Année politique Suisse 2003 : Economie / Agriculture / Politique agricole
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Organisation mondiale du commerce (OMC)
Avant la Conférence ministérielle de l’OMC prévue à Cancún (Mexique), s’inscrivant dans le cycle de Doha initié en 2001, l’Union suisse des paysans (USP) a réaffirmé ses exigences dès le début de l’année. Elle a jugé inacceptable le premier projet de l’OMC concernant les négociations agricoles. Cette libéralisation à sens unique ne réserverait la production agricole qu’aux seuls sites favorisés et la multifonctionnalité ne serait plus reconnue. C’est lors d’une séance au mois d’avril que le Conseil fédéral a défini, entre autres, le mandat agricole pour les négociations de l’automne. Il y mentionnait, d’une part, son engagement pour l’adoption de règles favorisant la multifonctionnalité, d’autre part, la nécessité d’adopter des chiffres réalistes de réduction des droits de douane et des subventions. Une libéralisation par étape lui semblait plus souhaitable que des changements en bloc. Il a également estimé que les projets présentés par l’OMC ne remplissaient, en l’état, pas les exigences de la délégation suisse et ne pouvaient pas servir de base de négociation. Une proposition concrète de la Suisse à l’OMC a été présentée à la presse durant la troisième semaine d’août. L’ambassadeur Luzius Wasescha, responsable du dossier au Secrétariat d’Etat à l’économie, a annoncé que la Suisse s’était alliée à un certain nombre de pays (Bulgarie, Taiwan, Islande, Corée du Sud, Liechtenstein) pour que la vulnérabilité et la petite taille de leurs secteurs agricoles soient prises en compte avec le maintien d’un niveau d’aide étatique suffisant. Il a également rappelé que la Suisse s’engageait pour les aspects non commerciaux de l’agriculture comme l’information du consommateur, la protection de l’environnement ou la défense des appellations d’origine.
A quelques semaines du début des négociations, un mouvement regroupant une quarantaine d’organisations (syndicales, paysannes, humanitaires, écologistes) a menacé de lancer un référendum contre tout accord qui déboucherait sur la mort de l’agriculture suisse. Baptisé « Coordination Suisse-OMC », il comprenait notamment l’USP et Uniterre. C’est un jour après la formulation de cette menace que le gouvernement a présenté le mandat de négociation définitif pour la Conférence ministérielle de l’OMC. Il comprenait également des dossiers comme les investissements, la concurrence, les marchés publics ou encore l’accès aux médicaments. Le conseiller fédéral Joseph Deiss, en charge du dossier, a formulé une mise en garde à l’égard de ceux qui menaçaient les éventuels accords de référendum. Il a notamment évoqué la nécessité d’avoir une économie globalement performante pour financer l’agriculture. Ce dernier secteur se devait donc d’accepter un certain nombre de sacrifices, afin de permettre l’élaboration d’un système multilatéral performant, meilleur garant de la défense des intérêts d’un petit pays comme la Suisse. Ces concessions s’avéreraient nécessaires pour en obtenir dans les autres secteurs de l’économie comme les biens industriels et les services. De nombreuses personnalités du monde économique ont également exprimé leur mécontentement face à ces menaces [10].
La Conférence de Cancún a finalement échoué et les négociations dans le cadre du cycle de Doha ont subi un sérieux coup d’arrêt. Les points de blocages ne concernaient cependant pas uniquement le volet agricole. L’objectif de conclusion d’un accord pour la fin de l’année semblait ainsi sérieusement compromis. L’OFAG a estimé que la période 2004-2007, couverte par la PA 2007, ne subirait pas de mesures découlant de nouveaux engagements dans le cadre de l’OMC. Il a toutefois mis en garde contre les risques inhérents à un retour au bilatéralisme, un petit importateur net comme la Suisse ayant relativement peu de poids dans une telle démarche. Le Conseil fédéral a confirmé la nécessité de poursuivre les efforts pour améliorer la compétitivité de l’agriculture. L’USP a reconnu à ce sommet le mérite d’avoir clarifié les fronts sur le dossier agricole. De plus, elle s’est montrée très satisfaite des positions défendues par la délégation suisse [11].
 
[10] Communiqués de presse de l’USP des 17.2 et 24.3.03 (prises de position concernant le premier projet de l’OMC); communiqué de presse du DFE du 9.4.03 et presse du 10.4.03; presse du 22.8.03 (présentation de la proposition suisse); communiqué de presse de l’USP du 26.8.03 et presse du 27.8.03 (mobilisation de la « Coordination OMC »); presse du 28.8.03 (présentation du mandat définitif); LT, 6.9.03 (réactions du monde économique aux menaces de référendum). Voir également supra, part. I, 2 (Organisations internationales).
[11] Presse du 16.9.03 et document de l’OFAG « OMC : L’échec de Cancún » consulté sur le site de l’office; communiqué de presse du DFE du 18.9.03; communiqué de presse de l’USP du 15.9.03.