Année politique Suisse 2002 : Chronique générale / Défense nationale
 
Service civil et objection de conscience
Le débat sur la révision de la loi sur le service civil (LSC) s’est également inscrit dans le projet de la réforme de l’armée, les modifications de la loi sur l’armée et l’administration militaire (LAAM) ayant, par exemple, des répercussions sur la LSC. L’entrée en matière a été acceptée lors de la session de printemps, par 132 voix contre 27, malgré la proposition du zurichois Ulrich Schlüer (udc) de ne pas ouvrir la discussion. Le débat n’a finalement pas eu lieu au national car une coalition hétérogène a soutenu la demande de Roland Wiederkehr (adi, ZH), allant dans le sens des arguments développés par la gauche, de renvoi en commission (98 voix contre 63). Tous les socialistes (45) et verts (10) présents, une grande partie du groupes UDC (27), les évangéliques et indépendants (5), sept démocrates-chrétiens et un radical ont soutenu ce renvoi. La nature du soutien n’était toutefois pas la même. Si l’opposition de l’UDC en était une de principe, les émules d’Ulrich Schlüer estimant que la loi en vigueur était suffisante, la gauche demandait une remise en question fondamentale du système d’admission. La proposition de renvoi donnait en effet mandat à la commission compétente de revoir le projet et d’accorder la priorité à la « preuve par l’acte » dans la procédure d’admission. Ce changement de système se rapprocherait du libre choix dans la mesure où l’audition personnelle, qui doit permettre de déterminer si l’individu est objecteur de conscience au sens de la loi, serait remise en question. Le projet du Conseil fédéral ne prévoyait ni la « preuve par l’acte », ni le libre choix [27].
La Commission de la politique de sécurité du national s’est ensuite exprimée pour une durée du service civil 1,5 fois supérieure à celle du service militaire. Une minorité de gauche et le Conseil fédéral ont défendu un coefficient moindre de 1,3. La CPS a également refusé de supprimer l’examen de conscience. Pour la majorité, l’accomplissement du service civil ne pouvait pas découler d’une simple décision administrative et une évaluation des motivations s’imposait. Pour une minorité, la preuve par l’acte permettrait un traitement plus rapide et moins coûteux des cas. Plus généralement, une majorité de la commission a estimé qu’il était inutile d’alourdir la réforme de l’armée, déjà attaquée par un référendum, avec un changement de système au niveau du service civil. Le Conseil national a suivi sa commission sur le coefficient de rallongement, par 88 voix (dont 40 udc, 28 radicaux, 13 pdc, 5 pl) contre 82 (dont dont 51 ps, 14 pdc, 2 prd, 8 pe) et le maintien de l’examen de conscience par 86 voix (dont 37 udc, 32 prd, 12 pdc, 5 pl) contre 82 (dont 49 ps, 16 pdc, 10 pe). Au vote sur l’ensemble, 92 voix favorables contre 56, une nette différence gauche droite s’est dessinée, les démocrates du centre accompagnés des radicaux et des démocrates chrétiens ont fait face aux socialistes accompagnés des verts [28].
Une pétition, munie de 18 000 signatures, a été déposée à la Chancellerie fédérale par le Comité suisse pour le service civil et le Centre Martin Luther King. En lien avec la peine d’emprisonnement infligée par un tribunal militaire d’appel à un citoyen ayant refusé d’accomplir son service militaire, une suppression de l’audition personnelle était demandée, la preuve par l’acte étant jugé suffisante [29].
Le Département fédéral de l’économie a publiée en mars les chiffres 2001 des admissions au service civil. Les candidatures ont progressé de 16% et 7300 civilistes ont accompli 220 000 jours de service. Sur les 1870 demandes, 1291 l’ont été par des germanophones, 518 par des francophones et 61 par des italophones. Le taux de refus s’est élevé à 20%. Les jours de service ont été accomplis dans les secteurs suivants : 59% dans le domaine social, 14% dans des activités de protection de l’environnement, 10% dans la conservation des biens culturels et la recherche, 9% dans la santé, 5% dans la coopération au développement et 3% dans l’agriculture [30].
Dans le cadre d’EXPO.02, outre des soldats, des civilistes ont été engagés. Ce sont 460 personnes pour un total de 35 000 jours de service qui ont participé à 5 projets fédéraux et 4 projets privés. Ils ont notamment orienté les visiteurs sur les différents Arteplages, apporté une aide technique dans les coulisses ou encore veillé au maintien de la propreté des sites naturels. Habituellement engagés individuellement ou en petits groupes, cette participation en plus grandes unités a été jugée positive par les responsables du service civil. A leur grand regret, il a été difficile de se faire connaître en tant qu’institution à part entière. Ils ont estimé qu’il aurait été souhaitable de développer un concept de communication propre permettant de diffuser des informations sur le service civil et ses activités. Ils ont également déploré le peu de considération que le DDPS avait pour ce qui devrait être, à leur yeux, considéré comme une des composantes de la politique de sécurité [31].
 
[27] BO CN, 2002, p. 204; Voir également APS 2001, p. 75.
[28] BO CN, 2002, p. 1950 ss. et 1993 ss.
[29] Presse du 24.4.01.
[30] Communiqué de presse du DFE du 7.3.02; presse du 8.3.02.
[31] NZZ, 19.10.02.