Année politique Suisse 1986 : Chronique générale / Politique étrangère suisse / Politique économique extérieure
Pour la première fois depuis le début de la
crise de l'endettement, la dette globale des pays en voie de développement a dépassé la barre des mille milliards de dollars. L'insolvabilité des plus grands pays débiteurs, tels le Brésil, le Mexique et l'Argentine, n'avait jamais été aussi patente qu'en cette fin d'année 1986, en raison notamment de l'inflation intérieure qui rongeait l'économie de ces pays. L'hypothèse d'une renonciation de la part des créanciers à une partie importante de leurs capitaux, même si elle n'avait pas encore été énoncée officiellement, devenait ainsi de plus en plus actuelle
[49].
Afin de permettre à notre pays de poursuivre ses mesures économiques et commerciales en faveur des pays en développement, l'Assemblée fédérale s'est prononcée en faveur d'un nouveau crédit de programme d'un montant de 430 millions de francs appelé à s'étendre sur trois ans au moins et destiné au financement de telles mesures. Celui-ci permettra essentiellement d'assurer comme par le passé un certain soutien aux pays nécessiteux par le biais de l'aide à la balance des paiements et des crédits mixtes notamment. La Suisse a ainsi octroyé en 1986 un second crédit de cette sorte à la Tunisie pour un montant de 60 millions de francs. Elle a en outre consacré 43,5 millions au titre de l'aide à la balance des paiements de quatre pays, à savoir la Bolivie, la Guinée, le Ghana et le Sénégal
[50]. Outre cette aide bilatérale, un accent particulier est également mis sur la participation suisse aux diverses banques de développement. La contribution helvétique à la quatrième reconstitution du Fonds asiatique de développement se montera ainsi à 87,6 millions de francs pour les années 1987 à 1990. Dans le but de permettre la poursuite de cet effort actif mené par le biais de ces institutions de coopération multilatérale, le Conseil fédéral a adressé aux Chambres en fin d'année un message portant sur l'ouverture d'un crédit de programme de 680 millions de francs, destiné à assurer la participation de la Suisse à l'augmentation du capital des banques de développement interaméricaine, asiatique et africaine, ainsi qu'à rendre possible l'adhésion de notre pays à l'Agence multilatérale de garantie des investissements (AMGI). La Suisse a en effet signé en juillet cette convention, créée sous l'égide de la Banque mondiale, et qui se propose de promouvoir dans les pays en développement les investissements provenant des pays industrialisés ou d'autres pays en développement. Le gouvernement fédéral a signé d'autre part le nouvel accord international sur le cacao, fruit des deux ans de travaux de la Conférence des Nations Unies sur le cacao
[51]. Jugeant nos échanges commerciaux avec le tiers monde comme déséquilibrés, les principales oeuvres d'entraide helvétiques ont lancé un appel, signé par plus de 100 000 personnes, aux milieux économiques, au Conseil fédéral, à l'administration et aux Chambres pour un commerce plus juste qui favoriserait les importations compatibles avec la protection de l'environnement et dont le prix pourrait être plus élevé afin de garantir à ces pays un revenu plus large. Le Conseil national a transmis dans ce sens au Conseil fédéral un postulat déposé par le démocrate du centre thurgovien Uhlmann invitant le gouvernement à développer les importations de sucre du tiers monde en donnant la préférence aux pays producteurs où les planteurs et travailleurs sont convenablement rétribués
[52].
[49] Endettement international: Bund, 2 1.1.86 ; 16.8.86 ; NZZ, 1.3.86 ; 12.4.86 ; BZ, 6.3.87 ; Suisse, 15.5.87. Cf. APS, 1985, p. 77. Voir USS, 22, 16.7.86; G. Gaudard, «La crise de l'endettement international», in Civitas, 41/1986, no 3, p. 64 ss. ; M. Villet / P: L. Giovannini, «La catastrophe économique — Sur l'endettement du tiers monde », in Civitas, 41/1986, no 12, p. 366 s., ainsi que G. Gaudard, L'endettement international au début de 1987, fascicule édité par la Société neuchâteloise de science économique, janvier 1987. Suite à la votation populaire sur l'adhésion de la Suisse à l'ONU, le CF a renoncé à poser la question d'une éventuelle entrée de notre pays au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale (BO CN, 1986, p. 126 et 1935 s. ; Vat., 25.2.86; BaZ, 10.4.86; 26.9.86). L'OCDE a fêté en 1986 ses 25 années d'existence (24 Heures, 30.1.86; SHZ, 32, 7.8.86).
[50] Crédit de programme: cf. supra (Aide publique au développement). Crédit mixte et aide à la balance des paiements: FF, 1987, I, p. 532 s.; NZZ, 29.1.86; 3.4.86; 21.5.86; 9.12.86; 12.12.86. Depuis 1977, 21 crédits mixtes ont été octroyés pour une somme de 1075 millions de francs. Cf. H. Eisenhans, «Zu reich für alternative Entwicklungsstrategien — Das Dilemma der Dritten Welt », in Schweizerische Zeitschrift für Soziologie, 12/1986, p. 155 ss.
[51] Coopération avec les pays en développement : FF, 1987, I, p. 527 ss. et supra (Aide publique au développement); NZZ, 16.1.86. Dans le cadre de sa participation à la 8e reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement (IDA), le CF a décidé de financer conjointement avec celle-ci des projets dans les pays en développement les plus pauvres pour une somme de 280 millions de francs sur trois ans (JdG, 16.12.86). Crédit de programme: FF, 1987, I, p. 134 ss.; NZZ, 28.1 1.86.
[52] NZZ et 24 Heures, 17.1.86 ; BaZ, 17.10.86. Suite au boycott économique des Etats-Unis contre le Nicaragua, l'organisation Suisse—Tiers monde a lancé une action de grande envergure pour écouler sur le marché suisse la banane Nica (24 Heures, 15.3.86; 5.6.86). L'« Action place financière Suisse—Tiers monde » a déposé auprès de la Chancellerie fédérale une pétition demandant au CF et à la Banque nationale de changer de politique à l'égard du tiers monde et de ne plus soutenir celle du FMI (24 Heures, 17.1.86). Postulat Uhlmann: BO CN, 1986, p. 2047.
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