Année politique Suisse 1996 : Economie / Agriculture / Politique agricole
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Nouvelle politique agricole
Suite à la procédure de consultation au cours de laquelle le Conseil fédéral a pu constater un large soutien à ses propositions, le gouvernement a présenté son message concernant la deuxième étape de la réforme de l'agriculture helvétique (Politique agricole 2002). Le projet gouvernemental - qui regroupe dans une loi sur l'agriculture totalement révisée des dispositions jusqu'alors éparpillées dans différents textes - propose le passage définitif d'une agriculture visant à garantir l'autarcie du pays en cas de guerre à une agriculture poursuivant principalement deux objectifs: d'une part, promouvoir la conversion de l'agriculture helvétique à l'économie de marché, d'autre part, assurer sa durabilité.
Au sujet du premier objectif, c'est principalement le secteur de la production laitière qui sera affecté. En effet, les prix et la prise en charge du lait et du fromage ne seront à l'avenir plus garantis par l'Etat, ce dernier limitant son soutien aux seuls paiements directs. Les paysans devront eux-mêmes s'occuper de la commercialisation et de l'écoulement de leur production à l'aide d'organisations privées qui remplaceront l'Union suisse du fromage (USF) et la Butyra. Seuls le lait servant à la production fromagère et le fromage destiné à l'exportation dans des pays extérieurs à l'Union européenne bénéficieront encore d'une aide. Le contingentement de la production laitière ainsi qu'une certaine protection douanière seront par ailleurs également maintenus afin d'éviter tout effondrement trop massif des prix. Outre le secteur laitier, la production de blé panifiable sera aussi largement libéralisée après une période transitoire de cinq ans, l'obligation de prise en charge par la Confédération n'étant plus nécessaire pour garantir l'approvisionnement du pays. Enfin, dans les domaines des oléagineux, des betteraves sucrières, des pommes de terre et des fruits, les réglementations seront davantage axées sur la concurrence et plus transparentes.
En ce qui concerne l'écologisation de la production agricole, le projet du Conseil fédéral prévoit que les paiements directs ne seront à l'avenir versés que si certaines prestations écologiques (assolement régulier, bilan de fumure équilibré, surface de compensations écologiques) auront été fournies. Le message du gouvernement précise cependant que ces conditions n'entreront en vigueur qu'après un délai de cinq ans, soit autour de 2003.
Le texte proposé par le Conseil fédéral comprend également un ensemble de mesures destinées à garantir la survie du monde agricole helvétique. Ainsi, pour compenser la baisse des prix résultant de la libéralisation du secteur primaire, le montant des paiements directs sera augmenté de 170 millions de francs par an jusqu'en 2002 (soit une augmentation totale de 1,2 milliard de francs). Les pertes engendrées par la baisse des prix s'élevant à 1,9 milliard de francs, les paysans devront cependant baisser de quelque 700 millions leurs coûts d'ici 2002 pour rentrer dans leurs frais. Dès l'an 2000, les crédits relatifs à ces paiements directs seront votés pour des périodes de quatre ans afin de garantir au monde agricole un maximum de sécurité financière. Enfin, dans le but de favoriser un regroupement des exploitations seul à même de permettre aux paysans de dépasser des seuils critiques de rentabilité, le projet de l'exécutif comprend des modifications de la loi sur le droit foncier rural ainsi que de celle sur le bail à ferme agricole [8].
Réagissant de manière globalement positive au message du gouvernement, l'USP a cependant demandé que des mesures sociales supplémentaires soient prévues. L'organisation paysanne a notamment exigé que soit réintroduit un instrument permettant de comparer le revenu agricole avec ceux en vigueur dans les autres secteurs de l'économie, ce afin d'éviter que la situation économique des paysans ne soit découplée de l'évolution de la prospérité de la société en général. Au sujet de la libéralisation de l'économie laitière, les leaders paysans ont demandé qu'un prix minimal soit garanti pour le lait. Enfin, l'USP a souligné que si la libéralisation du secteur primaire ne devait pas profiter aux seuls distributeurs, mais également au monde paysan, celui-ci devait bénéficier d'une marge de manoeuvre entrepreneuriale plus importante ainsi que d'une baisse des coûts de production, ce dernier point ne pouvant être réalisé que si les secteurs économiques en amont de la production agricole étaient à leur tour libéralisés.
 
[8] FF, 1996, IV, p. 1 ss.; Bund, 17.2.96 (procédure de consultation); presse du 29.6.96. Voir aussi APS 1995, p. 125 s. Il est à relever en outre que la libéralisation de la production de blé panifiable prévue par le projet du gouvernement devra être soumise à l'approbation du souverain, cette mesure impliquant une modification constitutionnelle. Enfin, au sujet des conséquences financières de la réforme, il faut souligner que l'abandon de la garantie de la prise en charge de la production agricole permettra une économie de 500 millions de francs de sorte que, compte tenu de l'augmentation des paiements directs, la facture nette sera de quelque 700 millions de francs en 2002 pour les finances fédérales. Les consommateurs devraient pour leur part économiser quelque 1,4 milliard de francs d'ici 2002.8