Année politique Suisse 1991 : Chronique générale / Défense nationale / Armement
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Programmes d'armement
En mars, le Conseil national a finalement approuvé le programme d'armement 1990, bloqué à la fin de l'année précédente afin de procéder à une réévaluation du crédit accordé pour l'obtention des nouveaux fusils d'assaut 90, ainsi que de leur nombre [45]. Près d'un milliard et demi de francs (1,4 milliards) ont finalement été libérés qui, outre l'acquisition susmentionnée, sont destinés à l'achat de bottes de combat, ainsi qu'à la compensation du renchérissement intervenu dans le cadre de l'achat du char 87 Léopard.
Cependant, l'acceptation de ce programme ne s'est pas faite sans mal puisqu'il dut affronter, outre une proposition de non-entrée en matière Leutenegger Oberholzer (pe, BL), plusieurs variantes lors de la discussion de détail. Ces dernières portèrent essentiellement sur le nombre des nouveaux fusils d'assaut nécessaires. Si le gouvernement, soutenu par le Conseil des Etats et la majorité de la commission du Conseil national, proposait l'achat de 200 000 armes (avec une option pour 100 000 autres), le député Ledergerber (ps, ZH), soutenu par les socialistes, souhaitait limiter ce chiffre à 100 000 (avec une option ultérieure de 100 ou 200 000), en vertu de la réduction des effectifs qu'entraînera "Armée 95". Par ailleurs, le Conseiller national Günter (adi, BE) a proposé, avec l'appui de son groupe, une diminution du crédit relatif à cette obtention. Ces différentes options ne furent pas retenues par le plénum et le projet fut finalement accepté avec une confortable majorité, les partis bourgeois s'étant exprimé sans ambages en sa faveur [46].
Le crédit total du programmé d'armement 1991 s'élève à 1770 millions de francs (+11,6% par rapport à 1990). Parmi les différents postes pourvus figurent ceux de l'équipement général (31,4% du crédit, soit 555 millions de francs), de l'infanterie (26,2%, 464 millions de francs), de l'artillerie (18,5%, 327 millions de francs), de l'aviation et des troupes de DCA (14,7%, 261 millions de francs) ainsi que du génie et des fortifications (9,2%, 163 millions de francs). La part adjugée à l'industrie suisse s'élève à 69% dont 78% pour les entreprises privées et 22% pour les entreprises fédérales d'armement. Les commandes attribuées à l'industrie suisse à titre compensatoire s'élèveront à 339 millions de francs [47].
Au Conseil national, ce programme d'armement fut accepté et se heurta à moins de problèmes que celui de 1990. S'il était soutenu par les partis bourgeois, les socialistes lièrent leur approbation à sa réduction ainsi qu'à l'acceptation d'une proposition Bodenmann (ps, VS), souhaitant que le programme 199 1 demeure valable pour 1992. Bien qù'également soutenue par les écologistes, cette variante fut rejetée par la Chambre, qui estima, suivant en cela sa commission, qu'elle préjugerait de l'acquisition d'un nouvel avion de combat. La proposition Günter (adi, BE), appuyée par les indépendants-évangéliques, visant à supprimer le crédit nécessaire à la modernisation des obusiers, fut également rejetée, tout comme celle de P. Bodenmann (ps, VS) destinée à soutenir financièrement les entreprises et administrations touchées par la restructuration envisagée dans le contexte d'" Armée 95". Dans ce dernier cas, la Chambre estima nécessaire d'établir a priori un plan social avant d'accorder des fonds. Enfin, la proposition Ledergerber (ps, ZH), souhaitant une diminution de 80 millions de francs par la renonciation à l'achat d'un système informatique de direction du feu pour l'artillerie de forteresse fut repoussée. Le Conseil des Etats adopta, quant à lui, facilement ce programme [48].
La grande chambre a décidé de ne pas donner suite à deux initiatives parlementaires concernant l'acquisition d'armement. La première, émanant du député Hubacher (ps, BS), entendait soumettre au référendum facultatif toutes les décisions du parlement en matière d'achat de matériel de guerre, de constructions militaires ou de places d'armes. La seconde, du conseiller national Rechsteiner (ps, SG), prévoyait un moratoire de cinq ans sur les mêmes sujets. L'opinion majoritaire, lors des débats, fut, concernant le premier texte, que le peuple avait déjà refusé une initiative populaire de même teneur en 1987, qu'il était illogique de n'astreindre qu'un seul secteur des dépenses fédérales au référendum, que la part des dépenses militaires dans le budget de la Confédération ne cessait de diminuer et que la cohérence globale de l'armée serait menacée. Pour le second texte, il fut particulièrement argué qu'une telle mesure porterait atteinte au concept "Armée 95" et que l'armée devait pouvoir être constamment modernisée et adaptée aux circonstances afin de garantir son efficacité [49].
 
[45] Cf. APS 1990, p. 92.
[46] BO CN, 1991, p. 502 ss.; FF, 1991, 1, p. 1314; NZZ et JdG, 2.2.91; presse du 15.3.91.
[47] FF, 1991, II, p. 653 ss.; TA, 26.1.91; presse du 28.3.91; LM, 26.4.91.
[48] BO CN, 1991, p. 1223 ss.; BO CE, 1991, p. 761 ss.; FF, 1991, IV, p. 198 s. ; NZZ, 18.5.91; presse du 21.6. et 25.9.91.
[49] BO CN, 1991, p. 2399 ss.; presse du 13.12.91.