Année politique Suisse 2003 : Infrastructure, aménagement, environnement / Energie / Energie nucléaire
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Dépôts de déchets radioactifs
Interpellé par deux interventions parlementaires, le Conseil fédéral s'est exprimé sur les perspectives de la gestion des déchets nucléaires suite au rejet du dépôt en profondeur du Wellenberg (NW) [27]. Le Conseil fédéral voulait s'en tenir au modèle suisse de gestion des déchets radioactifs, dans lequel deux programmes étaient menés de front, l'un pour les déchet faiblement ou moyennement radioactifs (SMA), l'autre pour les éléments combustibles usés ainsi que les déchets hautement radioactifs ou moyennement radioactifs de longue durée (BE/HAA/LMA). Une nouvelle option était également à envisager, à savoir la réalisation d'un dépôt en profondeur unique pour toutes les sortes de déchets. Le Wellenberg abandonné, une nouvelle procédure de sélection pour un site de déchets SMA sera engagée. Toutefois, celle-ci exigeait une clarification législative préalable concernant les modalités de la gestion des déchets radioactifs. Le programme BE/HAA/LMA s’est poursuivi comme prévu. La Division principale de la sécurité des installations nucléaires (DSN) et la Commission fédérale de la sécurité des installations nucléaires examinera le rapport du Nagra sur la situation géologique du Weinland, remis en décembre 2002. Celui-ci avait trait à l'évacuation des déchets portant sur l'option de l'argile à opalines. Un groupe d'experts ad hoc de l'Agence de l'OCDE pour l'énergie nucléaire (AEN) interviendra dans le cadre de l'évaluation technique. La phase d'expertise durera environ deux ans et sera suivie d'une procédure de dépôt public. La décision du Conseil fédéral sur le justificatif de l'évacuation, la suite à donner au dossier et l'établissement d'un calendrier pour l'évacuation des BE/HAA/LMA ne tomberont pas avant le premier trimestre 2006 [28].
Les habitants de la zone voisine allemande de Benken ont contesté les résultats du Nagra et ont demandé à leurs autorités de mener de nouvelles analyses. Mandaté par deux groupes opposés aux dépôts, une analyse de l'Institut d'écologie de Darmstadt (D) a rendu une étude allant dans leur sens. Les experts critiquaient le manque de critères précis dans l'évaluation des analyses du site de dépôt, d'où une impression d'opacité et d'arbitraire. Autre grief, la population n'avait pas été suffisamment impliquée dans le choix du site. Sur le plan géologique, les experts allemands remettaient en cause les preuves que le Benken était optimal à long terme. L'étude recommandait un examen du risque de tremblements de terre ou de mouvements de l'écorce terrestre, qui ne peuvent pas être exclus dans la région du nord de la Suisse, située près d'une zone de fissures tectoniques. L’analyse allemande dénonçait aussi l'énoncé selon lequel les couches d'opaline argileuse, qui devraient accueillir les déchets radioactifs, formaient une couche pratiquement imperméable. Des pertes d'eau auraient été observées lors d'un forage d'essai dans la roche [29].
L'Allemagne a donné raison à ses concitoyens en contestant le Benken comme site d'entreposage définitif des déchets radioactifs. Elle critiquait la procédure suisse et invitait Berne à reprendre à zéro son évaluation des solutions de stockage, moyennant des alternatives. Après les avoir gelé, les autorités allemandes ont rejeté les conclusions du groupe d'experts allemands (AkEnd) qu'elles avaient mandaté pour se pencher sur la procédure de sélection suisse. L'AkEnd avait conclu dans son rapport que cette dernière remplissait les exigences en place sur le plan international. La préférence accordée pour des raisons de sécurité au Benken en vue de la réalisation du dépôt suisse de HAA/LMA en profondeur lui paraissait justifié. Le reproche d'avoir intentionnellement choisi un site proche de la frontière était sans fondement. L'avis de AkEnd ne reflétait pas l'opinion du Ministère fédéral allemand [30].
Compte tenu des dispositions de la nouvelle loi sur l'énergie nucléaire (voir supra) et dans un souci consensuel, l'OFEN a associé le canton d'accueil (Zurich) et ses voisins (Argovie, Schaffhouse, Thurgovie, ainsi que l’Allemagne) aux travaux préparatoires d'autorisation générale pour la construction d'un dépôt en profondeur au Benken. Trois organes de consultation ont été mis en place: une commission composée de représentants des gouvernements des cantons concernés et du Land de Bade-Württemberg, un forum placé sous la direction de la DSN, dans lequel les experts des cantons et du Land de Bade-Württemberg traitent et discutent des diverses questions et enfin, un groupe de travail s'occupant de l'information et de la coordination [31].
L'OFEN a mis en consultation la demande de l'Institut Paul Scherrer (IPS) quant à une modification de l'autorisation d'exploiter le dépôt intermédiaire fédéral pour les déchets radioactifs (BLZ) à Würenlingen (AG). L'IPS demandait à pouvoir entreposer d'autres types de containers et à ce que les limites d'activité soient supprimées. Le BLZ sert à l'entreposage des déchets radioactifs issus de la médecine, de l'industrie et de la recherche. Deux oppositions en provenance d'Allemagne (commune de Waldshut et une association de protection de l'environnement) ont été déposées à l'OFEN [32].
 
[27] Interpellations Teuscher (pe, BE) et Marty Kälin (ps, ZH); BO CN, 2003, p. 514. Voir APS 2002, p. 135 s.
[28] TG, 27.2.03; DETEC, communiqué de presse, 26.2.03.
[29] TA, 11.2.03 (réactions allemandes); presse du 19.3.03 (étude).
[30] LT, 13.3.03; DETEC, communiqué de presse, 13.3.03.
[31] TA, 7.6.03; DETEC, communiqué de presse, 6.6 et 15.10.03.
[32] Presse du 16.12.03; DETEC, communiqué de presse, 18.12.03.