in der Schweiz, Zürich 1982. Une étude internationale comparative de l'OFAS a fait ressortir le niveau relativement élevé de la redistribution due à l'AVS (RCC, 1982, p. 138 ss.).
[3] SGT, 54, 6.3.82 ; Ww, 45, 10.11.82. En ce qui concerne la Confédération, la charge de la prévoyance sociale a fortement augmenté en 1982, suite notamment au relèvement de la participation à l'AVS (Message du Conseil fédéral... concernant le budget... pour l'année 1983, p. 11* et 107*). Cf. APS, 1976, p. 131.
[4] SAZ, 3, 21.1.82 (CN H. Allenspach); 36, 9.9.82 (K. Hug); voir aussi NZZ, 127, 5.6.82 et SAZ, 41, 14.10.82.
[5] BaZ, 152, 3.7.82; 158, 10.7.82; W. Wittmann, Ausverkauf der Sicherheit, München 1982.
[6] L'Hebdo, 10, 12.3.82; SGB, 40, 23.12.82 (F. Leuthy); proposition Donzé (ps, GE) de non-entrée en matière sur le projet de nouvelle répartition des tâches in BO CE, 1982, p. 635 s. ; cf. aussi supra, part. I, 1d (Confédération et cantons). Effets de ce projet sur le régime de l'AVS et des prestations complémentaires: RCC, 1982, p. 1 ss.
[7] NZZ, 297, 21.12.82; pour les travaux de W. Schweizer, se reporter à APS, 1979, p. 143 s.; déjà quelques données corrigées dans Domaine public, no 628, 4.3.82. Interpellation Riesen (ps, FR) à ce sujet: BO CN, 1982, p. 280.
[8] BO CN, 1982, p. 281; BaZ, 80, 5.4.82; voir aussi un postulat A. Bacciarini (prd, TI), in BO CN, 1982, p. 966.
[9] Schweizerischer Landesbericht zuhanden der UNO-Weltkonferenz über das Altern, Zürich 1982; TA, 165, 20.7.82; BaZ, 187, 13.8.82: Gérontologie: P. Gilliand, éd.,Vieillir aujourd'hui et demain, Lausanne 1982.