Année politique Suisse 1989 : Chronique générale / Politique étrangère suisse
 
Commerce mondial
Pour la septième année consécutive, les pays industrialisés occidentaux ont connu une situation favorable. Globalement, l'économie et le commerce mondial ont à nouveau crû en 1989. Dans les pays les plus riches, la demande et la production ont poursuivi leur augmentation, bénéficiant en cela de fortes impulsions provenant des investissements des entreprises. Le produit intérieur brut (PIB) des nations de la zone OCDE a ainsi accusé un taux de croissance annuel de 4%, comparable à celui de 1988. Cependant, la conjoncture s'est différenciée selon les régions. Si elle s'est ralentie aux Etats-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne – notamment en raison de politiques monétaires restrictives – elle s'est maintenue au Japon et en Europe continentale et a même présenté des signes de surchauffe en Allemagne fédérale. Ces derniers développements sont principalement dus à une vague d'investissements dont l'origine est à rechercher dans les perspectives d'achèvement du grand marché intérieur européen. Si le taux de croissance du commerce mondial s'est quelque peu ralenti, il a cependant atteint 8% (contre 9% en 1988) et reflète en cela l'importante demande en importations tant du Japon que de l'Europe occidentale.
L'orientation stabilisatrice de la politique macro-économique menée depuis le début des années 80 – particulièrement des politiques monétaire et budgétaire – tout comme l'étroite coopération des milieux dirigeants des principaux Etats, ont contribué au mouvement généralement positif de l'économie mondiale. Cependant, cette dernière est également caractérisée par le maintien d'un ensemble de problèmes conséquents. La vulnérabilité des marchés. financiers, la persistance du chômage et de grands déséquilibres économiques extérieurs inquiètent les cercles intéressés. De même, l'endettement des pays du tiers-monde ainsi que l'appauvrissement de certaines nations de l'Afrique sub-saharienne et de l'Amérique latine ont perduré et hypothèquent lourdement leur avenir [91].
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Commerce extérieur suisse
Le développement de l'économie extérieure de la Suisse a été caractérisé, en 1989, par une bonne conjoncture internationale, un cours de change du franc suisse favorable et par une demande intérieure très dynamique, ce qui a conduit les ventes et les achats helvétiques à leur plus forte croissance nominale de ces sept dernières années. Le PIB réel a progressé de 3% (2,8% en 1988), les importations de 14,2% (9,6% en 1988), se chiffrant à 88 160,2 millions de francs, et les exportations de 12,0% (9,8% en 1988), s'élevant à 76 658,0 millions de francs.
Tous les domaines ont participé à cet excellent résultat. Si l'industrie horlogère a enregistré la plus forte croissance exportatrice (+19,6%), celles des métaux (+14,8%), des denrées alimentaires (+12,7%) et de la chimie (+12,3%) ont également profité de cette évolution. Par contre, la croissance des exportations des secteurs des biens d'investissement (machines, appareils, électronique: +9,9%), des textiles (+9,0%) et des instruments de précision (+8,1%) a été légèrement en retrait. Ce dernier fait pourrait s'expliquer par les goulets d'étranglement que connaissent les capacités helvétiques de production.
Géographiquement, nos ventes ont maintenu leur répartititon antérieure. A destination des pays de l'OCDE, elles ont poursuivi leur développement (+12,7%) et constitué 79,1 % de l'ensemble des exportations suisses. Au sein de la CE, qui demeure notre principale cliente avec 56,8% du commerce extérieur (+13,2%), c'est en direction des pays latins qu'elles ont connu leurs principaux progrès (Espagne: +22,5%; France: +15,7%; Italie: +15,6%; Portugal: +15,1%). Elles ont également repris à destination du Bénélux (+16,1%) après une année 1988 difficile. La RFA est restée l'acheteuse la plus importante de la Suisse (21,8% des exportations); à destination de ce pays, les ventes helvétiques se sont également accrues (+10,7%). Elles ont, par contre, moins fortement progressé vers la zone AELE (+7,4%), où elles ont enregistré un recul en direction de la Norvège (–7,8%). Les exportations suisses ont connu une évolution très positive vers l'Australie (+21,1 %) et le Japon (+20,9%). Il en va de même à l'égard des pays en développement non producteurs de pétrole (+16,9), en particulier de la Yougoslavie (+27,7%), du Brésil (+24,7%) et de Hong-Kong (+19,6%). Si elles ont aussi enregistré une telle progression vers l'Union soviétique (+17,3%) et la Pologne (+16,3%), elles ont par contre poursuivi leur recul face aux pays de l'OPEP (–15,5%), notablement à destination du Nigéria (–48,0%) et de l'Arabie séoudite (–13,8%).
