Année politique Suisse 2003 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Poste et télécommunications
Alors qu' en 2002, il avait privilégié l'ordonnance pour la libéralisation du dernier kilomètre
[62], le Conseil fédéral a sollicité un report pour examiner une double procédure inhabituelle: l'une par la voie de l'ordonnance et l'autre par la loi. L’ajournement était dû aux requêtes des deux commissions parlementaires des télécommunications qui avaient expressément demandé de privilégier la voie législative. Celles-ci estimaient qu'à la vue des enjeux économiques et politiques, le parlement devait se prononcer. Le Conseil fédéral soutenait l'ordonnance, car elle permettait une ouverture en théorie plus rapide. A l'opposé, Swisscom et la gauche préféraient la mise en place d'une loi, qui ralentissait le processus
[63]. Par le
biais d'une ordonnance, le Conseil fédéral a décidé
d'ouvrir à la concurrence dès le 1er avril 2003 le dernier kilomètre. Ainsi, Swisscom devait proposer les trois types de dégroupages et les négocier avec les autres opérateurs. Moritz Leuenberger voulait agir vite pour accompagner la croissance du secteur et les investissements des autres opérateurs. Pour parer à un recours de Swisscom devant le Tribunal fédéral, le Conseil fédéral a
également proposé de changer la loi, afin de donner une assise politique à la libéralisation
[64]. Mettant en application cette ouverture, Sunrise a prié Swisscom d'ouvrir des négociations sur l'interconnexion sur les lignes louées et l'accès à haut débit. Les pourparlers n’ont pas abouti et ont été rompus. En conséquence, Sunrise a déposé trois demandes d'interconnexion des lignes de raccordement louées auprès de la Commission fédérale de la Communication (ComCom). Après examen, cette dernière a rejeté les mesures provisionnelles demandées par Sunrise
[65].
Après avoir promulgué en février l'ordonnance, le Conseil fédéral a adopté un message au parlement visant à modifier la loi sur les télécommunications (LCT). Le projet de loi comprend la libéralisation du dernier kilomètre, l'accès à haut débit et les lignes louées que le Conseil fédéral a déjà introduit par voie d'ordonnance.
Swisscom sera obligé de laisser ses concurrents accéder directement à leurs clients et devra renoncer à l'abonnement mensuel qu'il perçoit auprès de tous les usagers du téléphone. L'opérateur restera propriétaire des lignes, mais il devra les mettre à disposition à des tarifs établis en fonction des coûts. Les termes de la nouvelle loi reprennent les propositions faites en consultation l'année précédente. Un organe de conciliation sera créé en vue de résoudre rapidement les litiges entre les utilisateurs et les fournisseurs de services de télécommunication. Par ailleurs, proposition est faite de modifier la loi contre la concurrence déloyale pour y inscrire le principe de l'interdiction de l'envoi de masse de messages publicitaires non sollicités. Le projet du Conseil fédéral renonce à conférer à la ComCom un trop grand pouvoir d'ingérence. Il préconise que celle-ci n’ interviendra que sur plainte d'un opérateur. Pour les services à valeur ajoutée (numéros 0900), le Conseil fédéral pourra fixer des prix plafond, régler l'indication des prix et obliger l'entreprise à avoir un siège en Suisse. De nouvelles barrières seront aménagées pour que les données sur la localisation des clients et les données stockées sur des appareils appartenant à autrui (cookies) ne soient pas utilisées au détriment de la sphère privée
[66].
Compte tenu de l'ordonnance sur les services de télécommunications qui lui impose de calculer chaque année les coûts de son réseau fixe et de les répercuter sur ses clients,
Swisscom abaissera de 13% dès le 1er janvier 2004 ses tarifs d'interconnexion [67]. Après recours, la ComCom a imposé à Swisscom de baisser ses tarifs d'interconnexion de 25 à 35%, mais aussi rétroactivement (de 2000 à 2003) pour deux opérateurs, Sunrise et MCI Worldcom. Swisscom a adressé un recours auprès du Tribunal fédéral
[68].
Des sept candidats aux
concessions GSM, la Commission de la communication (ComCom) en a octroyé une à la société In&Phone et l’autre à Tele2. Son objectif était d’accroître la libéralisation du marché et de mettre fin à la position oligopolistique de Swisscom, Orange et Sunrise. Ces deux concessions supplémentaires n’entraîneront pas l’aménagement d’un quatrième réseau national GSM. In&Phone entend offrir des réseaux locaux aux clients commerciaux d’une certaine taille. Tele2 se concentrera sur le marché des clients privés. La société entend recourir à un accord d’itinérance pour étendre ses services, à savoir utiliser le réseau d’un opérateur existant. La société ne devrait construire ses propres infrastructures que dans certains endroits, marqués par une forte densité de population
[69].
[62] Le dernier kilomètre est le raccordement (téléphonique et Internet) des ménages aux centraux les plus proches. Pour plus d'informations, voir
APS 2002, p. 152 s.
[64] Presse du 27.2.03 (ordonnance); DETEC,
communiqué de presse, 26.2.03.
[65]
24h, 5.8 (plainte) et 26.9.03 (ComCom).
[66]
FF, 2003, p. 7245 ss., presse du 13.11.03.
[67] Presse du 1.10.03 (baisse de 13%).
[68] Presse du 8.11.03 (ComCom).
[69]
24h, 16.7.03 (mise au concours de fréquences); presse du 7.10 (sept candidats) et 19.12.03 (concession), DETEC,
communiqué de presse, 15.7.03.
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