Année politique Suisse 1994 : Economie / Agriculture
 
Politique des revenus
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Revenu paysan
Le revenu paysan s'est encore une fois dégradé en 1994. Selon les estimations de l'USP, le revenu journalier s'est monté à 111 francs, soit deux francs de moins qu'en 1993, et ceci compte tenu de la baisse des taux hypothécaires [24].
Malgré son soutien aux accords issus de l'Uruguay Round, l'USP s'est fortement inquiétée des conséquences du GATT sur le revenu paysan. Selon l'organisation, ce dernier sera amputé de 45% jusqu'en 2002. Pour remédier à ce manque, l'USP a proposé un transfert de 220 millions de francs par an aux agriculteurs provenant des domaines où le GATT impose des réductions de subventions [25].
Par ailleurs, une étude de l'OCDE a montré que les paysans suisses étaient les plus subventionnés du monde. Tenant compte des soutiens indirects (droits de douane) et directs, les auteurs ont pu calculer que 77% (moyenne européenne: 48%) du revenu des agriculteurs provenaient de subventions, ce qui représente un total de 6,63 milliards de francs par an [26].
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Paiements directs et fixation des prix
Le Conseil fédéral a pris une série de décisions propres à mettre en oeuvre la nouvelle politique agricole, soit diminuer les soutiens à la production tout en compensant les pertes de revenu par un accroissement des paiements directs. Le gouvernement a ainsi décidé d'abaisser le prix du colza de 20 francs par 100 kilos, celui du blé de 4 francs par 100 kilos, de diminuer les contributions à l'élimination du bétail de 14 millions, de supprimer 34% des suppléments de prix sur les huiles et les graisses comestibles et de réduire de 50 à 60 centimes par kilo le prix du beurre. Ces mesures devraient occasionner une perte de revenu de 293 millions de francs pour les agriculteurs. En contrepartie, mais également pour compenser la baisse de 10 centimes du prix du lait opérée en 1993, le gouvernement a décidé d'augmenter de 316 millions de francs les paiements directs, ce qui devrait signifier une revalorisation nominale du revenu paysan de 0,7%. De la sorte, les paiements directs complémentaires selon l'art. 31a de la loi sur l'agriculture sont passés à 800 millions de francs, soit une augmentation de 200 millions. Quant à eux, les paiements directs pour prestations écologiques selon l'art. 31b de cette même loi ont été triplés et sont passés à 171 millions de francs [27].
Même si elle a salué les efforts du gouvernement pour compenser la réduction des soutiens exigée par le GATT par des paiements directs, l'USP n'a pas été satisfaite des mesures prises par le Conseil fédéral. Elle a estimé qu'une revalorisation de 0,7% du revenu paysan était trop faible en regard du manque à gagner enregistré les années précédentes. Pour sa part, le VKMB a regretté que la répartition des paiements directs ne favorise pas plus ceux qui sont destinés à soutenir les prestations écologiques [28].
Répondant à un souci de rationalisation du parlement, le Conseil fédéral a regroupé en un seul projet de financement l'octroi des contributions aux frais des détenteurs de bétail de la région de montagne, des contributions à l'exploitation agricole du sol dans des conditions difficiles et des crédits d'investissement dans l'agriculture. Le message du gouvernement porte sur les trois années 1995-1997 et propose, pour cette période, le versement de 810 millions de francs au titre de contributions aux frais et de 450 millions à celui de contributions à l'exploitation agricole du sol. Ces sommes, malgré qu'elles soient stables par rapport aux années précédentes, représentent les paiements directs les plus importants pour l'agriculture de montagne et la zone préalpine des collines. Dans leur versement, ils devraient être harmonisés avec les paiements directs non-liés à la production. Pour leur part, les crédits d'investissement se montent à 15 millions de francs. Le parlement a adopté le projet du gouvernement [29].
Le Conseil national a transmis une motion Jäggi (pdc, SO) demandant que soit fixée une limite de revenu pour le droit aux paiements directs complémentaires. Cette mesure vise à supprimer l'inégalité de traitement entre un exploitant qui tire l'entier de son revenu de l'agriculture et celui qui a des sources financières annexes. En effet, le premier voit tous ses gains pris en compte pour l'octroi de contributions alors que le second peut soustraire ses ressources non-agricoles. Une réforme de ce principe créerait d'ailleurs les mêmes bases de calcul que pour les autres paiements directs où l'ensemble du revenu est pris en compte [30].
Les organisations agricoles ont fait part de leurs revendications pour 1995. L'USP a demandé que 550 millions de francs supplémentaires soient mis à disposition des paysans. Ceux-ci devraient se répartir à raison de 200 millions pour les paiements directs complémentaires, 250 millions pour les paiements directs pour prestations écologiques et 100 millions pour des mesures socio-structurelles, en particulier les crédits d'investissement. L'USP a rejeté toute idée d'économies du Conseil fédéral, notamment la suppression de la restitution des droits de douane sur les carburants. Par ailleurs, l'assemblée des délégués de l'USP a adopté une résolution demandant que la réduction des subventions impliquée par le GATT soit entièrement compensée par des mesures conformes à celui-ci, et que ce principe soit ancré dans la loi. Le VKMB a pour sa part exigé un accroissement des paiements directs pour prestations écologiques de 245 millions de francs [31].
 
[24] LZ, 21.12.94; LID-Dokumentationsdienst, 346, 21.12.94.24
[25] Presse du 20.8.94.25
[26] Presse du 23.8.94.26
[27] Presse du 27.1.94. Voir aussi APS 1993, p. 116 s. et 120. Relevons par ailleurs qu'en 1993 les paiements directs pour prestations écologiques ont connu un certain succès. La Confédération a en effet versé à ce titre 94 millions de francs, soit près de 40 millions de plus que la somme prévue initialement. Ce montant s'est réparti équitablement entre les compensations écologiques (44,3 millions) et la production intégrée (40,9 millions). Les deux autres programmes concernant la culture biologique et la détention contrôlée d'animaux en plein air ont respectivement bénéficié de 3,8 millions et de 5,3 millions. 70 000 agriculteurs ont été intéressés à ces programmes: presse du 25.5.94.27
[28] Presse du 27.1.94.28
[29] FF, 1994, II, p. 108 ss.; BO CE, 1994, p. 973 ss.; BO CN, 1994, p. 2382 ss.; FF, 1995, I, p. 14; presse du 4.10.94; SGT, 16.12.94. Eu égard à son projet, le gouvernement a également proposé le classement du postulat Bühler (udc, GR).29
[30] BO CN, 1994, p. 1896.30
[31] Presse des 13.9 et 18.11.94. Sur le projet d'abandon de la restitution des droits de douane perçus sur les carburants, cf. FF, 1995, I, p. 135 ss.31