Année politique Suisse 1988 : Politique sociale / Groupes sociaux / Réfugiés
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Nouvelle orientation de la politique d'asile
L'actuelle vague de demandeurs d'asile ne comprend qu'une minorité de réfugiés politiques au sens où l'entend la loi. La Suisse, à l'instar des autres pays occidentaux, est confrontée à une migration sud-nord. Face à l'ampleur croissante de ce phénomène, nombreux sont ceux qui préconisent une refonte de notre politique d'asile et échaffaudent des solutions susceptibles, à leurs yeux, de la sortir de la crise qu'elle traverse actuellement. Certains sont d'avis que l'on pourrait résoudre les difficultés des requérants d'asile en accroissant l'aide au développement afin de créer des structures économiques et sociales qui puissent les convaincre de rester chez eux ou d'y retourner. La Suisse pourrait par exemple participer à la reconstruction d'infrastructures détruites par la guerre ou par des catastrophes naturelles afin de permettre aux réfugiés de trouver un travail dans leur pays [28].
D'autres, et en particulier la classe politique genevoise, recommandent une remise en question du système actuel de recrutement des travailleurs étrangers. Il s'agirait en l'occurence d'ouvrir aux ressortissants turcs l'accès au statut de saisonnier. En effet, empêchés par la loi d'obtenir un permis de saisonnier, la plupart des émigrants turcs recourent à l'asile pour décrocher un travail en Suisse. Les autorités fédérales demeurent cependant sceptiques à cette idée. Elles craignent en effet qu'au bout de quatre ans, quand les travailleurs turcs auront le droit de faire venir leur famille, la Suisse ne soit soumise à une forte immigration et que les sentiments xénophobes ne soient à nouveau ravivés. La gauche, parce qu'elle a toujours combattu le principe du statut de saisonnier et les syndicats parce qu'ils refusent l'idée d'augmenter le nombre de saisonniers par ce biais, y sont également opposés [29].
Quant au Groupe de réflexion et stratégie, chargé par E. Kopp d'élaborer les grandes lignes de la politique d'asile pour les années nonante, il a évoqué le principe de la solution des quotas. Chaque année, l'autorité compétente déciderait du nombre de réfugiés que la Suisse pourrait accueillir. Pour les membres de ce groupe, des réglementations globales sur l'immigration, embrassant toutes les catégories d'étrangers, seraient préférables à la séparation actuelle entre travailleurs étrangers et requérants d'asile. Un autre avantage résiderait selon eux dans l'accueil de groupes de réfugiés et, par conséquent, dans l'économie de temps qui en découlerait inévitablement. Pour ses détracteurs, la solution des quotas priverait de l'asile des personnes véritablement persécutées une fois le contingent atteint [30].
 
[28] L'Hebdo, 29.9.88. Cf. aussi APS 1987, p. 72.
[29] L'Hebdo, 21.7.88; DP, 29.9.88.
[30] Ww, 22.9.88; L'Hebdo, 29.9.88. Sur la situation des réfugiés: BODS—Rundbrief 1988, Nr. 1-4.