Année politique Suisse 2003 : Infrastructure, aménagement, environnement / Energie / Energie nucléaire
Face à l'inflexibilité du Conseil des Etats, le
Conseil national a abandonné par 108 voix contre 68
le droit de veto aux cantons-sites de dépôts de déchets nucléaires. Il a toutefois rendu obligatoire la consultation de toutes les collectivités des régions concernées, ainsi que des Etats voisins. La nouvelle loi sur l'énergie nucléaire (LENu) prévoit un référendum facultatif national sur les nouvelles constructions nucléaires, y compris sur les dépôts souterrains. Le Conseil national s'est également
rallié par 93 voix contre 88 au compromis proposé par le Conseil des Etats
sur le moratoire de dix ans frappant les exportations de combustibles usés en vue de leur retraitement. Les contrats en cours avec La Hague (F) et Sellafield (GB) seront néanmoins honorés. Le moratoire de 10 ans devrait durer de 2006 à 2016. Avec la voix décisive du président du Conseil, Yves Christen (prd, VD), le National a écarté la condition spéciale à laquelle aurait été soumise toute autorisation générale pour une installation nucléaire. Il aurait fallu prouver que la production de courant n'aurait pas pu être fournie en Suisse par des énergies renouvelables à des coûts égaux ou inférieurs. La proposition de Sommaruga (ps, BE) de rétablir un marquage de l'électricité selon sa provenance (énergie renouvelable ou non) a été écartée par 93 voix contre 84. Contre l'avis des Etats, le National a maintenu par 101 voix contre 81 la taxe d'incitation sur l'électricité d'origine nucléaire (0,3 ct par kWh)
[16].
Pour compenser la suppression du droit de veto en matière de
dépôt de déchets radioactifs, le Conseil des Etats s'est rallié par 40 voix contre 1 à la proposition Pfisterer (prd, AG) de faire
participer le canton d'accueil à la préparation du projet. Le National ne prévoyait qu'un droit de consultation. Ce compromis était également valable pour les cantons et Etats voisins de l'emplacement prévu. La chambre des cantons a maintenu par 22 voix contre 19 son refus de taxe d'incitation sur l'énergie d'origine nucléaire. Le Conseil d’Etat a par ailleurs décidé d'attribuer au Conseil fédéral la compétence d'édicter les dispositions nécessaires pour que les consommateurs puissent connaître la provenance du courant et son type de production
[17].
Devant les divergences récurrentes, une conférence de conciliation a été organisée. Le
Conseil national a finalement
renoncé à introduire une taxe d'incitation sur le courant produit par les centrales nucléaires. La deuxième divergence était liée à
l'indication de la provenance du courant et de son type de production. Le parlement a accepté de la rendre publique et que les contrevenants soient punis: ils seront passibles de l'emprisonnement ou d'une amende allant jusqu'à 40 000 francs
[18]. Deux ans de débats ont été nécessaires pour mettre la loi sur l'énergie nucléaire sous toit. Elle a néanmoins été combattue au Conseil national jusqu'au bout par le camp rose-vert et des évangéliques. Ses détracteurs ont en particulier dénoncé la suppression du droit de veto pour les cantons susceptibles d'accueillir un dépôt de déchets radioactifs, ainsi que l'absence d'une taxe d'incitation sur le courant produit par les centrales atomiques destinée à promouvoir les énergies renouvelables. Les conseillers nationaux ont approuvé la nouvelle loi par 102 voix contre 75. Les sénateurs en ont fait de même par 32 voix contre 6. La LENu faisait office de contre-projet indirect aux initiatives antinucléaires (voir infra)
[19].
Greenpeace, la Fondation suisse de l’énergie et le WWF ont décidé de ne pas lancer, ni de soutenir un référendum contre la LENu. Ces associations estimaient que la nouvelle loi comportait des améliorations par rapport à l’ancienne. Le délai référendaire a échu en septembre sans avoir été utilisé. L
a LENu n’entrera toutefois en vigueur que le 1er janvier 2005, car d’importants travaux législatifs devront être accomplis avant : 1) adoption d’une nouvelle ordonnance sur l’énergie nucléaire qui précisera les diverses dispositions de la LENu et instaurera des dispositions nouvelles concernant entre autre les matériels nucléaires, l’exploitation et la désaffectation des installations et les déchets radioactifs ; 2) modification des ordonnances existantes (en particulier pour ce qui concerne la radioprotection, la protection d’urgence, les fonds de désaffectation et de gestion des déchets) ; 3) modification de l’ordonnance sur l’énergie (marquage du courant et compensation des surcoûts dus à l’injection d’électricité produite au moyen d’énergie renouvelable). La mise en œuvre de la LENu nécessitera encore d’autres ordonnances ayant trait par exemple aux qualités exigées du personnel des installations nucléaires, les récipients nucléaires sous pression et les équipements électriques et mécaniques
[20].
[16]
BO CN, 2003, p. 66 ss.;
LT, 30.1.03; presse du 6 .3.03; voir
APS 2002, p. 133 s.
[17]
BO CE, 2003, p. 117 ss.
[19]
BO CN, 2003, p. 386 ss. et 518;
BO CE, 2003, p. 258 ss. et 370;
FF, 2003, p. 3242 ss.; presse du 22.3.03.
[20]
LT, 24.5.03 (associations); DETEC,
communiqué de presse, 2.9.03.
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