La forte demande intérieure conjuguée à une saturation croissante des capacités de production indigènes ont conduit à de conséquentes importations, notamment d'agents énergétiques (+24,0% par rapport à 1988), de métaux (+22,7%), de chimie (+14,3%), de machines (+13,6%) et de textiles (+11,8%). La zone OCDE est restée notre principal fournisseur (92,5% des importations totales, +14,8%). Dans ce contexte géographique, la CE est demeurée prioritaire (73,5% des importations, +14,6%) et nos achats ont connu la plus forte croissance avec la France (+18,0%) et le Portugal (+17,1%). Au sein de l’AELE (+16,6%), la Norvège a, au contraire des exportations, considérablement renforcé sa position de vendeur (+51,8%). De même, nos importations ont enregistré un accroissement en provenance d'Australie (+32,1%), du Canada (+29,1 %) et des Etats-Unis (+24,3%). Elles ont vécu un mouvement similaire à l'égard des pays en développement non producteurs de pétrole (+13,1%) – notamment d'Israël (+27,5%) – et des pays européens à économie planifiée (+21,6%), principalement d'Union soviétique (+49,5%). Par contre, elles ont considérablement chuté en provenance des pays de l'OPEP (–40,0%), en particulier de l'Algérie (–91,2%) [92].
Dans le contexte du développement équilibré des flux commerciaux réels, la détérioration des termes de l'échange de 1,9% a conduit à une dégradation de la balance commerciale. Le déficit de cette dernière s'est chiffré à 11,502 milliards de francs en 1989. Pour la première fois depuis 1983, cette tendance a fait baisser l'excédent de la balance des revenus au-dessous des 10 milliards de francs [93].
Les Chambres ont pris connaissance des rapports sur la politique économique extérieure en 1988. Les deux Conseils ont partagé quelque inquiétude quant à l'évolution de certains domaines. Ainsi en est-il allé des négociations actuellement en cours au GATT, plus particulièrement des conséquences que pourrait avoir l'Uruguay Round sur l'agriculture suisse. La plupart des orateurs, ainsi que la commission de la chambre du peuple et les groupes radical, UDC et démocrate-chrétien, ont explicitement souhaité que la structuration agricole actuelle ne soit pas démantelée, même si certains d'entre eux conçoivent la nécessité d'adaptations structurelles. Dans ses réponses, Jean-Pascal Delamuraz a souligné que la Suisse désirait la reconnaissance, au niveau mondial, d'une politique agricole poursuivant des buts autres qu'économiques et a clairement spécifié qu'il n'était pas question d'abandonner ce secteur [94]. Les préoccupations quant à l'endettement et au devenir des relations Nord-Sud sont partagées par les deux chambres, tout comme celles relatives à la problématique des échanges avec l'Afrique du Sud. A ce propos, le chef de l'économie publique a précisé que le commerce des diamants avec ce dernier pays n'était soumis, sur le plan international, à aucune rétorsion et qu'il ne saurait, dès lors, être question d'un quelconque contournement de sanction.
Alors que le Conseil national s'interrogeait également sur les relations entre I'AELE et la CE, la garantie des risques à l'exportation (GRE), l'inflation et les forêts tropicales, la chambre des cantons envisageait la difficile situation économique des pays de l'Est. Dans ce contexte, la conseillère aux Etats Yvette Jaggi (ps, VD) a proposé une sorte de second plan Marshall en leur faveur, les aides bilatérales lui apparaissant insuffisantes. Si J.-P. Delamuraz s'est dit favorable à une multilatéralisation de l'appui, il a néanmoins émis quelques doutes quant à l'adhésion des pays d'Europe orientale à une telle proposition. De surcroît, leurs diversités nationales, politiques et économiques constituent un obstacle à une telle issue [95].
 
[91] FF, 1990, I, p. 265 ss.; Rapp.gest. 1989, p. 308 s.; RFS, 49, 5.12.89; SNB, Geschäftsbericht, 82/1989, p. 5 ss.
[92] Toutes ces valeurs sont nominales. Pour tous les chiffres: FF, 1990, I, p. 361 ss.
[93] FF, 1990, I, p. 265 ss.; Rapp.gest. 1989, p. 309 s.; SNB, Geschäftsbericht, 82/1989, p. 7 s. et 24 ss.; «La situation économique en Suisse en 1989», in La Vie économique, 'supplément, 1990, no 1, p. 18 ss. Cf. aussi infra, part. I, 4a (Konjunkturlage) et 4b (Geld- und Währungspolitik) ainsi que Lit. Brodmann.
[94] Par exemple, la protection de l'environnement.
[95] FF, 1989, I, p. 305 ss.; BO CE, 1989, p. 81 ss.; BO CN, 1989, p. 200 ss. ; JdG et 24 Heures, 9.3.89. Cf. aussi APS 1988, p. 73 s.