Année politique Suisse 1997 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Politique des transports
Au mois d'avril,
le Conseil fédéral a mis en consultation le projet de mise en oeuvre de l'initiative des Alpes. Conformément à ce qui avait été annoncé précédemment, le transfert de la route au rail des poids lourds exigé par l'initiative ne concernera pas uniquement le trafic de transit, mais s'appliquera également au trafic intérieur et bilatéral, ce afin d'éviter toute discrimination des transporteurs européens. Pour inciter les transporteurs à se transférer sur le rail, le projet prévoit, outre la taxe poids lourd kilométrique (voir infra), l'introduction d'une
taxe sur le transit alpin. Celle-ci sera perçue - par le biais d'un système électronique évitant l'installation de péages - lors de chaque passage sur les principaux axes alpins. Si l'introduction de la redevance est prévue pour 2001, son montant n'a en revanche pas encore été arrêté, ce point devant être éclairci dans le cadre des négociations bilatérales (cf infra). Officieusement, il devrait être cependant compris entre
40 et 200 francs et différencié selon l'axe emprunté, ce afin de frapper plus lourdement les passages les plus fréquentés. C'est ainsi que le franchissement du Gothard (UR/TI) et du San Bernardino (GR/TI) pourrait coûter 150 francs, celui du Simplon (VS/I) 75 francs et celui du Grand St Bernard (VS/I) 45 francs. Le gouvernement entend grâce aux deux taxes limiter à 650 000 le nombre de poids lourds traversant les Alpes en 2005 (400 000 de moins qu'aujourd'hui)
[1]. En attendant que la première NLFA soit opérationnelle, la "chaussée roulante" sur le Lötschberg (en voie d'entrer en fonction) devrait être à même d'absorber le surplus de camions dès l'introduction de la taxe. Afin de prendre en compte les intérêts des régions qui seront le plus frappées par la redevance alpine, il est par ailleurs prévu de restituer aux cantons du Tessin, d'Uri et des Grisons une large partie du produit de la taxe (respectivement 60, 20 et 10%). Le solde devrait aller au subventionnement du trafic combiné. Le parlement sera cependant seul compétent pour décider, tous les quatre ans, de la part revenant aux régions concernées
[2].
Les
réactions au projet gouvernemental furent multiples et contrastées. Si les milieux de défense de l'environnement et le comité de l'initiative des Alpes approuvèrent dans l'ensemble le projet, ils soulignèrent cependant que le montant de la taxe ne devait pas descendre en dessous de 200 francs et devait être modulé en fonction du poids et des kilomètres parcourus. A l'opposé, les associations de défense des usagers de la route - l'Astag et le TCS notamment - critiquèrent assez vivement le projet, estimant notamment que l'objectif chiffré visé par le Conseil fédéral était totalement irréaliste. Les avis des partis gouvernementaux furent eux aussi divisés. Jugeant globalement satisfaisant le projet présenté, le PS et le PDC demandèrent à leur tour que la taxe soit non pas forfaitaire, mais conçue à l'image de la taxe poids lourd kilométrique. L'accueil des deux autres partis gouvernementaux fut lui beaucoup plus froid, ces derniers relevant qu'il était désormais clairement apparu que l'application de l'article constitutionnel sur la protection des Alpes posait d'énormes problèmes tant sur un plan interne - discrimination des cantons alpins - que sur celui des négociations bilatérales avec l'UE. Afin de s'extriquer de cette situation à leurs yeux devenue intenable, le PRD et l'UDC ont d'ailleurs chacun proposé de soumettre au souverain un nouvel article constitutionnel moins contraignant. Seul point du projet à faire l'objet d'avis convergents, le développement de la "chaussée roulante" fut vivement critiqué, les différents milieux consultés soulignant que cette solution coûteuse et peu écologique ne permettrait pas au rail d'être plus compétitif et devait être abandonnée en faveur du trafic combiné
[3].
Le Conseil national a transmis comme postulat une motion Küchler (pdc, OW) - adoptée précédemment par la petite chambre - qui demande au gouvernement de
promouvoir le transport ferroviaire de marchandises afin de favoriser le transfert de la route au rail. Relevant que le texte de la motion obligerait à prendre des mesures également en ce qui concerne le trafic intérieur - pour lequel la solution du rail est moins avantageuse - la grande chambre a préféré s'en tenir à la version moins contraignante du postulat
[4].
[1] Au total, si l'on prend en compte l'augmentation du trafic due à la levée de la limite des 28 tonnes, quelque 1,25 million de camions devront être transférés sur le rail en 2005.1
[2] Presse du 24.4.97. Voir également
APS 1996, p. 176.2
[3]
CdT, 21.6.97;
TA, 28.8.97; presse du 4.9.97;
SZ, 13.9.97. L'article proposé par l'UDC ferait du transfert de la route au rail un objectif souhaitable et non plus une obligation, qui ne concernerait, de plus, que les transports de longue distance. Il ne serait en outre soumis à aucun délai impératif. Le projet du PRD prévoit quant à lui principalement de prolonger de 6 ans le délai fixé pour la réalisation du transfert du trafic et de ne pas soumettre les camions de moins de 12 tonnes à cette obligation, ce afin d'exonérer les nombreux petits véhicules qui approvisionnent le Tessin (
Délib. Ass. féd., 1997, IV, part. I, p. 30;
JdG, 26.2 et 3.9.97).3
[4]
BO CN, 1997, p. 1383 s.4
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