Année politique Suisse 1996 : Chronique générale / Politique étrangère suisse / Politique économique extérieure
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Armes
Alors que les exportations suisses de matériel de guerre n'avaient cessé de décliner depuis 1987 pour atteindre l'année dernière leur plus bas niveau depuis 1973, celles-ci ont opéré une spectaculaire remontée durant l'année sous revue puisque leur valeur est passée de 141 millions à 232,94 millions de francs. Leur proportion face à l'ensemble des marchandises helvétiques livrées à l'étranger a ainsi cru de 0,15% à 0,23%. Les principaux acheteurs de ce type de matériel ont été Oman (65,5 millions), les Etats-Unis (27,7 millions), l'Autriche (11,2 millions) et la France (10 millions) [76].
En réponse au postulat Haering-Binder (ps, ZH) transmis par le Conseil national en 1993, le Conseil fédéral a publié un rapport sur la politique helvétique en matière de maîtrise des armements et de désarmement. Ce bref document dresse l'inventaire des différents objectifs et lignes directrices sur lesquels se fonde la politique suisse dans un domaine qui s'est sensiblement modifié depuis la fin de la guerre froide. Parmi ceux-ci figure au premier plan le démantèlement complet et universel de toutes les armes de destruction massive (armes ABC) sur la base de traités internationaux. Quant aux armes conventionnelles, la Confédération a déclaré soutenir les mesures qui contribuent à la transparence et à la prévisibilité des activités militaires et des arsenaux. Concrètement, ces divers principes se sont traduits à ce jour par la ratification par la Suisse de tous les accords internationaux concernant l'élimination globale des armes ABC, par l'adoption d'une réglementation nationale en matière de contrôles des exportations de matériel de guerre plus efficace ainsi que par la participation active des autorités fédérales aux négociations internationales visant à prévenir la prolifération d'armes et à établir des mesures de confiance, de sécurité et de coopération [77].
Jugé trop succinct par les députés de la gauche siégeant au sein de la Commission de politique extérieure du Conseil national, le rapport a été l'objet d'une proposition de renvoi enjoignant le gouvernement de présenter une version plus détaillée afin que ce thème puisse être véritablement débattu au sein du parlement. Cette proposition de renvoi a toutefois été rejetée par la majorité des députés qui a ainsi pris acte du rapport [78].
Trois hauts responsables de la Société Von Roll ainsi qu'un des directeurs de la firme vaudoise Uldry SA ont comparu dès la mi-janvier devant la Cour pénale fédérale afin de répondre de l'accusation d'infraction à la loi sur le matériel de guerre dans l'affaire du "supercanon irakien": c'est en effet grâce au rôle d'intermédiaire joué par la société romande que Von Roll avait pu livrer entre 1988 et 1990 des pièces détachées à l'Irak pour un montant de 10 millions de francs. A la une de tous les quotidiens suisses, le procès des quatre industriels donna lieu à de longues tergiversations des experts, témoins et avocats sur les différentes utilisations qui auraient pu être faites du tube de 157 mètres de long que Saddam Hussein projetait de construire (presse à forger, équipement pétrochimique, lance-satellites ou véritable canon). Au terme de trois semaines d'audiences, la Cour pénale fédérale a condamné les responsables de Von Roll à un mois de prison avec sursis et leur a infligé des amendes allant de 8000 à 25 000 francs. Quant au directeur d'Uldry SA, il a été acquitté. Le jugement de culpabilité rendu contre les trois dirigeants du groupe soleurois fut confirmé quelques mois plus tard par la Cour de cassation extraordinaire du Tribunal fédéral qui rejeta les recours en nullité déposés par les inculpés [79].
 
[76] Presse du 6.2.97. Voir également APS 1995, p. 88.76
[77] FF, 1996, III, p. 179 ss.7
[78] BO CN, 1996, p. 1020 ss.78
[79] Presse des 11-20.1, 24.1, 25.1, 2.2, 3.2, 18.4 et 7.9.96; JdG et NZZ, 23.1.96; NQ, 26.1.96. Voir aussi APS 1994, p. 77 et 1995, p. 88 s.79