Année politique Suisse 1989 : Infrastructure, aménagement, environnement / Protection de l'environnement
 
Politique de protection de l'environnement
Alors que la mise en place de sa législation sur la protection de l'environnement s'est poursuivie, la Suisse a également dirigé son activité à l'extérieur par une action importante sur le plan international.
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Activité internationale de la Suisse
La prise de conscience au plus haut niveau, dans le monde entier, de l'urgence des problèmes écologiques s'est cristallisée en 1989 par la tenue d'un nòmbre important de conférences internationales où la Suisse ne fut pas le moins actif des participants. Cette attitude lui est facilitée par l'avance de sa législation sur l'environnement par rapport aux autres pays [1].
La détermination helvétique de mener une politique de l'environnement à l'échelon européen s'est manifestée par la voix de F. Cotti lors de la rencontre trilatérale France-Italie-Suisse sur l'environnement à Milan où il affirma la résolution de la Suisse de collaborer avec la CE. Il fit de même à la réunion de Vienne des ministres de l'environnement d'Autriche, d'Allemagne de l'Ouest, du Liechtenstein et de la Suisse dans le but d'harmoniser les points de vue de leurs gouvernements respectifs où il insista pour que la CE et l'AELE organisent une conférence commune sur ce sujet [2]. Dans le même esprit, la Suisse a adopté, avec 28 autres pays, la charte européenne «Environnement et santé» à Francfort que F. Cotti considère. comme un premier pas à une collaboration active au niveau continental. Proposée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), cette charte établit une causalité directe entre les problèmes liés à l'environnement (dégradation de l'air, de l'eau, du sol, de l'alimentation) et les risques croissants pour la santé humaine. Son but, outre l'incitation à prendre des mesures concrètes pour y remédier, vise surtout à une amélioration de l'information sur les dangers actuels potentiels et à inciter les médias à sensibiliser et responsabiliser le public afin de créer un climat favorable à la protection de l'environnement [3].
D'autre part, un accord de collaboration a été paraphé à Berne entre l'URSS et la Suisse par leurs ministres de l'environnement respectifs. L'intérêt de l'URSS réside dans le fait que la Suisse se trouve au coeur de l'écosystème alpin et que l'on retrouve un système de ce type dans le Caucase et les Carpates. Elle est également curieuse de mieux connaître les installations de la chimie bâloise et les techniques aquises en matière de réparation des atteintes à l'environnement; l'URSS est préoccupée par la santé de ses rivières et de ses lacs et désirerait bénéficier de l'expérience et de l'avance helvétique en matière d'assainissement des eaux. L'intérêt suisse est axé autour de la possibilité qu'auront les chercheurs publics et privés d'utiliser les résultats de la recherche soviétique dans les domaines de l'espace et de la montagne. Dans une première phase, l'accord se concentrera sur les problèmes de lutte contre la pollution de l'air, puis il s'appliquera aux eaux et enfin aux déchets [4].
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Economie et écologie
La foire suisse sur l'environnement Pro Aqua-Pro Vita 1989, axée sur le professionnalisme et les techniques de pointe, a montré l'évolution qui s'effectue dans le sens d'un dépassement de la contradiction entre l'économie et l'écologie. Cette dernière fait désormais partie intégrante du marché. Cette tendance est particulièrement défendue par B. Böhlen, directeur du nouvel office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP), qui prône des technologies de défense de l'environnement de plus en plus performantes pouvant être exportées – créant, de surcroît, des emplois hautement qualifiés — et qui cherche à motiver les entreprises en montrant les profits que l'on peut tirer de la protection de la nature. Par ailleurs, la professionnalisation croissante des métiers dans ce domaine s'est matérialisée dans l'ouverture du Centre suisse de formation pour la protection de la nature et de l'environnement (SANU) à Bienne. Si cette école s'adresse aux spécialistes actifs (responsables de stations d'épuration, ingénieurs forestiers), elle concerne également des juristes ou des cadres et, en dehors de ces stages de perfectionnement, offre aussi une formation professionnelle complète [5].
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Prévention des catastrophes
Le projet d'ordonnance sur la protection contre les accidents majeurs (OPAM) constitue la réponse du Conseil fédéral à la catastrophe chimique de Schweizerhalle (BL) du ler novembre 1986. Il vise à combler les lacunes existantes à ce sujet dans la loi sur la protection de l'environnement (LPE). Ce texte dresse la liste de plus de 300 substances dont le stockage, au-delà d'une certaine quantité, présente des dangers. Les entreprises entrant dans ce cadre seront soumises aux prescriptions de cette ordonnance; elles devront demander une autorisation au canton concerné et lui présenter un plan de sécurité pour la population environnante en cas d'accident (information de la population et du pouvoir local, plan d'évacuation) ainsi que la liste des mesures prises pour prévenir , toute catastrophe. Si l'autorité compétente juge ce catalogue insuffisant, elle peut décider de mesures supplémentaires sans avoir à tenir compte de leur aspect financier; cette ordonnance accorde donc de l'importance à la responsabilité individuelle du propriétaire et de l'exploitant. L'élaboration des inventaires des installations dangereuses sera la tâche des cantons; aucun organisme centralisateur n'est prévu au niveau fédéral [6].
