Année politique Suisse 1992 : Infrastructure, aménagement, environnement / Protection de l'environnement / Politique de protection de l'environnement
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Sommet de la terre
Réunissant plus de trente mille personnes, 185 pays, 57 chefs d'Etat et 31 chefs de gouvernement, la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED) s'est déroulée au mois de juin à Rio de Janeiro. Elle avait pour but de produire une déclaration fixant les grands principes d'une gestion commune et durable de la terre et un plan d'action, l'Agenda 21, établissant, en quelque 800 pages, les moyens d'y parvenir. Ceci devait être accompagné d'une convention sur le climat et d'une convention sur la diversité biologique.
Les travaux préparatoires pour l'élaboration d'une convention sur le climat touchant à une réduction des émissions de CO2 pour les pays industrialisés se sont achevés autour d'un projet minimal ne comportant ni limitations, ni calendrier. Ce faible résultat fut notamment dû à une opposition des Etats-Unis à toute mesure limitative et contraignante. Les autres pays industrialisés (principalement CE et AELE) se sont prononcés pour une stabilisation au niveau de 1990 des émissions de CO2 d'ici l'an 2000, afin d'aller ensuite dans le sens d'une réduction [7]. Des divergences sont également apparues en ce qui concernait le mode et le montant du financement des projets d'aide au Tiers-monde en matière d'environnement, les pays riches ayant eu quelque réticence à délier leur bourse: les 125 milliards de dollars par an nécessaires ont été considérés comme une somme impossible à débloquer en période de conjoncture difficile. L'élaboration d'un texte sur le respect de la diversité biologique fut également problématique et donna lieu à d'âpres négociations; l'impasse fut complète puisque les Etats-Unis déclarèrent qu'ils ne la signeraient pas, prétextant leur opposition au système de financement prévu. Au vu de ces divergences, c'est donc sur un constat d'échec partiel que débuta (et s'acheva) la Conférence de Rio [8].
Pour la Suisse, l'élément essentiel de la Conférence de Rio était la mise au point d'une convention sur le climat. Le chef du DFI a considéré que les changements climatiques représentaient un risque majeur et que la réussite de la conférence serait jugée sur l'aboutissement de ce dossier. Malgré les échecs des travaux préparatoires, la délégation suisse a déclaré qu'elle restait optimiste et que, de toute manière, le sommet de la terre représentait un changement important dans la politique environnementale globale, et que sa seule tenue montrait une évolution des mentalités; développement économique et protection de l'environnement sont désormais indissociables. Elle s'est prononcée pour un important déblocage de moyens finantiers et technologiques en faveur du Tiers-Monde, et a entendu souligner le caractère supranational que doit revêtir la politique de l'environnement [9].
Lors de la Conférence, la Suisse, si elle a signé la convention sur le climat, a voulu, de concert avec l'Autriche, rejointe par le Liechtenstein et, dans un premier temps, la Hollande, faire une déclaration solennelle afin de préciser ses engagements et de renforcer la portée de ce traité en proposant notamment une stabilisation des émissions de CO2 d'ici l'an 2000. Ces trois nations ont cherché d'autres partenaires pour s'associer à leur initiative. Malgré les pressions des Etats-Unis, la CE s'est dite séduite par ce projet. D'autre part, la Suisse a signé la convention sur la diversité biologique, mais en émettant néanmoins certaines réserves afin de se protéger en matière de propriété intellectuelle. En outre, c'est sous son impulsion que l'Agenda 21 a précisé certaines règles dans le domaine des transferts technologiques et que celui-ci s'est enrichi d'un chapitre sur la protection des montagnes [10].
A son retour de Rio, F. Cotti a annoncé que, pour assumer les engagements pris par la Suisse au sommet de la terre, il entendait préparer un projet de taxe sur le CO2, de caractère incitatif et qui devrait autant que possible être harmonisée au plan international [11]
Par ailleurs, la Suisse a débloqué une somme de deux millions de francs dans le cadre de sa participation au projet d'information sur le climat du programme environnement des Nations Unies [12].
 
[7] Signalons que la convention prévoit tout de même que les pays signataires doivent mettre en place des mesures de lutte contre les gaz provoquant l'effet de serre et qu'un fonds sera créé afin de permettre aux pays du Sud d'assurer leur croissance grâce à des technologies peu polluantes.
[8] Presse du 6.2, 4.4, 6.4 et 11.5.92; JdG, 15.2 et 21.3.92; Bund, 19.2.92; NQ, 22.2.92; NZZ, 22.2, 20.3 et 30.5.92; BaZ, 29.2.92; LNN, 1.4.92. Voir également BZ, 22.1.92; JdG, 29.2 et 20.5.92; Bund, 8.4.92; LZ, 22.4.92; NQ, 12.5.92. Cf. aussi APS 1991, p. 189. Cela n'alla pas sans attirer les critiques du WWF: presse du 28.3.92. Pour sa part, le Commissaire européen à l'environnement, Carlo Ripa di Meana, a refusé de se rendre au sommet de la terre, protestant ainsi contre le manque d'engagement précis de la part des pays industrialisés: JdG, 29.5.92.
[9] JdG, 6.4.92; BaZ, 9.4.92; presse du 12.5 et 22.5.92; 24 Heures, 1.6.92; Bulletin de l'OFEFP, 1992, no 2. Soulignons que la délégation suisse comprenait des représentants d'organisations non gouvernementales.
[10] Presse du 1-15.6.92.
[11] Presse du 23.6.92. Les ministres de l'environnement de l'Allemagne, de l'Autriche, du Liechtenstein et de la Suisse, lors d'une réunion, ont réaffirmé leur volonté d'aller dans le sens d'une taxation du CO2 en harmonie avec la CE: presse du 26.8.92.
[12] NZZ, 14.2.92.