Année politique Suisse 1996 : Chronique générale / Défense nationale / Défense nationale et société
Au début de l'été, le Conseil fédéral a déclaré, par la voix du chef du DMF, qu'il entendait répondre positivement, d'ici fin 1996, à l'offre de Partenariat pour la paix (PPP) proposée par l'OTAN en 1994. Cette déclaration d'intention a suscité de multiples discussions dans le monde politique. En effet, si les partis radical et démocrate-chrétien approuvaient le projet de l'exécutif, il n'en allait pas de même pour les deux autres partenaires gouvernementaux. L'UDC, de concert avec la droite nationaliste, fustigeait l'offre de l'OTAN comme portant gravement atteinte à la neutralité helvétique. Contestant l'utilité même du PPP, le parti socialiste - ou du moins une large partie de ses membres - estimait pour sa part que ce projet était particulièrement malvenu dans la mesure où il était nécessaire d'accorder la priorité à des questions autrement plus urgentes de la politique étrangère, notamment celles relatives à l'adhésion à l'ONU ainsi que celles concernant les négociations bilatérales avec l'UE. Le PS ajoutait que la participation au PPP risquait de raviver inutilement la polémique sur la neutralité et de créer ainsi une crispation peu propice à une intégration plus poussée de la Suisse au sein de la communauté internationale.
Au Conseil national, deux motions exprimant des réserves à l'égard du projet du gouvernement furent déposées. La première, celle du socialiste Gysin (BS), demandait que la question de l'adhésion au PPP soit tranchée par le parlement. La seconde, déposée par le démocrate suisse Keller (BL), exigeait en outre que le sujet soit soumis au référendum facultatif. Estimant que la participation au programme de l'OTAN avait une importance beaucoup plus grande que ne le prétendait le gouvernement, les deux motionnaires souhaitaient que des instances représentatives, voire même le peuple, puissent s'exprimer. Devant le plénum, le chef du DFAE a relevé qu'il était légitime que cette question relève de la compétence de l'exécutif dans la mesure où le PPP n'était pas un traité international. Il a également ajouté que ce dernier n'avait aucune force contraignante, le gouvernement pouvant à tout moment décider de dénoncer ses engagements. Enfin, F. Cotti a souligné que les actions non militaires auxquelles la Suisse participerait ne sauraient violer le principe de neutralité armée de la Confédération. Devant les arguments du ministre des affaires étrangères, la motion du député socialiste fut retirée. La proposition Keller fut pour sa part largement rejetée, seuls les députés des partis des démocrates suisse et de la liberté ainsi que la majorité de l'UDC lui apportant leur soutien.
En automne, suite à ce vote ainsi que face au soutien exprimé par les milieux militaires, le gouvernement - conforté par l'idée que le PPP bénéficiait d'un large soutien politique - a décidé que la Suisse participerait au programme de l'OTAN. Le Conseil fédéral a tenu à préciser que la Confédération resterait fidèle à sa neutralité permanente et armée et qu'elle excluait toute adhésion ultérieure à l'Alliance atlantique. Il a également ajouté que la participation de la Suisse se limiterait à des activités où elle dispose de connaissances particulières: à savoir, essentiellement, le contrôle démocratique des forces armées, le respect des minorités, la formation dans le droit international humanitaire et celle d'observateurs militaires, l'appui logistique aux mesures de maintien de la paix, ou encore le développement de collaborations dans le domaine sanitaire et du sauvetage (aide en cas de catastrophe). Le gouvernement a par ailleurs souligné que la participation au PPP permettrait à la Suisse d'avoir un accès privilégié à de multiples informations militaires, la Confédération pouvant notamment disposer d'un attaché militaire auprès de l'OTAN.
Au mois de décembre,
F. Cotti a signé, au nom de l'exécutif,
le document-cadre du PPP au siège de l'OTAN à Bruxelles. J. Solana, secrétaire général de l'OTAN, a déclaré à cette occasion que tant la Suisse que l'Alliance atlantique avaient beaucoup à gagner de cette collaboration naissante. Selon l'ancien ministre espagnol des affaires étrangères, la neutralité helvétique ne saurait constituer un obstacle à une coopération fructueuse, les cas de la Finlande, de l'Autriche et de la Suède l'ayant amplement démontré lors des opérations de maintien de la paix en Bosnie
[7].
[7] Presse des 10.12 et 12.12.96.7
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