Année politique Suisse 1997 : Chronique générale / Défense nationale / Défense nationale et société
Lors de la session de printemps,
les chambres ont pris acte du rapport portant sur l'affaire dite des CD-Rom que lui avait remis l'année précédente la délégation des commissions de gestion (CdG) du parlement. Devant des rangs quelque peu clairsemés, il fut relevé à plusieurs reprises que les dégâts causés par cette affaire étaient non seulement d'ordre strictement militaire, mais également, voire surtout, d'ordre psychologique et politique: les différentes défaillances en matière de sécurité d'informations top secrètes révélées par le rapport portaient en effet un coup important avant tout à la crédibilité de l'armée, certains orateurs ne manquant pas d'ajouter que plusieurs années seraient nécessaires pour rétablir la confiance dans l'institution militaire. Cette perte de crédibilité était par ailleurs d'autant plus importante que les fautes incriminées avaient été commises à un haut, voire au plus haut niveau hiérarchique. Malgré ce jugement dans l'ensemble négatif, les parlementaires ont cependant également tenu à saluer les mesures entre-temps prises par le DMF en matière de protection des données et d'organisation du département. Nombreux furent en outre les intervenants, plus particulièrement au sein du Conseil des Etats, à rendre hommage au chef de l'état-major A. Liener, qui, en démissionnant, avait contribué selon eux à désamorcer une crise dont il n'était de loin pas l'unique responsable. A ce sujet, les rapporteurs de la délégation des deux CdG ont également tenu à préciser que, contrairement à ce que d'aucuns avaient laissé entendre, jamais la démission du plus haut gradé de l'armée suisse n'avait été exigée par la délégation. A. Ogi a pour sa part également souligné que la démission d'A. Liener avait été prise librement par l'intéressé
[9].
Outre le rapport sur l'affaire de l'aide-mémoire électronique, le Conseil des Etats a également pris acte du
rapport publié par sa propre commission de gestion
concernant les deux autres affaires (Diamant et Didacta). Exprimant largement les mêmes critiques que celles faites au sujet de l'affaire des CD-Rom, les sénateurs ont plus particulièrement dénoncé la totale liberté dont avait bénéficié le colonel Nyffenegger. Cette absence de surveillance de la part des plus hauts échelons de la hiérarchie - Conseil fédéral inclus - était, aux yeux des conseillers aux Etats, à l'origine du faramineux dépassement de budget relatif à la commémoration de la mobilisation de 1939. Rapporteur de la commission, le socialiste Aeby (FR) a souligné que le "chèque en blanc" donné au colonel Nyffenegger s'expliquait sans doute par le fait que les autorités, soucieuses avant tout de donner une image positive de l'armée à quelques mois de la votation sur sa suppression, avaient été peu regardantes sur les moyens. Relevant également l'opacité totale de la comptabilité du DMF en la matière, le sénateur socialiste a dénoncé une volonté de dissimuler au parlement l'importance des ressources financières engagées pour ces opérations de relations publiques
[10].
S'étant saisi des aspects pénaux des trois affaires,
le juge d'instruction militaire
a pour sa part
clos son enquête et transmis le dossier à l'auditeur en chef de l'armée. Au sujet des deux principaux protagonistes de l'affaire des CD-Rom - à savoir F. Nyffenegger et G. Furrer (mandataire du projet) - l'instruction a pu confirmer le soupçon de
violations du secret militaire, l'enquête ayant révélé que des prescriptions élémentaires de sécurité n'avaient pas été respectées. La peine théorique maximale encourue par les deux hommes est de sept ans et demi de réclusion. En ce qui concerne les neuf autres personnes inculpées, le juge d'instruction a recommandé au procureur de dresser un acte d'accusation contre trois d'entre eux. Parmi les six autres, deux devraient pouvoir bénéficier d'un non-lieu, alors que pour les quatre derniers une ordonnance de condamnation (maximum 30 jours d'emprisonnement ou amende) devrait suffire. L'enquête civile n'est de son côté pas encore terminée. Portant également sur les affaires dites "Diamant" et "Didacta" et impliquant principalement, outre F. Nyffenegger et G. Furrer, l'entrepreneur H. Kronenberg, l'instruction civile confirmera ou non les soupçons de corruption et de faux dans les titres pesant sur les trois hommes. Le juge civil devrait rendre ses conclusions l'année prochaine
[11].
[9]
FF, 1997, III, p. 750 ss.;
BO CN, 1997, p. 118 ss.;
BO CE, 1997, p. 236 ss. Voir également
APS 1996, p. 95 s.9
[10]
FF, 1997, III, p. 786 ss.;
BO CE, 1997, p. 242. Voir également supra, part. I, 1c (Regierung).10
[11] Presse du 19.9.97.11
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