Année politique Suisse 1989 : Economie / Agriculture / Politique des revenus
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Demandes et fixation des prix
Selon J.-P. Delamuraz, les négociations du GATT auraient pu remettre en question le rituel annuel de demande des prix des paysans car, bien que la réunion de Genève en avril 1989 se soit soldée par une réussite dans le sens où la Suisse peut continuer à appliquer ses mesures de protection à la frontière, elle a dû tout de même faire quelques concessions et, en particulier, s'engager à geler ses prix agricoles. C'est pour-quoi, d'ailleurs, J.-P. Delamuraz a chargé un groupe de travail, sous la direction de J.-C. Piot, directeur de l'Office fédéral de l'agriculture, d'analyser, entre autres, les répercussions des négociations du GATT sur l'agriculture suisses [11].
Cependant, les organisations paysannes ont remis, comme chaque année, leur catalogue de revendications au Conseil fédéral. Pour justifier ses exigences, l'USP a signalé que la hausse des taux hypothécaires avait augmenté les charges des paysans et accentué davantage leur manque à gagner. Celui-ci se chiffrait à 10,50 francs par jour. Par rapport au salaire paritaire (dont la référence est le revenu journalier de l'ouvrier qualifié) qui est de 170 francs par jour en moyenne sur les trois dernières années, le revenu paysan était de 159,50 francs en plaine et seulement de 103,10 francs en montagne. Les demandes d'augmentation des prix visaient donc à rapprocher le revenu du paysan du salaire paritaire, ce qui aurait dû représenter pour 1990 une rallonge d'environ 200 millions de francs dont les 75% auraient été consacrés au lait.
Les revendications de l’USP étaient de 6 centimes de plus par kilo du prix de base du lait; de 1 franc 60 par 100 kg de betteraves sucrières; de 20 à 50 centimes le kilo de viande suivant l'espèce et de 2 francs pour 100 kg de pommes de terre. L'USP demandait en outre une augmentation des allocations pour enfants ainsi que des fonds pour l'amélioration foncière. Selon Melchior Ehrler, directeur de l’USP, ces revalorisations ne s'opposaient pas au gel des prix décidé par les pays du GATT dans la mesure où une certaine flexibilité est possible lorsqu'il y a une limitation de la production comme le contingentement (lait, sucre) ou par le biais d'une baisse de surface cultivée (pomme de terre). D'autre part, la scission entre l'USP et le VKMB a semblé se dessiner nettement puisque ce dernier, pour la deuxième fois consécutive, a présenté séparément son catalogue de revendications dont les principales différences avec celui de l'USP étaient la volonté d'échelonner les prix en faveur des petites exploitations et d'élargir le principe des primes écologiques [12].
En fin de compte, les décisions du Conseil fédéral n'ont satisfait que partiellement les milieux paysans. Le prix du litre de lait a augmenté de 5 centimes pour le producteur, les pommes de terre de 2 francs par 100 kilos et la viande de 10 à 25 centimes par kilo. Par contre, dans un environnement international qui est à la surproduction et à la baisse généralisée des prix, la production de céréales panifiables est accompagnée désormais d'une contribution des producteurs aux frais de mise en valeur lorsque la quantité dépasse 450 000 tonnes par année pour la Suisse entière. Pour 1989, cette mesure signifie une diminution du prix payé au paysan de 5 à 6 francs par 100 kg, ce qui a provoqué la grogne des organisations agricoles. Toutes ces modifications prendront effet le ler février 1990. Elles doivent améliorer le revenu agricole global d'environ 173 millions de francs, c'est-à-dire une augmentation du revenu quotidien de 6 à 7 francs par jour en plaine et de 11 francs en montagne [13].
 
[11] TA, 13.4.89 et cf. supra, part. I, 2 (Institutions mondiales).
[12] Presse du 13.9.89; LID-Pressedienst, 1615, 15.9.89; USS, 28, 20.9.89. Pour le processus de fixation des prix et l'importance du taux hypothécaire, cf. LNN, 15.5.89; Bund, 1.6.89; Vat., 18.8.89 ainsi que NZZ, 30.8.89.
[13] Presse du 21.12.89; LID-Pressedienst, 1629, 22.12.89.