Année politique Suisse 1990 : Chronique générale / Défense nationale
Constructions militaires
Le programme des constructions 1990 se caractérise par une nouvelle orientation puisqu'il concerne en priorité des réalisa
tions servant directement à
la troupe. Ainsi, des 370 millions de francs attribués par les deux Conseils, 33% sont destinés aux ouvrages de combat, 20% à cinq projets de logistique et 41% aux constructions en faveur de l'instruction
[50].
Dans ce dernier poste figure notamment le crédit pour la deuxième étape de l'édification de la
place d'armes de Neuchlen-Anschwilen (commune de Gossau, SG). Devant remplacer la caserne de Saint-Gall détruite en 1980 en raison des travaux de la N1, cette élévation, dont le montant de la première étape fut adopté par les Chambres en 1989, reste très controversée, notamment par les partis socialiste, écologiste, indépendant et évangélique ainsi que par I'ARNA (Aktionsgruppe zur Rettung von Neuchlen-Anschwilen). S'ils invoquent la protection de l'environnement, les adversaires du projet demandent plus concrètement une pause de réflexion afin de pouvoir tenir compte de la nouvelle architecture européenne ainsi que du futur concept "Armée 95". Les partisans de la place d'armes, parmi lesquels on trouve un comité ad hoc (ISGA (sigle allemand), communauté d'intérêts en faveur de lieux de formation militaire sensés et crédibles), les partis bourgeois gouvernementaux et les libéraux, plaident quant à eux pour une amélioration et un assainissement des infrastructures
[51]. .
Au
Conseil national, ces derniers l'emportèrent puisque les propositions de rejet du crédit, de redimensionnement du projet, de déplacement de la caserne dans un autre lieu ainsi que celle d'un vote consultatif des populations concernées furent toutes repoussées. De surcroît, la majorité de la grande chambre intégra au programme des constructions 1990 l'engagement financier nécessaire à la troisième phase de la construction de cette place d'armes (12,97 millions de francs), afin d'éviter la répétition d'un tel débat en 1991. Le Conseil des Etats entérina cette extension, malgré une proposition s'y opposant de la conseillère aux Etats Bührer (ps, SH)
[52]..
A ces décisions s'opposèrent le lancement et l'aboutissement de
l'initiative populaire "40 places d'armes, ça suffit! L'armée doit aussi se soumettre à la législation sur la protection de l'environnement"
[53]. Initiée par l'ARNA en juin, soutenue par les socialistes, les écologistes, les indépendants et les évangéliques, elle fut déposée en décembre, munie de 120 983 signatures
[54]. Elle demande principalement l'interdiction de toute nouvelle construction de places d'armes en Suisse, avec un effet rétroactif au ler avril 1990, ce qui entraînerait l'interdiction de l'édification de la seconde étape de la caserne de Gossau. Ce problème refera donc à plusieurs titres surface devant les Chambres car, bien qu'une première motion du député Rechsteiner (ps, SG) demandant la renonciation à la première phase de l'élévation de la place d'armes eût été rejetée par le Conseil national, une seconde motion du même homme, plus radicale puisqu'exigeant un moratoire total d'au moins cinq ans pour les achats, les constructions et les acquisitions de terrains à des fins militaires, est toujours pendante
[55].
Ayant surmonté une proposition de renvoi du député Bodenmann (ps, VS), arguant de la nouvelle situation en Europe pour réduire les dépenses de l'armée, le programme des constructions 1990 donna par ailleurs lieu à une délibération à huis clos du Conseil national. Cette dernière, ayant trait au poste des ouvrages pour l'infrastructure de commandement, portait sur un crédit de 56,5 millions de francs relatif à
l'abri du Conseil fédéral en cas de crise. Le groupe socialiste, bien que ne s'opposant pas véritablement au projet, souhaita, sans succès, qu'une délégation parlementaire puisse visiter cette installation dont la localisation et les coûts totaux sont strictement secrets
[56].
[50] FF, 1990, II, p. 453 ss. et Ill, p. 601 ss. Dans ce crédit sont également compris 8 millions au titre de la protection de l'environnement et 9,73 millions de crédits additionnels.
[51] Presse du 9.4.90; NZZ. 17.4.90; JdG, 21.6.90. Cf. aussi APS 1989, p. 89.
[52] BOCN, 1990, p. 993 ss., 1055 ss. et 1123 ss.; presse des 5.6., 14.6. et 20.6.90; BO CE, 1990, p. 621 ss.; presse du 21.9.90.
[53] FF, 1990, II, p. 1160 s.; presse des 25.6., 26.6. et 27.6.90; L'Hebdo, 23.5.90.
[55] BO CN, 1990, p. 1 131 s.; Dé/ib. Ass. féd., 1990, I/Il, p. 35.
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