Année politique Suisse 1984 : Politique sociale / Assurances sociales
 
Assurance-maternité
Le programme d'urgence portait encore sur une amélioration des dispositions relatives à l'assurance-maternité, conçues comme un contre-projet indirect à l'initiative populaire «pour une protection efficace de la maternité». Les débats se sont certes ressentis du poids des arguments développés lors de la campagne menée en faveur ou en défaveur de l'initiative.
Ainsi à l'exception de la gauche, l'ensemble des forces politiques a rejeté la formule des initiants. Même la solidarité féminine n'a guère résisté à un projet jugé avant tout financièrement trop exigeant et considéré comme une socialisation abusive de cette assurance. Le congé parental, principal point de litige, a servi de prétexte à toutes les oppositions. On lui a notamment reproché de pénaliser les femmes sur le marché du travail et de menacer la structure traditionnelle de la famille. Pour légitimer leur prise de position, les opposants se sont engagés à renforcer la protection de la maternité dans le sens prévu par la révision de l'assurance-maladie. A contrario, les syndicats et les partis de gauche ont justifié leur soutien à l'initiative en soulignant les lacunes des mesures envisagées et l'indétermination de leur contenu. Cette initiative constituait également à leurs yeux l'un des instruments capables de promouvoir une nouvelle distribution des rôles au sein du couple, l'égalité des chances entre les enfants et la solidarité sociale. De plus, il s'agissait de reconnaître et de soutenir la fonction sociale de la maternité; l'effort économique qu'exigeait le mode de financement proposé supportait dès lors la comparaison avec celui des autres branches mineures de notre système de sécurité sociale. Sanctionnée par le verdict populaire, le 2 décembre, la campagne a conduit au rejet massif de l'initiative [14].
Au Conseil national, les résultats du scrutin ont conditionné l'alignement des fronts. Certains ténors radicaux et démocrates du centre s'en sont emparés pour renforcer leur opposition à l'assurance indemnité journalière obligatoire. Le conseiller national H. Allenspach (prd, ZH) en a profité pour proposer de la remplacer par une modification du CO fixant l'octroi d'un congé maternité de seize semaines avec l'allocation d'une indemnité pour perte de gain à 100% du salaire. L'amendement a été refusé. Dans les rangs du parti socialiste et de l'UDC, on a condamné une interprétation abusive de la volonté populaire et rappelé, au nom de la cohérence et de la crédibilité des partis concernés, les promesses faites antérieurement. Par ailleurs, toutes les mesures relatives à l'extension du congé maternité et à la protection contre le licenciement ont été approuvées sans susciter de polémique [15].
 
[14] Campagne : NZZ, 3.11.84; 6.11.84; SZ, 6.11.84; TA, 9.11.84; BaZ, 12.11.84; JdG, 20.11.84. RFS, 46, 6.11.84 ; Revue syndicale suisse, 76/1984, p. 113 ss. ; SP VPOD, 26.8.84. Résultats : FF, 1985, I, p. 280 (241 442 oui : 1 288 974 non). Une analyse de la répartition politique et des motivations des électeurs lors du scrutin a démontré qu'au-delà d'un conflit droite-gauche, superposé à un conflit de génération, les deux causes principales du rejet de l'initiative sont: l'incidence de la réalisation du projet sur la répartition des rôles au sein du couple, soit un problème de valeurs et les répercussions financières de l'introduction du congé parental (Vox, Analyses des votations fédérales du 2.12.84, Zürich 1985).
[15] BO CN, 1984, p. 1303 ss., 1802 ss. et 1838 ss. Cf. les propositions Allenspach (p. 1826 ss.) et Günter, adi, BE (p. 1335 s.) ainsi que Vannay, ps, VS (p. 1840).