Année politique Suisse 1995 : Infrastructure, aménagement, environnement / Energie / Politique énergétique
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Approvisionnement futur de la Suisse en électricité
A mi-chemin de l'échéance du moratoire nucléaire, le débat sur la politique énergétique suisse et plus spécifiquement sur l'approvisionnement futur du pays en électricité a été relancé après une période de relatif apaisement en raison de l'"armistice énergétique" issu des votations de 1990. Alors que les perspectives du DFTCE de 1994 faisaient déjà état d'un manque potentiel de courant électrique après 2010 ou 2020, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a confirmé cette éventualité dans une étude consacrée à la politique énergétique de la Suisse. C'est en effet durant cette période que les autorisations dont bénéficient les centrales nucléaires suisses ainsi que les contrats d'importation de courant électrique passés avec la France arriveront à échéance, ce qui soumet dès lors la moitié du bilan électrique helvétique à interrogation. Outre cette constatation lourde d'enjeux, il est à relever que si les experts de l'AIE ont jugé de façon positive plusieurs aspects de la politique énergétique fédérale (le programme Energie 2000 notamment), ils ont en revanche douté que l'objectif de stabiliser la consommation d'énergies fossiles et d'électricité puisse être atteint d'ici la fin du siècle. Par ailleurs, ils ont estimé que les marchés suisses de l'électricité et du gaz devraient être soumis à une plus forte concurrence [1].
Se faisant l'écho des prévisions du DFTCE et de l'AIE, les députés Spoerry (prd, ZH) et Cavadini (pl, NE) ont - dans une interpellation commune aux deux Chambres et cosignée par 92 parlementaires - questionné le Conseil fédéral de façon circonstanciée sur ses vues concernant l'avenir énergétique de la Suisse. Tant dans sa réponse écrite à la radicale zurichoise que lors de l'intervention d'Adolf Ogi devant le Conseil des Etats, le gouvernement a reconnu que, face à l'importance du problème, toutes les options devaient être envisagées: économies d'électricité accrues, utilisation renforcée des énergies renouvelables, construction de nouvelles centrales hydro-électriques, recours à l'énergie nucléaire, importations de courant, etc. Le Conseil fédéral a néanmoins reconnu que chacune de ces solutions comporte des inconvénients soit de nature juridique, écologique ou politique. Quoi qu'il en soit, la définition des objectifs de la politique énergétique suisse après l'an 2000 devrait avoir lieu durant les années 1996/97, comme a tenu à le déclarer à plusieurs reprises le chef du DFTCE.
A l'instar de la classe politique, les milieux énergétiques se sont penchés sur la question de l'approvisionnement du pays en électricité. L'Union des centrales suisses d'électricité (UCS) a mené, à cet égard, une étude prospective dont les résultats ont confirmé les risques d'une pénurie de courant à partir de 2010 environ. Pour combler ce déficit, l'UCS s'est dès lors prononcée en faveur d'une solution basée sur la combinaison de centrales nucléaires dans la proportion actuelle et de centrales thermiques conventionnelles alimentées au gaz. Au vu des problèmes d'acceptabilité populaire auxquels ne manquerait pas de se heurter une telle option, l'UCS a estimé qu'il convenait d'entamer sans plus attendre un dialogue entre tous les intéressés [3].
Parmi les différents facteurs pouvant contribuer à assurer l'approvisionnement de la Suisse en courant électrique, la libéralisation du marché intérieur de l'électricité a fait l'objet d'un rapport d'un groupe de travail mandaté par l'Office fédéral de l'énergie (OFEN). Celui-ci propose en effet d'abolir le monopole actuel des sociétés d'électricité et de permettre à des producteurs tiers d'accéder au réseau, ce qui devrait notamment amener une baisse des prix du courant. Cette éventuelle libéralisation soulève néanmoins de nombreux problèmes, puisque sa réalisation impliquerait une restructuration complète de la branche ainsi que la modification de plusieurs lois. Publié à l'heure où l'Union européenne discute également de l'ouverture de son marché de l'électricité à la concurrence, le rapport a été généralement bien accueilli par les organismes consultés, à l'exception de la Commission des cartels et des associations écologistes [4].
 
[1] Presse du 11.3.95 (rapport de l'AIE). Voir également APS 1994, p. 136 s. et lit. DFTCE (4e rapport annuel sur Energie 2000).1
[3] Presse du 7.9.95.3
[4] SHZ, 20.4.95; NZZ, 6.5.95; BZ, 18.5.95; presse du 8.6.95.4