Année politique Suisse 1987 : Politique sociale / Population et travail / Temps de travail
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Retraite à la carte du personnel fédéral
Les Chambres fédérales ont approuvé à une large majorité une révision de l'ordonnance concernant la Caisse fédérale d'assurance et les statuts de la Caisse de pension et de secours des CFF, répondant ainsi à une revendication formulée.en 1984 par l'Union fédérative du personnel des administrations publiques. D'aucuns n'ont pas manqué de faire un rapprochement entre ce geste en faveur des fonctionnaires et l'échéance toute proche des élections fédérales. Deux principes avaient guidé le Conseil fédéral dans l'élaboration du nouveau système: la révision ne devait pas entraîner de dépenses supplémentaires et il fallait réaliser l'égalité juridique de l'homme et de la femme au regard de la prévoyance professionnelle. Le modèle à trois paliers choisi par le gouvernement et qui s'applique à tous prévoit que les fonctionnaires pourront prendre une retraite anticipée avec réduction de rente dès 60 ans ou dès 62 ans et sans réduction s'ils ont cotisé durant 40 ans ou qu'ils pourront encore poursuivre leurs activités jusqu'à 65 ans. Comme le principe de l'égalité se réalise au détriment de la femme — celle-ci pouvait auparavant prendre sa retraite dès 55 ans avec 35 années de service — le gouvernement a inclus des dispositions transitoires qui permettront aux femmes de bénéficier de l'ancien système durant une période de 20 ans.
Cette révision va toucher près de 135 000 fonctionnaires de la Confédération, des PTT et des CFF. Elle traduit le souci de renforcer la compétitivité de la Confédération sur le marché du travail. Les mesures prises dans le domaine de la rétribution et de la classification des fonctions s'inscrivent également dans cette logique [10]. Après avoir dans un premier temps supprimé la retraite à la carte de l'ordre du jour de la session d'automne, afin de permettre aux parlementaires concernés de disposer de suffisamment de temps pour préparer leur campagne électorale, les présidents de groupes qui étaient opposés à cette révision se sont finalement ravisés. Le tollé général soulevé par la décision initiale au-près des associations de personnel, des syndicats et des partis de gauche, comme le désaveu des groupes parlementaires démocrate-chrétien, radical et indépendant-évangélique, ont expliqué cette volte-face.
Au Conseil national, le député Reich (prd, ZH) a proposé en vain une motion de renvoi du dossier en commission pour réexaminer le parfait respect de la neutralité des coûts pour la Confédération ainsi que les incidences du projet sur l'AVS et les caisses de pension de l'économie privée. Il a été appuyé dans sa démarche par les libéraux, les agrariens et une partie des radicaux qui tous craignaient que cette modification en faveur des fonctionnaires n'annonce en fait l'introduction de l'âge de la retraite à 62 ans pour tout le monde. La droite proche de l'économie s'est dite inquiète de l'effet que pourrait avoir le modèle sur le secteur privé. Ce à quoi les partisans du projet, la gauche et le Parti démocrate-chrétien, ont répondu en indiquant que la Confédération ne faisait que suivre le mouvement instauré dans 23 cantons, plusieurs villes ainsi que dans de grandes entreprises. La droite a également relevé qu'en raison des cotisations supplémentaires, le salaire net touché par les fonctionnaires en activité allait diminuer et que ceci pouvait entraîner des revendications salariales. Même si elle a défendu le projet, la gauche n'a cependant pas manqué de relever que la retraite à la carte allait se réaliser parce que les coûts supplémentaires étaient répercutés sur le personnel. En effet, les cotisations passeront de 6 à 7,5% tant pour les assurés que pour l'employeur, mais ce dernier compensera cette dépense par le fait qu'il ne participera plus désormais au financement du rachat des années de cotisation perdues, sauf cas exceptionnels. Finalement, la révision a été acceptée par 102 voix contre 1.
Quant aux membres du Conseil des Etats, ils n'ont formulé aucune opposition de principe au projet gouvernemental. Les délibérations ont pour l'essentiel porté sur l'ajournement ou non du dossier. Une proposition Hefti (plr, GL) voulant renvoyer le projet à la commission préparatoire fut rejetée [11]. Principale intéressée, l'Union fédérative du personnel des administrations publiques s'est félicitée des améliorations des conditions de travail apportées au personnel, mais a cependant estimé trop faible la rente servie jusqu'à l'âge de l'AVS et regretté que cette révision ne coûte rien à l'employeur mais uniquement aux fonctionnaires [12].
 
[10] FF, 1987, II, p. 501 ss. Cf. aussi APS, 1986, p. 152. Position de la Confédération sur le marché du travail cf. supra, part. I, 1c (Verwaltung) et infra (Salaires).
[11] FF, 1987, II, p. 501 ss.; BO CE, 1987, p. 409 ss.; BO CN, 1987, p. 1151 ss.
[12] Journal des fonctionnaires fédéraux, 6.3., 15.3., 31.3., 24.9. et 8.10.87.