Année politique Suisse 2002 : Economie / Agriculture / Politique agricole
Le Département fédéral de l’économie a publié le
rapport sur les résultats de la consultation relative à l’évolution future de la politique agricole (PA 2007) à la fin du mois de mars. Les milieux agricoles, presque unanimement sceptiques, ont estimé que le rythme des réformes était trop élevé et que les mesures découlant de la politique agricole 2002 (PA 2002) étaient suffisantes. Ils ont rappelé que malgré le travail fourni, les revenus restaient bas en comparaison avec d’autres secteurs. Cet état de fait n’était, à leurs yeux, pas assez présent dans le document soumis à consultation. Le monde agricole s’est déclaré opposé à la suppression du contingentement laitier, tout en demandant son assouplissement, et à l’augmentation de la taille minimale des exploitations. La nouvelle réglementation des importations de viande a reçu un accueil réservé. L’introduction de mesures sociales dans la loi a, par contre, été soutenue. Le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB) ainsi que la Société suisse d’économie alpestre (SSEA) ont souligné les difficultés des régions de montagne. Une majorité des organisations paysannes, de consommateurs et de protection de l’environnement a estimé qu’il était nécessaire de répondre aux attentes des consommateurs en matière de sécurité alimentaire et que l’objectif de la politique agricole ne saurait dès lors être la compétitivité à tout prix. Les associations économiques (economiesuisse, Union patronale suisse, USAM), l’industrie alimentaire (Fédération des industries alimentaires suisses, et Nestlé notamment) et les grands distributeurs (entres autres Coop, Migros) ont eu une appréciation diamétralement opposée de la réforme en cours. Ils ont demandé que le rythme des changements soit plus soutenu et qu’une déréglementation plus décidée des marchés agricoles soit entreprise, cela dans l’intérêt de l’agriculture elle-même. La majorité des cantons, les partis bourgeois ainsi que les organisations paysannes n’ont pas voulu d’une trop forte focalisation sur l’amélioration de la compétitivité de l’agriculture. Les partis de gauche, socialistes et verts, ne se sont pas opposés par principe à une dérégulation. Ils l’ont toutefois liée à des mesures écologiques restrictives et à une sécurité alimentaire maximale
[1].
Le projet PA 2007 implique la modification de six lois fédérales : la loi sur l’agriculture, la loi sur les épizooties, la loi sur la protection des animaux, le droit foncier rural, le droit sur le bail à ferme agricole et les droits réels immobiliers dans le code civil. Un arrêté fédéral sur les moyens financiers destinés à l’agriculture pour les années 2004 à 2007 a également été soumis aux Chambres. Chacun des trois premiers textes a fait l’objet d’un message séparé, de même que pour l’arrêté fédéral sur les moyens financiers. Les trois autres modifications ont été présentées dans un document commun. La politique agricole 2007 définit un cadre financier (14 milliards de francs pour la période 2004-2007) et une quarantaine d’ajustements de la politique agricole
[2].
Le
Conseil des Etats, en tant que premier conseil, s’est saisi du dossier lors de la session d’hiver. L’entrée en matière sur les sept projets a été décidée, malgré une proposition Maissen (pdc, GR) de renvoi de la loi sur l’agriculture au Conseil fédéral. Pour cette minorité, la PA 2007 constituait un encouragement à l’importation de produits bon marché, elle menaçait l’occupation décentralisée du territoire et allait encourager une exploitation plus intensive dans les vallées. Les principales critiques émanaient des rangs UDC et PDC des régions périphériques qui craignaient une libéralisation trop poussée et la mort de la paysannerie. Le porte-parole de la commission, le radical Fritz Schiesser (GL), a rappelé aux élus que l’agriculture suisse restait la plus soutenue au monde et que sur chaque franc encaissé par un paysan 70 centimes provenaient de l’Etat, contre 35 centimes dans l’Union européenne (UE). Le conseiller fédéral Couchepin a qualifié les partisans d’une non entrée en matière de nostalgiques qui ne voulaient tout simplement pas voir les changements intervenus au cours des dernières années, notamment en matière d’ouverture des marchés et d’habitudes de consommation. C’est par 25 voix contre 13 que la proposition de renvoi Maissen a été rejetée. Les deux thèmes les plus controversés de la réforme étaient la fin du contingentement laitier et l’introduction d’un système de mise aux enchères des contingents de viande importée. La Chambre haute a suivi sa commission, et partiellement le gouvernement, sur le premier dossier en acceptant l’abandon du contingentement laitier. Le rythme retenu était toutefois moins élevé que celui du gouvernement et prévoyait un abandon échelonné à partir de 2006. Une minorité emmenée par Theo Maissen (pdc, GR) s’est opposée à la fin du contingentement. Sur la libéralisation du marché de la viande, le système des enchères a été refusé. L’enveloppe budgétaire de 14,09 milliards a été acceptée. La limite de revenu pour les paiements directs a également été supprimée, malgré la mise en garde du socialiste soleurois Leuenberger pour qui la population aurait de la peine à accepter le versement de subventions à des paysans aisés. Au vote sur l’ensemble, le projet a été accepté par 27 voix, sans opposition
[3].
[1]
FF, 2002, p. 4657 ss.; Voir également
APS 2001, p. 87.
[2]
FF, 2002, p. 4395 ss. (message), 4401 ss. (loi sur l’agriculture), 4638 ss. (loi sur les épizooties), 4651 ss. (loi sur la protection des animaux), 4556 ss. (Arrêté fédéral sur les moyens financiers) et 4611 ss. (document commun).
[3]
BO CE, 2002, p. 1188 ss., 1220 ss., 1250 ss. et 1271 ss.
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