Soumise à consultation en 1989, cette ordonnance reçut un accueil favorable et ne rencontra aucune opposition fondamentale. Cependant, les organisations de protection de l'environnement, les syndicats et la plupart des cantons ont demandé certains renforcements des mesures envisagées pour les activités liées au génie génétique. Il fut aussi regretté que l'ordonnance stipule que les dossiers des entreprises livrés aux cantons sur la manière d'informer et de protéger les habitants restent confidentiels; beaucoup aimeraient voir, au contraire, une extension de l'information de la population [7].
Egalement consécutive à la catastrophe de Schweizerhalle, une initiative du canton de Bâle-Campagne fut débattue au Conseil des Etats. Intitulée «chimie et environnement», elle demandait aux Chambres fédérales de prendre des mesures dans le but de soutenir des travaux de recherche visant à trouver des substituts aux substances nuisibles à l'environnement, de créer des bases légales pour la perception de taxes sur les produits dangereux s'il s'avère qu'on ne peut y renoncer, de limiter la production de déchets spéciaux, d'appliquer le principe du pollueur-payeur de façon systématique et de créer des services d'information pour renseigner autant les consommateurs que les autorités. Constatant qu'une grande partie des demandes de Bâle-Campagne faisait déjà l'objet d'un examen par l'administration fédérale, la petite chambre décida de ne donner aucune suite à cette initiative [8].
Une nouvelle ordonnance sur la centrale nationale d'alarme fut mise en consultation à la fin de l'année 1989. Elle doit réglementer les devoirs et fixer l'activité de cet organisme en cas de rupture de barrage, de catastrophe chimique ou d'accident nucléaire. La centrale nationale d'alarme a la compétence d'alarmer, d'informer et de donner à Fa population des directives sur le comportement à adopter. Elle doit également contacter et collaborer avec les médias ainsi qu'avec les autorités civiles et militaires pour la transmission de l'alarme et la conduite à suivre [9].
S'appuyant sur les conséquences de la catastrophe de Schweizerhalle et constatant l'insuffisance du droit suisse en la matière, une réflexion en profondeur s'élabore autour d'une redéfinition de la responsabilité en cas d'atteinte à l'environnement. Une commission d'experts réunie par le DFJP proposera en 1990 une révision complète de la législation suisse sur ce sujet. Elle aimerait réaliser une responsabilité civile indépendante de la faute pour les problèmes d'environnement, ce qui signifie que, même s'il ne l'a pas commise, l'exploitant serait tenu pour responsable aux yeux de la loi. Cette idée est née du fait qu'il existe de plus en plus de situations à risques où aucune responsabilité ne peut être établie si l'accident n'est pas dû à une erreur de l'exploitant (comme dans le cas de l'incendie des entrepôts de Sandoz) [10]. La même idée s'est développée au congrès annuel de la Société suisse des juristes à Flims (GR). A. Koller y a plaidé pour une extension de la responsabilité encourue en cas d'activité présentant un risque particulier [11].
 
[1] Sur la participation de la Suisse aux activités internationales dans le domaine de la protection de l'environnement, cf. JdG, 22.8.89 ainsi que L'Hebdo, 2.3.89 (diplomatie «verte» de la Suisse et mise en évidence du rôle d'A. Clerc, sous-directeur de l'Office fédéral de l'environnement, des forets et du paysage (OFEFP)). En ce qui concerne les conférences internationales sur le climat et l'assainissement de l'air, cf. infra, Qualité de l'air. Sur les déchets, cf. infra, Déchets.
[2] Rencontre de Milan: JdG, 24.10.89; NZZ, 30.10.89. Réunion de Vienne: JdG, 19.8.89. Relations de la Suisse avec la CE en matière d'environnement: Umweltschutz in der Schweiz (Bulletin de l'OFEFP), 1989, no 1 (cité plus loin uniquement Bulletin de l'OFEFP); SGU-Bulletin, 1989, no 1, p. 3 ss.
[3] BaZ, 8.12.89; TA et NZZ, 9.12.89. Conceptions de F. Cotti sur la protection de l'environnement: Vat., 29.12.89; NZZ, 30.12.89. Cf. aussi APS 1988, p. 171.
[4] NZZ, 30.6.89; presse du 25.11.89.
[5] Pro Aqua-Pro Vita: SHZ, 1.6.89 (cahier spécial); presse du 6.6.89. B. Böhlen: BaZ, 10.6.89; Bund, 27.6.89; SGT, 19.7.89; JdG, 22.8.89; SHZ, 14.9.89. Technologie environnementale: SHZ, 5.10.89. Généralités: L'Hebdo, 6.7.89. SANU: presse du 26.5.89. Réflexion du Parti radical sur la conjugaison possible entre protection de l'environnement et économie de marché: NZZ, 29.5.89; DP, 955, 15.6.89. Problème de l'aménagement urbain face à l'alternative entre économie et écologie: Vie économique, 63/1989, no 12, p. 26 ss.
[6] Suisse, 16.1.89; Bulletin de l'OFEFP, 1989, no 2. Voir aussi APS 1988, p. 171.
[7] Presse du 3.5.89; NZZ, 11.9. et 2.10.89; JdG, 13.9.89; BaZ, 18.9.89; LNN, 20.9.89; Dém., 21.9.89.
[8] BO CE, 1989, p. 834 ss. (décision prise par 18 voix contre 11); NZZ et BaZ, 15.12.89.
[9] NZZ, 4.10.89.
[10] Presse du 11.8.89. Voir aussi JdG, 23.8.89.
[11] Presse du 2.10.89; Revue de droit suisse, 108/1989, II, p. 513 ss.; cf. aussi Lit. Petitpierre et Wagner.