Année politique Suisse 1986 : Chronique générale / Politique étrangère suisse / Politique économique extérieure
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CEE
Sur le plan des institutions européennes, les discussions entre la Communauté économique européenne (CEE) et les pays membres de l'Association européenne de libre-échange (AELE) pour tenter de créer une vaste zone économique dynamique et homogène de 18 nations se sont poursuivies dans le courant de l'année. En septembre, les Douze ont affirmé leur détermination de renforcer leur coopération avec I'AELE. Trois mois plus tard à Genève, les ministres de l'AELE, à leur tour, déclaraient partager la même position. La relative lenteur du rythme d'intégration au sein de la petite zone économique européenne risque toutefois de poser certains problèmes. En Suisse, face au poids toujours plus grand pris par la CEE et, conséquemment, la perte d'influence de l'AELE, certains parlementaires de tous horizons politiques se sont posé la question de savoir où se situait vraiment l'intérêt de notre pays à l'aube de la concrétisation du marché intérieur prévu par la CEE pour 1992. Ainsi, le député démocrate-chrétien fribourgeois L. Butty avait-il déposé en 1985 une motion sur la table du Conseil national demandant au gouvernement fédéral de définir dans les meilleurs délais une nouvelle conception rationnelle, cohérente, souple et acceptable face à la coopération européenne. Mise en discussion, la question n'a pas soulevé les passions au sein de la Chambre du peuple, aucun parlementaire alémanique ne daignant même monter à la tribune, bien que ce dossier s'annonce comme l'un des plus difficiles et des plus importants de ces prochaines années. K. Furgler a profité de cette occasion pour rappeler que la clause évolutive de l'accord passé en 1972 entre la Suisse et la CEE permettait à notre pays d'exercer une participation active quoique dans des limites bien précises avec celle-ci, mais que, vu l'évolution de ces dernières années, le risque de rester sur la touche était bien réel. Le chef du DFEP a pris l'engagement, si la situation venait à se détériorer, d'en avertir le parlement qui devrait alors prendre ses responsabilités. Le Conseil national a en effet décidé, par 74 voix contre 34, de transformer la motion en simple postulat à l'adresse du Conseil fédéral [44].
Si la question d'une éventuelle adhésion de la Suisse à la CEE restait inactuelle en 1986, l'année aura tout de même permis de renforcer quelque peu la coopération entre notre pays et la Communauté. Ainsi, après quelques difficultés initiales, un compromis a pu être trouvé pour l'adaptation des liens commerciaux entre la CEE et les pays membres de l'AELE suite à l'élargissement du marché commun à l'Espagne et au Portugal. Les Chambres ont adopté des protocoles additionnels à l'accord de libre-échange de 1972 conclu avec la CEE, cela en étroite collaboration avec les partenaires de la Suisse à l'AELE. Ces protocoles règlent durant une période transitoire de sept ans les échanges commerciaux de produits industriels et agricoles transformés entre la Suisse et les deux Etats ibériques. Les négociations portant sur les adaptations des accords agricoles existants entre notre pays et la CEE ont également abouti [45]. Autre source de satisfaction: la signature survenue en janvier à Berne d'un accord-cadre sur la coopération scientifique et technique. Conclu dans le collimateur du lancement par la Communauté des programmes de haute technologie ESPRIT, RACE et BRITE, cet accord a pour but de fournir une base systématique à la coopération entre la Suisse et la CEE, en ouvrant à notre pays certains programmes réservés jusque-là aux seuls membres de la Communauté [46].
 
[44] Rapports CEE–AELE : BaZ, 2.6.86 ; L'Hebdo, 23, 5.6.86 ; 24 Heures, 6.6.86 ;16.9.86 ; 4.12.86 ; JdG, 7.6.86 ; 5.11.86. Voir également JdG, 2.-6.6.86 (dossier AELE), ainsi que M. Judge, «Les relations AELE–CEE deux ans après Luxembourg», in EFTA Bulletin, 1986, no 2, p. 6 s. ; M. Judge, «Importance de I'AELE comme partenaire commercial de la CE», in EFTA Bulletin, 1986, no 4, p. 12 ss. Rapports Suisse–CEE: BO CN, 1986, p. 1104 ss.; JdG et 24 Heures, 24.9.86 (motion Butty). Voir également Suisse, 6.9.86 (interview de K. Furgler); L'Hebdo, 45, 6.11.86; 46, 13.11.86 (dossier); JdG, 31.12.86 (bilan 1986), ainsi que L. Butty, «La Suisse à la rencontre de la Communauté européenne», in Dix ans: Journée de l'Europe à l'Université de Fribourg, 1986, p. 123 ss. et J.R. Zeller, «Europa wohin – und die Schweiz?», in Wirtschaftspolitische Mitteilungen, 42/1986, no 11/12, p. 1 ss.
[45] FF, 1986, III, p. 1 ss. ; BO CN, 1986, p. 1103 ; BO CE, 1986, p. 616 ss. ; NZZ et 24 Heures, 19.2.86 ; JdG, 20.2.86. Cf. APS, 1985, p. 76. Ces protocoles additionnels entraîneront une perte nette de l'ordre de 2,9 millions de francs par année sur les recettes douanières (FF, 1986, III, p. 10 s. ; NZZ, 25.8.86). Pour les modifications tarifaires entraînées par l'entrée de l'Espagne et du Portugal à la CEE, cf. FF, 1986, II, p. 1374 ss. ; BO CN, 1986, p. 1110 ; BO CE, 1986, p. 618. Voir en outre S. Norberg, « Le Portugal et l'Espagne entrent dans la Communauté — Les conséquences pour I'AELE», in EFTA Bulletin, 1986, no 2, p. 16 ss. LeCE et le CN ont également approuvé un accord tarifaire conclu avec la CEE selon lequel les échanges de soupes, potages et sauces sont exemptés de droits de douane à partir du 1.1.1986 (FF, 1986, I, p. 378 ss.; BO CE, 1986, p. 24; BO CN, 1986, p. 246; FF, 1986, I, p. 869).
[46] RO, 1986, p. 183 ss.; NZZ, 7.1.86; 8.1.86; JdG, 10.1.86.