Année politique Suisse 1983 : Eléments du système politique / Elections / Elections fédérales
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Résultats de l'élection au Conseil national
Voir les tableaux: elections_cn_electeurs_1983.pdf et elections_cn_sieges_1983.pdf
Les choix des électeurs pour le Conseil national n'ont pas confirmé la tendance dominante des dernières élections, car après un accroissement régulier, le pourcentage des électeurs des partis gouvernementaux a baissé à 77,6% (1979: 81,8%; 1975: 77,9%). Un autre élément nouveau tient au fait que, pour la première fois, tous les quatres partis représentés au sein du gouvernement ont été touchés par cette baisse du pourcentage des électeurs. Compte tenu des reculs plus ou moins prononcés, le PRD a devancé les socialistes et occupe de nouveau, sur le plan national, la place du parti le plus fort [48]. Dans la perspective d'une analyse canton par canton, la coalition gouvernementale a subi des pertes de suffrages sensibles avant tout dans les arrondissements électoraux où des dissidences de parti avaient modifié les structures institutionnelles [49]. Les autres directions exprimées par les mouvements électoraux ont singulièrement manqué d'unité. En effet, le parti des écologistes et les partis contre l'emprise étrangère ont profité le plus de la tendance à l'opposition et de l'importante perte de voix subie par le PdT. — D'après les rapports de force actuels entre les partis, la géographie politique de la Suisse donne l'image suivante [50]: les bastions radicaux se maintiennent encore aujourd'hui dans les cantons de Soleure, Tessin et Appenzell Rhodes-Extérieures. Cela s'explique par le fait que ni les libéraux ni l'UDC n'y disposent d'une position solide et que, de surcroît, il ne s'agit pas de régions traditionnelles à vocation catholique et conservatrice unique [51]. Dans de telles contrées, c'est en revanche le PDC qui domine, tandis que celui-ci n'a pas pu s'étendre dans les cantons protestants et les agglomérations industrielles [52]. Les régions de la chaîne du Jura peuvent être qualifiées de ceinture rouge. A la suite de ses pertes en Suisse romande, la gauche a toutefois déplacé son centre de gravité au nord-ouest de la Suisse. A Bâle-Ville, les partis se réclamant de l'héritage socialiste ou de la tendance alternative détiennent même une majorité théorique parmi les électeurs [53]. Quant à la répartition géographique de l'UDC, elle est restée la même.
La répartition des sièges et les déplacements consécutifs ne reflètent que de façon indirecte la force respective des partis et les mouvements des électeurs, car le mode de calcul et les apparentements produisent leurs propres effets [54]. Au Conseil national, les partis gouvernementaux ont perdu ensemble trois de leurs 169 sièges. Les déplacements se sont toutefois répartis de façon très diverse: tandis que le PRD a gagné trois sièges, le PDC en a perdu deux et le PS quatre. L'UDC n'a pas varié. Parmi les petits partis d'opposition, les changements de sièges reflètent plus fidèlement les mouvements des électeurs: les écologistes en ont conquis trois ou quatre, alors que les partis nationalistes ont obtenu deux mandats de plus. Le PdT a dû céder deux de ses trois sièges. Dans plus de la moitié des arrondissements électoraux, les élections n'ont pas apporté le moindre changement parmi les partis politiques. A Bâle-Ville et dans le canton de Vaud, la nouvelle répartition des sièges, nécessitée par l'évolution démographique, a provoqué le transfert d'un siège dans chaque cas. C'est uniquement dans le canton du Jura que des luttes intestines au sein du PDC et du Rassemblement jurassien ont abouti à un changement complet des partis représentés au Conseil national, permettant ainsi aux radicaux, jusqu'alors écartés, de faire leur entrée en scène.
La non-réélection de douze conseillers nationaux sortants constitua une surprise quant aux personnalités concernées [55]. Les sièges perdus par certains partis ont entraîné la chute d'hommes politiques en vue, tels que Jean-Claude Crevoisier (psa, BE), Armand Forel (pdt, VD), David Linder (pl, BS), Gabriel Roy (cs, JU), Jean Wilhelm (pdc, JU) et Jean Ziegler (ps, GE) [56]. En revanche, à Zurich, on a assisté à une percée d'Ernst Ci.ncera au détriment de son collègue Silvio de Capitani sur la liste radicale [57]. De son côté, Walther Hofer, conseiller national de 1963 à 1979, a tenté en vain d'effectuer sa rentrée à la chambre du peuple sur une liste bernoise de l’UDC [58].
 
[48] Scores (et pertes) des partis: PRD 23,3% (–0,8%); PS 22,8% (–1,6%); PDC 20,4%(–1,4%); UDC 11,1% (–0,5%). Sur l'analyse des mouvements de l'électorat, cf. NZZ, 26.10.83.
[49] Scission de l'aile gauche du PRD : TG -8,2% ; BE -8,0 %; scission de l'aile droite du PS: BS -7,0% (cf infra, part. III a (Parti socialiste, Parti radical-démocratique). L'ensemble des partis gouvernementaux consolida sa position surtout au JU (+ 4,7%) et en VS (+ 4,1 %).
[50] Cf. cartes de synthèse: Unser Parlament. National- und Ständerat 1983-87 (supplément au TA du 29.11.83).
[51] Cohabitation du PRD et du PL: NE, GE, VD, BS; cohabitation du PRD et de l'UDC: BE, TG, SH, GR, AG, ZH, BL.
[52] Des proportions exemplaires dans les cantons réformés: ZH 9,1 %; BE 2,1 %; BS 9,9 %; BL 10,8 %; SH 6,3% et VD 4,5%.
[53] 1983: 50,2% (PS, POCH, Demokratisch-soziale Partei, PdT, PSO, alternatifs) ; 1979: 49,2% (PS, POCH, PdT, PSO).
[54] 27 des 200 sièges du CN furent attribués selon la méthode des restes; par ordre décroissant pour les partis: PRD 9, PDC 7; UDC 3; PS 1; divers 7; cf. également NZZ, 28.11.83.
[55] 1979: 14 CN; 1975: 18 CN.
[56] En raison de sa position critique à l'égard des banques, celles-ci ont envoyé 180 000 listes du PS à Genève sous forme de cartes postales avec le nom de Ziegler biffé. L'intéressé n'envisagea que tardivement de répondre à cette lutte par voie judiciaire (cf. Blick, 25.10.83; BaZ, 5.11.83; NZZ, 8.11.83).
[57] Le cas fut différent pour l'ancien CN A. Affolter (ps, ZH), qui ne devint que second remplaçant. Dans le même temps, sa liste perdit un siège, et Affolter ne fut pas remplacé par un socialiste (TA, 26.10.83; NZZ, 8.11.83).
[58] En 1979 Hofer n'avait plus été nommé par I'UDC bemois en raison de la durée de fonction limitée à 16 ans par décision du parti. La candidature renouvelée en 1983 fut dès le début contestée au sein du parti (cf. NZZ, 11.1.83; Bund, 13.1.83; 28.1.83; TA, 15.1.83).