Année politique Suisse 2005 : Infrastructure, aménagement, environnement / Energie / Politique énergétique
Afin de réconcilier les partisans de la libéralisation du marché de l’électricité et les milieux favorables aux énergies renouvelables, la
Commission de l’énergie du Conseil national (CN-N) a modifié deux points du projet du Conseil fédéral concernant la loi sur l’approvisionnement en électricité. La CN-N s’est écartée de la position du gouvernement en se prononçant pour une
libéralisation immédiate
et totale du marché de l’électricité. Des garanties seraient aménagées pour la protection des petits consommateurs. Alors que le message du Conseil fédéral ne prévoyait pas de
mesures d’incitation pour les énergies renouvelables, la commission a voulu les promouvoir et a proposé que les énergies renouvelables injectées dans le réseau soient achetées au prix coûtant. Pour cela, le prix de l’électricité serait majoré d’un montant pouvant aller jusqu’à 0,3 centime par kilowattheure. La somme récoltée (165 millions de francs) permettrait de payer le courant injecté dans le réseau au prix coûtant. L’objectif de cette mesure est d’augmenter de 5400 gigawattheures la production d’électricité « verte » d’ici à 2030. La solution adoptée par la CN-N a scindé le projet gouvernemental en trois arrêtés distincts: la loi sur les installations électriques, la loi sur l’approvisionnement en électricité et la loi sur l’énergie. Une minorité de la commission s’est toutefois exprimée en faveur d’une libéralisation du marché électrique en deux étapes
[5].
Le
Conseil national a refusé, par 127 voix à 33, le renvoi du projet de la loi sur l’approvisionnement en électricité au Conseil fédéral demandé par Menétrey (pe, VD). Il a accepté par 107 voix contre 73 la création d’une
société nationale responsable de la gestion du réseau de transport d’électricité. Celle-ci sera une société anonyme de droit privé indépendante. Les conseillers nationaux ont tenu à préciser que la majorité des membres du conseil d’administration et de la direction ne pourront être simultanément liés financièrement à une entreprise active dans les secteurs de la production ou du commerce d’électricité. La surveillance sera exercée par l’Elcom, une commission de l’électricité fonctionnant selon des règles fixées par le Conseil fédéral. En ce qui concerne le rythme de la libéralisation, le Conseil national a décidé par 94 voix contre 92 de suivre la proposition de la minorité de la commission emmenée par Chevrier (pdc, VS) d’
ouvrir le marché en deux étapes. Cette décision est le fruit de l’alliance de la gauche avec des représentants bourgeois des régions périphériques et des cantons romands. Le modèle retenu correspond au compromis qui avait été élaboré par la commission d’experts chargée de remettre l’ouvrage sur le métier après l’échec en votation populaire de la première tentative de libéralisation. Il prévoit une ouverture immédiate du marché dès 2007, au profit des grandes entreprises consommant plus de 100 MWh par année. Cette quantité consommée correspond à une facture annuelle de 20 000 francs et plus. L’ouverture interviendra cinq ans plus tard pour les PME et les ménages privés. Le Conseil national n’a en revanche pas suivi la minorité de sa commission sur la clause de sauvegarde. Par 122 voix contre 61, il a refusé d’introduire dans les dispositions finales de la loi un référendum facultatif entre la première et la deuxième étape, après cinq ans d’expérience. Les conseillers nationaux se sont ralliés à la proposition de leur commission et ont adopté, par 124 voix contre 24 et 25 abstentions, un compromis énergétique qui permet d’accroître la production d’électricité « verte » en
rétribuant à prix coûtant les énergies renouvelables qui ne sont pas encore rentables (cf. supra). Lors du vote sur l’ensemble, la loi fédérale sur les installations électriques à faible et fort courant a été approuvée par 136 voix contre 35; la loi sur l’énergie a été approuvée par 124 voix contre 24 et la loi sur l’approvisionnement par 83 voix contre 55 et 27 abstentions
[6].
Se saisissant du dossier, la commission de l’énergie du Conseil des Etats (CE-E) a émis le souhait que la société gérant le réseau de transport d’électricité en Suisse reste en mains suisses. Pour ce faire, elle a proposé de reformuler les dispositions adoptées par le Conseil national, qui prévoient qu’une entité nationale gérera à l’avenir le transport de courant sur de grandes distances en Suisse ainsi que le commerce transfrontalier. Pour la CE-E, les cantons et les communes doivent être actionnaires des entreprises dirigeant la société et doivent y détenir globalement la majorité en termes de capital et de voix
[7].
[5] Presse du 6.9.05;
LT, 21.9.05. Au sujet du rythme et du type d’ouverture, cf.
APS 2004, p. 120 s.
[6]
BO CN, 2005, p. 1013 ss., 1041 ss. et 1076 ss.; presse du 21.9 et 22.9.05.
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