Année politique Suisse 1994 : Infrastructure, aménagement, environnement / Protection de l'environnement / Qualité de l'air
La commission de gestion du Conseil national a présenté au Conseil fédéral son
rapport d'inspection sur la mise en oeuvre de la politique de protection de l'air. Cette instance avait en effet été saisie par une dénonciation du WWF se plaignant des déficits de mise en oeuvre en matière de protection de l'air, notamment pour ce qui est de l'exécution des plans de mesures prévus par l'ordonnance sur la protection de l'air (OPair). L'inspection a relevé un certain nombre de dysfonctionnements, au premier rang desquels des
défaillances dans la coordination verticale (Confédération-cantons) et horizontale (au sein de l'administration fédérale). Ces problèmes mettent en évidence l'inadéquation des moyens traditionnels de coordination tels que les consultations internes ou les directives avec les tâches existantes. C'est pourquoi la commission de gestion a recommandé au gouvernement une série de mesures propres à rétablir une certaine cohérence dans son activité. Elle a ainsi proposé de fixer des priorités politiques auxquelles pourraient se référer les divers offices, d'accorder une importance particulière aux mécanismes de coordination dans le cadre de la réforme du gouvernement, de créer une Délégation du Conseil fédéral pour l'environnement chargée de résoudre les conflits pouvant se présenter dans la mise en oeuvre de la politique de protection de l'air, d'accroître la collaboration avec les cantons et de favoriser la coopération de ces derniers entre eux, de simplifier et d'unifier les ordonnances d'application de la loi sur les droits d'entrée des carburants et d'uniformiser la pratique du Conseil fédéral en matière de réductions de vitesse sur les tronçons d'autoroute
[26].
A l'occasion du délai fixé par l'OPair (1er mars 1994) pour remplir les objectifs de la politique de protection de l'air, R. Dreifuss a dressé un
bilan de huit ans de lutte dans ce domaine. La conseillère fédérale a reconnu que, même si la pollution reculait, les buts de l'ordonnance n'ont pu être atteints. La plus grande efficacité a été obtenue avec le SO2 pour lequel les valeurs-limites sont respectées presque partout. En revanche, les émissions de NOx et de composés organiques volatils, même en diminution, restent beaucoup trop élevées. Ces deux éléments sont responsables des concentrations d'ozone de basse altitude (smog estival) dont les dépassements de valeurs-limites restent fréquents et importants. R. Dreifuss a affirmé que les efforts devaient être poursuivis par la Confédération et les cantons, notamment par la mise en oeuvre de la révision de la loi sur la protection sur l'environnement et des plans de mesures ainsi que par l'introduction de la taxe sur le CO2
[27].
Les
organisations de protection de l'environnement se sont également manifestées pour la circonstance. Elles ont, elles aussi, constaté que les objectifs fixés étaient loin d'être remplis et ont critiqué le manque d'engagement de la Confédération. Elles ont particulièrement fustigé l'attitude des cantons qui ont longuement tardé à élaborer leurs plans de mesures et ont demandé que la Confédération fasse pression sur eux pour qu'ils soient mis en oeuvre. Elles ont aussi exigé l'introduction de taxes incitatives sur le CO2 et sur l'énergie, un renforcement des normes sur les gaz d'échappement, l'introduction de catalyseurs pour les poids lourds avec moteur diesel ainsi qu'une réduction des émissions de composés organiques volatils
[28].
Le Conseil fédéral a pris position sur le troisième paquet de propositions formulées par les cantons dans le cadre de leurs
plans de mesures. Ayant pour but de remplir les objectifs de la politique de protection de l'air, celles-ci correspondent pour l'essentiel à des dispositions déjà prises ou prévues au niveau fédéral: taxe sur le CO2, taxe sur les composés organiques volatils, taxe sur les poids lourds en fonction des prestations, renforcement des prescriptions sur les gaz d'échappement des voitures de tourisme ou soutien aux transports publics
[29].
Le Conseil national a transmis une motion Bezzola (prd, GR) demandant que le Conseil fédéral propose une révision de la LPE comportant une définition de la
fonction des plans de mesure. Le motionnaire s'inquiète notamment du statut juridique flou de ces instruments dont la base légale n'est constituée que par une ordonnance et dont le degré de contrainte est mal défini et pourrait faire l'objet d'évolutions échappant à la volonté du législateur. Prenant le contre-pied de la grande chambre, le Conseil des Etats a pour sa part rejeté ce texte; il a considéré que cet instrument était un outil de coordination interne à l'administration qui répond aux objectifs de la loi sur la protection de l'environnement, et qu'il serait peu judicieux de modifier la base légale huit ans après sa mise en vigueur et après que 24 cantons ont déjà présenté leur plan de mesures
[30].
Par ailleurs, le Conseil national a transmis comme postulat une motion Gonseth (pe, BL) qui demande au gouvernement de réactualiser sa
stratégie de protection de l'air, en particulier en établissant des objectifs, des mesures et un calendrier concrets et en prenant en compte les sources d'émissions mobiles
[31].
Ayant à traiter de la révision de la loi sur la protection de l'environnement, la commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national a demandé à l'administration fédérale de faire des propositions pour introduire des
valeurs d'alarme en matière de protection de l'air, à l'instar de ce qui existe déjà dans le domaine du bruit
[32].
Le Conseil des Etats a transmis un postulat de sa commission invitant le gouvernement à examiner dans quelle mesure il serait possible d'introduire, en même temps qu'un assouplissement des valeurs-limites, un système de
bons d'émissions négociables en matière de polluants atmosphériques, à l'image de l'expérience tentée par les cantons de Bâle
[33].
[26]
FF, 1994, V, p. 816 ss.; presse du 28.5.94.26
[27] Presse du 22.2.94.27
[28] Presse du 19.2.94.28
[29] Presse du 27.10.94.29
[30]
BO CN, 1994, p. 53 ss.;
BO CE, 1994, p. 942 s.; presse du 2.3.94.30
[31]
BO CN, 1994, p. 582.31
[32]
NZZ, 30.6.94; presse du 13.10.94.32
[33]
BO CE, 1994, p. 489 s. Cf.
APS 1993, p. 181.33
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