Année politique Suisse 2004 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Constructions routières
Les
opposants au contre-projet de l’initiative Avanti se sont fortement engagés durant la campagne précédent la votation. Leurs arguments se sont concentrés sur deux éléments : la construction du tunnel du Gothard, qui sabotait l’objectif d’un transfert du trafic des marchandises de la route au rail, et les
coûts très élevés de réalisation de l’initiative (oscillant entre 30 et 40 milliards de francs), alors que l’Etat devait opérer des restrictions budgétaires. Les opposants craignaient également que l’extension de certaines capacités routières favorise un engorgement du réseau. Le PS, les Verts, les organisations de protection de l’environnement, les syndicats, ainsi que le PDC, contre la recommandation de la direction de son parti, ont apporté leur soutien aux adversaires du contre-projet. Les partisans d’Avanti ont pu compter sur l’appui du PRD, de l’UDC et des associations d’entrepreneurs. L’UDC a toutefois reproché à ses partenaires « leur mollesse » et leur manque d’engagement dans la campagne en comparaison de leurs rivaux. Les
partisans ont vanté le concept du contre-projet qui permettait à la fois de
promouvoir le trafic privé et les transports publics, et dont le financement était assuré à long terme par l’utilisation des taxes à affectation spéciale payées par les automobilistes. Ils récusaient les chiffres avancés par les opposants et avançaient à la place la somme de 20 milliards de francs. Tout en défendant le texte soumis au vote, Moritz Leuenberger, ministre en charge du dossier, n’a pas caché ses réserves sur les modifications apportées par le parlement. Il a estimé qu’il appartenait à ce dernier de défendre ses propositions
[7].
Contre-projet de l'Assemblée fédérale relatif à l'initiative populaire "Avanti"
Votation du 8 février 2004
Participation : 45,6%
Oui : 800 632 (37,2%) / cantons: 0
Non : 1 351 500 (62,8%) / cantons: 20 6/2
– Oui : PRD (1*), PDC (5*), UDC (5*), PLS, PSL, Lega ; Economiesuisse, USAM.
– Non : PS, PES, PEC, PCS, PST, DS, UDF ; USS, CSC.
* Recommandations différentes des partis cantonaux
Le contre-projet Avanti a été
rejeté par 62,8% des votants et tous les cantons. La plus forte opposition a été enregistrée aux Grisons (74,5% de non), à Uri (73,6%) et au Valais (71,8%). A l’autre bout de l’échelle, le Tessin (55,7%), Zoug (58,1%) et Schwyz (58,3%) se sont montrés les plus favorables
[8]. D’après les résultats de l’analyse Vox, il y a des différences entre les diverses régions linguistiques quant au rejet du contre-projet. Alors qu’en Suisse allemande et au Tessin le motif principal du rejet est d’empêcher la construction du second tube du Gothard, la Suisse francophone met en exergue l’importance des coûts. Les partisans et adversaires du contre-projet se sont rejoints sur la nécessité d’investir dans les transports publics d’agglomérations. Selon l’Analyse Vox, le comportement de vote dénote un fossé gauche/droite : les personnes à gauche de l’échiquier politique rejettent le contre-projet, tandis que celles qui se situent à droite l’acceptent de justesse. La position relative à la politique de protection de l’environnement a influencé la décision de manière quasi identique. Le comportement des sympathisants des partis montre que le scepticisme s’était largement répandu dans le camp bourgeois. A l’inverse, la gauche a su motiver ses sympathisants à participer au vote. Deux tiers de sympathisants du PDC ont suivi la recommandation de leur parti
[9].
Après le rejet du contre-projet, tant les partisans que les opposants à Avanti ont concédé que des mesures s’imposaient dans le domaine des transports. Moritz Leuenberger a donc
convié les milieux intéressés à discuter de ce point ainsi que des autres problèmes liés aux transports. L’UDC a décliné l’invitation, préférant réclamer une réduction des taxes routières. Les divers intervenants ont été d’accord pour dire que les problèmes du trafic d’agglomération devaient être résolus de toute urgence. L’achèvement du réseau des routes nationales, la prise en compte des régions périphériques et l’utilisation adéquate de l’impôt sur les huiles minérales n’ont pas été contestés. Des divergences sont par contre apparues sur d’autres thèmes, tels que le fonds d’infrastructure, le road pricing et l’extension des routes nationales
[10].
Chargé par les commissions des transports et des télécommunications du Conseil des Etats et du Conseil national, le DETEC a élaboré trois variantes pour apporter des solutions au trafic dans les agglomérations, aux problèmes liés aux routes nationales et aux régions périphériques et de montagne. La première variante prévoit un
fonds d’infrastructure permettant de financer les contributions en faveur du trafic d’agglomération (route et rail). Il doit aussi assurer l’achèvement du réseau des routes nationales et supprimer les goulets d’étranglement. Ce fonds serait alimenté par les réserves du financement spécial pour la circulation routière
[11] et par une partie des recettes affectées obligatoirement au domaine routier (impôt sur les huiles minérales, vignette autoroutière). Il bénéficierait de 20 milliards de francs sur une période de 15 à 20 ans. Hormis la création de ce fonds, cette variante propose une aide fédérale accrue en faveur des routes principales dans les régions périphériques et de montagne. La deuxième variante prévoit la création d’un
fonds pour le trafic d’agglomération. Il serait alimenté par les réserves du financement spécial, et, le cas échéant, par une partie des recettes routières à affectation obligatoire. Ce fonds serait doté de 3 à 5 milliards sur 15 à 20 ans. Les routes nationales continueront de bénéficier des mécanismes existants. A l’instar de la première variante, celle-ci prévoit une augmentation des contributions en faveur des routes principales des régions périphériques et de montagne. La troisième variante envisage la création d’un
fonds d’urgence provisoire, aux moyens limités et destiné à financer les projets de transport les plus urgents. Il se concentra sur le trafic d’agglomération et les routes principales les plus difficiles à financer. Ce fonds serait alimenté par une partie des réserves provenant du financement spécial affecté à la circulation routière et ne concurrencera pas d’autres projets de transport. Il s’élèverait à 2 milliards de francs
[12].
[7] Presse du mois de janvier. Voir
APS 2003, p. 161 s.
[9]
FF, 2004, p. 2045 s; Hirter, Hans / Linder, Wolf,
Vox, Analyse des votations fédérales du 8 février 2004, Berne 2004; presse du 9.2.04.
[10]
LT, 30.3.04; presse du 2.4.04; DETEC,
communiqué de presse, 4.3 et 1.4.04.
[11] L’état du fonds en 2004 était de 3,6 milliards de francs.
[12] Presse du 27.8.04; DETEC
, communiqué de presse, 26.8.04.
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