Année politique Suisse 1990 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Trafic routier
Lancé en 1989 par l'AST, les écologistes, une partie de la gauche et l'IG Velo, le
référendum sur la révision de la loi sur la circulation routière (LCR)
a abouti en début d'année avec 81 452 signatures valables. Seul un point de la loi était contesté: celui comportant l'autorisation, pour les camions de 2,50 mètres de large, de circuler sur tout le réseau routier helvétique, y compris sur les routes (communales et cantonales) où, jusque là, seule une largeur maximale de 2,30 mètres était admise. Le reste de la révision proposait diverses innovations, visant notamment à renforcer la sécurité routière et la protection de l'environnement, qui, elles, firent l'unanimité
[25].
Le
résultat de la votation sur la LCR fut serré et ce n'est qu'avec une majorité de 53% que le peuple suisse a adopté ce texte. Comme dans tous les scrutins relatifs au domaine routier, les cantons romands se sont distingués par leur hostilité face à toute norme limitative en matière de circulation et ont accepté massivement la loi. C'est même grâce à leurs voix que la balance pencha en faveur du oui. De par l'acceptation populaire, la nouvelle LCR entrera en vigueur le ler février 1991
[26].
Les
opposants à la révision de la LCR ont prétendu que la nouvelle norme sur la largeur des poids lourds avantageait encore les transports routiers, notamment le trafic sur de longues distances, au détriment du ferroutage qu'il s'agit de promouvoir. Une telle amélioration des conditions de transports a également été considérée comme un facteur d'accroissement du trafic (par l'augmentation du nombre de camions et de trajets) et donc des émissions polluantes. Ils ont encore avancé qu'une acceptation de la LCR serait un premier pas vers l'autorisation donnée aux 40 tonnes de rouler en Suisse. Dans le domaine de la sécurité routière, ils ont argué que des camions plus larges mettaient en danger la vie des piétons ou des cyclistes. En outre, l'augmentation de la largeur des camions conduirait, selon eux, à un élargissement des routes, ce qui empiéterait sur les terres agricoles, nuirait au paysage et, de plus, augmenterait les dépenses routières
[27].
Loi sur la circulation routière Votation du 23 septembre 1990
Participation : 40,3%
Oui: 899 051 (52,8%)
Non: 803 621 (47,2%)
Mots d'ordre:
Oui: PRD, PDC, UDC, PL, PA; USP, Vorort, USAM, ACS, TCS, ASTAG.
Non : PS, PE, AdI, PEP, Alliance verte, PdT, DS ; AST, Communauté de travail pour le droit du piéton, IG Velo.
Les
partisans de la LCR – partis bourgeois, organisations d'automobilistes et, plus particulièrement, transporteurs routiers — ont estimé que, compte tenu de la politique de la Confédération (NLFA, Rail 2000, 28 tonnes), cette loi n'était pas à voir comme favorisant le transport routier, mais plutôt comme un acte de solidarité et d'harmonisation européenne; les pays de la CE ayant depuis longtemps pour règle une largeur de 2,50 mètres, s'adapter à cette norme permet à la Suisse de ne pas se retrouver isolée et représente une sorte de contrepartie au refus d'ouvrir un corridor routier pour les 40 tonnes. Ils ont ajouté que, les camions de 2,30 mètres ne se fabriquant pratiquement plus, il était beaucoup plus rationnel de généraliser ceux de 2,50 mètres, d'autant plus que cette largeur standard permet de charger un volume de marchandises proportionnellement plus important, diminuant de ce fait le nombre de trajets et, donc, l'impact du trafic poids lourds sur l'environnement. D'autre part, ils ont considéré qu'il était absurde de mettre en danger une loi positive en tous points en attaquant une seule de ses dispositions, qui ne fait, de surcroît, qu'entériner une situation existante
[28].
La
campagne sur ce référendum fut terne, tant l'importance des deux initiatives anti-nucléaires sur lesquelles les citoyens devaient se prononcer le même jour éclipsa l'objet du vote. Le débat se déroula en bonne partie autour du problème européen, dont l'analyse Vox de cette votation souligne d'ailleurs l'importance, en termes d'harmonisation des normes, dans les motivations de vote des acceptants. Cela est à mettre en relation avec le oui massif des Romands; cette région linguistique, généralement opposée à toute restriction de la circulation routière, est également celle dont la sensibilité européenne est la plus aiguë. Le non des opposants, s'il était motivé par la crainte d'accidents et d'atteintes à l'environnement, ne s'est, par contre, pas cristallisé autour du problème de l'intégration européenne
[29].
[25] FF, 1990, I, p. 1083 et II, p. 684 ss.; presse du 16.1.90; BaZ, 6.3.90; NZZ, 7.3.90. Voir aussi APS 1988, p. 146 s. et 1989, p. 144 s.
[26] FF, 1991, I, p. 275 ss.; presse du 24.9.90; NZZ, 25.9.90. Entrée en vigueur et volonté des cantons de limiter l'utilisation de leur droit de dérogation: LNN et BüZ, 24.12.90; BZ et Vr; 27.12.90. Sur la votation en général: SZ, 7.8.90; CdT, 17.8.90; TA, 22.8.90; Vat. et SGT, 25.8.90; LNN, 29.8.90; USS, 26, 29.8.90 et presse du mois de septembre.
[27] Arguments des opposants à la LCR: Vr, 8.8. et 31.8.90; BaZ, 21.8.90; NZZ, 27.8.90; VO, 27, 5.7.90 et presse du mois de septémbre.
[28] Arguments des partisans de la LCR: Bund, 5.6.90; NZZ, 6.6.90; AT, 25.7.90; SGT, 11.8.90; NZZ, 29.8.90 et presse du mois de septembre. Voir aussi DP, 1003, 26.7.90.
[29] Vox, Analyse der eidgenössischenAbstimmungvom 23. September 1990, Zürich 1991. En ce qui concerne les votations sur les initiatives antinucléaires, cf. supra, part. 1, 6a (Energie nucléaire).
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