Année politique Suisse 2005 : Chronique générale / Politique étrangère suisse / Politique économique extérieure
print
Garantie contre les risques à l’exportation
Durant l’année sous revue, le parlement a examiné le projet de révision de la loi fédérale sur l’Assurance suisse contre les risques à l’exportation (ASRE) que lui avait soumis le Conseil fédéral en 2004. En tant que premier conseil, le Conseil national a entamé un long débat sur l’opportunité d’entrer en matière sur cet objet. Une minorité Gysin (ps, BS) a proposé de ne pas entrer en matière, arguant que, bien qu’elle n’était pas opposée à une garantie de l’Etat contre les risques à l’exportation, elle refusait toutefois de l’étendre aux risques de l’acheteur privé. Réfutant ce point de vue, les partis bourgeois ont fait valoir qu’il s’agissait au contraire de garantir des emplois, et notamment de permettre à l’industrie d’exportation de lutter à armes égales avec la concurrence étrangère. Le conseiller fédéral Joseph Deiss n’a pas manqué de soulever, à ce titre, que la Suisse était le seul pays dont la garantie contre les risques à l’exportation ne couvrait pas, ou seulement en partie, les risques de l’acheteur privé. Par 126 voix contre 16, les députés ont voté l’entrée en matière. Dans l’intérêt de l’industrie d’exportation, la plupart des socialistes et des Verts ont également voté l’entrée en matière, en plaidant toutefois en faveur d’un durcissement des critères dès lors qu’il s’agirait de couvrir les risques à l’exportation d’un acheteur privé ayant conclu des affaires à risques. Plusieurs propositions de minorité, émanant de députés socialistes et écologistes, ont toutes été rejetées. Parmi elles, celle du conseiller national Hans-Jürg Fehr (ps, SH), qui visait à exclure toute assurance en cas de livraison d’armes et de tout autre matériel de guerre, et celle de Ruth Genner (pe, ZH), qui proposait que le représentant d’une ONG travaillant dans le domaine de l’environnement, des droits de l’homme ou de la politique du développement ait droit à un siège au conseil d’administration de l’assurance. La proposition du Conseil fédéral d’adopter une formulation potestative pour l’institution de l’organe consultatif a été rejetée par 94 voix contre 64. Au vote sur l’ensemble, le projet a été adopté par 131 voix contre 15.
Au Conseil des Etats, l’entrée en matière n’a fait l’objet d’aucun débat, les députés étant convaincus de la nécessité d’étendre la garantie de l’Etat aux risques de l’acheteur privé. Contrairement au Conseil national, la chambre haute a renoncé à la disposition qui prévoyait de gérer de manière séparée les risques des débiteurs publics et privés. Elle a cependant inscrit dans la loi que l’Assurance suisse contre les risques à l’exportation devait percevoir des primes proportionnées au risque. Le plénum a rejeté, par 25 voix contre 9, une proposition Berset (ps, FR) qui visait à exclure toute assurance si l’opération risquait de nuire sérieusement à l’image de la Suisse. Le Conseil des Etats a suivi, sans débat, le Conseil national sur la question de la couverture d’assurance proposée par le gouvernement. Celle-ci s’élève, tant pour les débiteurs publics que privés, au plus à 95% du montant assuré. En ce qui concerne la composition du conseil d’administration, la chambre haute a été plus précise que le Conseil fédéral: elle a en effet proposé qu’y siègent des spécialistes des secteurs de l’assurance, de l’industrie d’exportation et de la politique du développement.
Au cours de la procédure d’élimination des divergences, le Conseil national a confirmé qu’il souhaitait la coexistence de deux assurances distinctes, l’une pour les débiteurs publics et l’autre pour les débiteurs privés. Ce dernier, qui avait ajouté en première lecture une disposition visant à ce que le Conseil fédéral veille à une représentation équilibrée des deux sexes au sein du conseil d’administration – disposition que le Conseil des Etats avait refusé –, a décidé de maintenir celle-ci par 91 voix contre 61. Le plénum a ainsi suivi l’avis de la majorité de sa commission, contre une minorité emmenée par le député zurichois Hans Kaufmann (udc). De son côté, le Conseil des Etats a maintenu sa décision en faveur de la mise en place d’une seule assurance. Concernant la représentation équilibrée des deux sexes au conseil d’administration, il a également confirmé sa première décision sans discussion. Au niveau du conseil d’administration, la majorité de la commission a proposé de maintenir la disposition prévoyant une représentation appropriée d’experts au sein de celui-ci. Une minorité emmenée par le démocrate du centre Hannes Germann (SH) proposait que ce dernier soit non seulement composé d’experts, mais également de partenaires sociaux, comme le souhaitait le Conseil national. Carlo Schmid (pdc, AI) voulait, quant à lui, revenir à la proposition du gouvernement, qui prévoyait de laisser à ce dernier le soin de définir la composition du conseil d’administration. Le Conseil des Etats a finalement suivi cette dernière proposition, par 22 voix contre 18, maintenant sur ce point une divergence avec le Conseil national.
La chambre du peuple a finalement suivi le Conseil des Etats en optant pour une seule assurance. Elle a toutefois précisé que celle-ci devrait se composer de deux communautés de risques distinctes – l’une pour les débiteurs publics et l’autre pour les débiteurs privés –, qui ne connaîtraient pas de compensation mutuelle. En ce qui concerne la représentation équilibrée des femmes au sein du conseil d’administration, le Conseil national a suivi la décision du Conseil des Etats (et de la majorité de la commission), qui ne voulait pas d’un tel ajout dans la loi. Il s’est en outre tenu à sa volonté d’y voir les partenaires sociaux équitablement représentés. Le Conseil des Etats a malgré tout refusé, à l’unanimité, l’idée d’une division en deux communautés de risques, considérant que les risques à l’exportation constituaient un tout indissociable. Quant à la seconde divergence, une minorité de la commission emmenée par le député socialiste Alain Berset (FR) a proposé de suivre le Conseil national et de prendre en considération les partenaires sociaux de manière appropriée lors de la mise en place du conseil d’administration. Le Conseil des Etats l’a suivie par 19 voix contre 17.
La Conférence de conciliation a soumis une proposition de compromis aux deux conseils, afin de venir à bout de la divergence qui subsistait. Celle-ci prévoyait que l’assurance soit compétente en matière de risques publics ou privés et qu’elle travaille de manière à s’autofinancer, que les risques des débiteurs publics et privés soient gérés de manière séparée (présentation des comptes dans des rubriques distinctes), et que les risques puissent temporairement faire l’objet d’une compensation entre les différentes rubriques. Au vote final, le Conseil des Etats a approuvé cette proposition à l’unanimité. Au Conseil national, elle a également été nettement approuvée (156 voix contre 26), seuls les écologistes et quelques députés UDC l’ayant refusée [43].
Le parlement a ratifié deux accords de réassurance en matière de garantie contre les risques à l'exportation, l’un avec les Pays-Bas et le second avec la Pologne [44].
 
[43] BO CN, 2005, p. 243 ss., 310 ss., 1301 ss., 1617 ss., 1826 s. et 2000; BO CE, 2005, p. 475 ss., 811 ss., 1045 ss., 1121 s. et 1220; FF, 2005, p. 6987 ss. Voir APS 2004, p. 62 s.
[44] FF, 2005, p. 993 ss.; BO CN, 2005, p. 219 ss.; BO CE, 2005, p. 251 ss. Voir APS 2004, p. 63.