Année politique Suisse 1992 : Chronique générale / Défense nationale / Constructions militaires
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Places d'armes
Suivant l'avis du gouvernement, le Conseil national a rejeté l'initiative populaire «40 places d'armes, ça suffit! L'armée doit aussi se soumettre à la législation sur la protection de l'environnement» dans la proportion de deux contre un. Le traditionnel clivage gauche-droite sur les sujets touchant à l'armée s'est encore une fois retrouvé. La majorité de la chambre a considéré que ce texte pourrait être préjudiciable à la préparation de l'armée et qu'il était trop rigide en matière de gestion des places d'armes; selon les députés bourgeois, cela pourrait paradoxalement nuire aux intérêts de la protection de l'environnement et de l'aménagement du territoire. En outre, Neuchlen-Anschwilen (SG), projet plus particulièrement visé par les initiants, ne représenterait pas une 41e place d'arme, mais le remplacement de celle de Saint-Gall. Quant à l'assujettissement de la construction de places d'armes aux législations cantonales et communales, la chambre à estimé que cela mettrait en danger le maintien du secret. Notons que, tout comme K. Villiger, le Conseil national et sa commission ont admis que le nombre de 40 places d'armes était suffisant pour les besoins de l'armée, mais qu'une certaine souplesse était nécessaire dans leur gestion et leur aménagement. D'autre part, deux propositions de contre-projet ont été rejetées. La première, celle de E. Oehler (pdc, SG), demandait le maintien du statu quo, mais avec possibilité de transformer et d'agrandir les places existantes. La seconde, venant des automobilistes, était de même teneur mais demandait en plus la possibilité de remplacer les installations existantes par de nouvelles [58].
K. Villiger s'est engagé à suspendre les travaux relatifs au projet de construction de Neuchlen-Anschwilen jusqu'au vote populaire. Cela répondait au voeu d'une motion de la minorité de la commission qui a, de ce fait, retiré son texte [59].
Un débat identique à celui concernant l'initiative contre le nouvel avion de combat s'est déroulé autour de la clause de rétroactivité contenue dans le texte sur les places d'armes. C'est ainsi que la majorité de la commission du Conseil des Etats, emmenée par O. Ziegler (pdc, UR) avait proposé de déclarer irrecevable cette initiative. Cependant, dissuadée par les juristes consultés, elle s'est ensuite attaquée à l'unité de matière. Considérant que cette exigence n'était pas respectée, elle a proposé de la déclarer nulle. Dans la presse et au sein des milieux politiques et juridiques, cette décision a été largement contestée et considérée comme un acharnement inutile et politiquement préjudiciable, ainsi que comme un changement brusque et absurde de la pratique en matière de droits populaires. De fait, la chambre a préféré suivre la minorité, dirigée par O. Schoch (prd, AR) et soutenue par K. Villiger, qui, si elle rejetait l'initiative sur le fond, entendait la soumettre malgré tout à votation populaire.
Le Conseil des Etats a encore débattu d'une proposition Rhinow (prd, BL) de contre-projet prévoyant que la Confédération et les cantons exploitent 40 places d'armes au maximum, celles-ci étant soumises aux seules législations fédérales sur l'aménagement du territoire et l'environnement. Ce texte édulcorait donc quelque peu l'initiative et lui retirait sa clause rétroactive. Il fut pourtant rejeté, la Chambre l'ayant estimé inutile et ayant considéré qu'il ne fallait pas fixer dans la constitution une telle norme qui relève du détail [60].
 
[58] BO CN, 1992, p. 96 ss. et 1475; presse du 9.1. et 30.1.92; Bund et NZZ, 20.1.92; NZZ, 28.1.92. Voir aussi APS 1990, p. 94 et 1991, p. 105 s.
[59] BO CN, 1992, p. 122. Les travaux d'infrastructure en cours ont toutefois été achevés selon la planification établie: presse du 9.7.92.
[60] BO CE, 1992, p. 521 ss. et 740 ss.; NQ, 4.3.92; presse du 4.4., 20.5., 17.6., 8.7. et 29.8.92; NZZ, 9.6.92.