Année politique Suisse 1993 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Chemins de fer
Face à l'explosion des coûts de Rail 2000, A. Ogi a annoncé qu'il voulait limiter les frais du projet à 8 milliards de francs, soit la moitié de son coût actuel. Cela signifie un
redimensionnement du projet nécessitant de faire des choix parmi le paquet accepté en 1987 par le peuple. Un telle démarche pourrait signifier que le souverain serait éventuellement appelé à se prononcer une nouvelle fois
[40]. Pour sa part, la Délégation des finances des Chambres fédérales s'est également inquiétée de l'évolution des coûts de Rail 2000. Elle a considéré que le prix initial avait été sous-estimé et que, vu l'état des finances fédérales et des CFF, ainsi que les oppositions qui retardent la construction, la réalisation du projet était entravée et qu'un sévère amaigrissement s'imposait
[41].
Pour répondre aux exigences du chef du DFTCE et de la délégation des finances, les CFF ont présenté en juin leur projet nommé «Rail 2000-1re étape», où le projet initial est revu à la baisse pour ne plus coûter qu'environ 7,4 milliards de francs
[42]. Ainsi, la proposition de relier les principaux noeuds ferroviaires helvétiques en moins d'une heure et à une cadence de trains de 30 minutes n'est maintenue que pour les lignes où la demande est suffisante
[43]. De la sorte, les
CFF abandonnent ou renvoient une bonne partie de la construction des tronçons prévus tels que les lignes Kloten-Winterthour ou Muttenz-Olten
[44]. En conséquence, il subsistera essentiellement la ligne Mattstetten-Rothrist, utile pour la liaison Berne-Olten et pour absorber le trafic du nouveau Lötschberg, le tunnel de Vauderens entre Lausanne et Fribourg et le triplement de la ligne Genève-Lausanne jusqu'à Coppet. Pour compenser l'abandon de la construction de certaines infrastructures lourdes, les CFF ont annoncé vouloir améliorer leur matériel roulant, notamment en acquérant des rames de type Pendolino et des wagons à deux étages, ce qui devrait permettre de réduire les temps de trajet et accroître les capacités. En outre, la ligne du pied du Jura serait mise à égalité avec celle passant par Fribourg et Berne en termes de temps de parcours. Selon les CFF, ce nouveau programme respecterait les objectifs de Rail 2000; l'offre ferroviaire serait substantiellement améliorée avec une diminution du temps de parcours de 8% entre les 23 villes principales de Suisse et avec une augmentation de la capacité de 13%
[45].
Le tracé contesté du tronçon Mattstetten (BE)-Rothrist (AG) a fait l'objet de plusieurs interventions parlementaires. La plus importante est venue du canton de Berne qui avait déposé une initiative demandant que le choix de la variante ne se porte pas sur le projet des CFF, mais sur celui des cantons de Berne et Soleure, associés aux communes concernées et à des associations d'aménagement; leur tracé, plus respectueux de l'environnement, nécessiterait un crédit supplémentaire de plusieurs centaines de millions de francs. La petite Chambre a décidé de ne pas donner suite à ce texte, considérant qu'il serait inopportun de modifier un arrêté fédéral adopté par le peuple, que chacun avait eu le loisir de s'exprimer dans le cadre de la procédure d'approbation des plans et qu'il convenait d'examiner la problématique de Rail 2000 dans son ensemble.
Pour les mêmes raisons, la Chambre haute a encore rejeté une motion de la minorité de sa commission qui demandait un examen approfondi des variantes en jeu, afin de permettre une comparaison et éventuellement un financement du tracé proposé par les cantons de Berne et Soleure. En revanche, elle a accepté un postulat de sa commission qui invite le gouvernement à soumettre au parlement un rapport concernant un examen général de Rail 2000, prenant en compte les diverses variantes existantes et leur coût, suggérant des mesures d'économie et faisant un bilan de la planification
[46].
[40] Presse du 3.3.93. Pour les CFF, ainsi que pour le CF, la construction par étape d'un Rail 2000 aminci ne nécessiterait pas d'arrêté fédéral supplémentaire soumis au référendum facultatif, ce qui n'est pas l'avis de H. Danioth (pdc, UR), président de la commission des transports du CE, et de la majorité de cette dernière. En fin de compte, le gouvernement a décidé de ne présenter au parlement qu'un rapport sur le nouveau projet dans le courant de l'année 1994: BZ, 1.7 et 2.7.93; presse des 31.8 et 9.9.93.
[41] Presse des 21.1, 29.1, 30.1 et 12.5.93; NQ, 28.1.93; Lib., 12.2.93; NZZ, 20.2.93. Voir aussi APS 1992, p. 164.
[43] Ces lignes sont: Genève-Lausanne-Berne, Lausanne-Sion, Berne-Zurich, Berne-Olten, Berne-Bienne, Berne-Spiez, Zurich-Bâle, Zurich-Olten, Zurich-St-Gall et Zurich-Ziegelbrücke.
[44] Quelques mois plus tôt, les opposants à ce dernier tronçon avaient trouvé le soutien, au niveau fédéral, de I'OFEFP. Celui-ci s'était en effet prononcé pour la variante soutenue par le gouvernement bâlois, les communes et les associations au détriment de celle des CFF: presse du 20.4.93; BaZ, 15.6.93. Voir aussi APS 1989, p. 148 et 1992, p. 164.
[45] Presse du 30.6.93. Des critiques sont notamment venues de Bâle (TA, 7.7.93; BaZ, 14.9 et 16.9.93), de Thurgovie (NZZ, 2.7 et 18.12.93, Ww, 8.7.93; SGT, 4.9.93), de Lucerne (LNN, 4.9.93) et de la Suisse orientale en général (NZZ, 10.7, 20.8 et 30.9.93, BZ, 12.7.93; SGT, 14.7.93). Le gouvernement Saint-Gallois s'est clairement opposé au projet des CFF: NZZ, 13.8 et 25.11.93.
[46] BO CE, 1993, p. 280 ss.; Bund, 6.2.93; SZ, 21.4.93; presse des 15.1, 19.1 et 29.4.93. Voir aussi APS 1989, p. 148 s., 1990, p. 161, 1991, p. 167 et 1992, p. 164.
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