Année politique Suisse 2005 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Poste et télécommunications
A la fin du mois de novembre, le chef du DFF, Hans-Rudolf Merz, a annoncé
l’intention du Conseil fédéral de privatiser Swisscom et de rapidement mettre ce projet en consultation. D’après lui, la Confédération ne pouvait plus assumer la double casquette d’actionnaire et de régulateur et elle devait cesser d’assumer les risques financiers auxquels l’entreprise était exposée. Il a précisé que la décision du gouvernement avait été prise sans avoir consulté Swisscom. Le projet de privatisation a divisé les partis gouvernementaux en deux camps; d’un côté, le PS et le PDC se sont prononcés contre la vente, et de l’autre, l’UDC et le PRD en sa faveur. Suite à une confidence révélée aux médias par Christoph Blocher (voir supra, part. I, 1 c, Regierung), le porte-parole du DFF a dû confirmer le lendemain de l’annonce de la privatisation que le
Conseil fédéral s’opposait à tout engagement important de Swisscom à l’étranger tant que la Confédération resterait majoritaire dans son capital. Initialement, le gouvernement avait prévu de finaliser avec Swisscom sa nouvelle marge de manœuvre réduite avant de la communiquer aux médias. Justifiant le choix du gouvernement, Hans-Rudolf Merz a indiqué que la Confédération ne voulait pas que l’opérateur helvétique prenne à l’étranger d’importantes responsabilités pour des infrastructures ou du personnel. Le PS, le PDC et le PRD ont réagi avec incompréhension à cette annonce. Seule l’UDC a appuyé la stratégie du gouvernement. Réagissant dans un communiqué, Swisscom a pris acte de la position de son propriétaire. La stupéfaction était néanmoins de mise, car l’opérateur était à la veille de signer avec l’opérateur irlandais Eircom, son premier gros contrat d’expansion à l’étranger par acquisition. Afin d’apporter des précisions à l’interdiction de tout engagement de Swisscom à l’étranger, le ministre de tutelle de l’opérateur national, Moritz Leuenberger, a relevé que celle-ci n’était pas absolue. Elle s’appliquait avant tout aux rachats importants, mais pas à des échanges technologiques avec des partenaires sous la forme de joint-ventures. Exigeant des précisions supplémentaires, le PS, le PDC, le PRD et l’UDC ont demandé un débat urgent sur la privatisation de Swisscom. Les quatre partis gouvernementaux et les Verts ont chacun déposé une interpellation à ce sujet
[57].
Après avoir exprimé ses intentions à l’égard de Swisscom, le Conseil fédéral a rencontré la direction de l’opérateur. Malgré des divergences sur les objectifs stratégiques et opérationnels, il a obtenu de cette dernière que Swisscom renonce à tout investissement dans des opérateurs fournissant les services de base d’un pays étranger. En contrepartie, le gouvernement a accepté de réviser les objectifs stratégiques 2006-2009 avant la fin de l’année. Dans sa réponse aux interpellations urgentes de tous les groupes parlementaires, le Conseil fédéral a plaidé pour une
procédure accélérée. Les modalités d’une privatisation totale et les différentes mesures possibles seront précisées en janvier 2006 dans un rapport. Pris à parti au Conseil des Etats et au Conseil national, en particulier par les élus de centre gauche, le conseiller fédéral Merz a dû défendre les choix du gouvernement ainsi que sa gestion de la communication dans cette affaire. La Commission de gestion du Conseil national a mis sur pied une commission ad hoc pour
examiner la communication du Conseil fédéral au sujet de Swisscom et rechercher les faits. Les partis gouvernementaux ont désigné leurs représentants au sein de l’organe, à l’exception de l’UDC qui a refusé d’en faire partie
[58].
En fin d’année, le Conseil fédéral a présenté les
nouveaux buts qu’il assigne à
Swisscom pour la période 2006-2009. Tant que la Confédération sera l’actionnaire majoritaire, l’opérateur n’aura pas le droit d’acquérir des entreprises étrangères bénéficiant d’un mandat de service universel. Swisscom pourra toutefois conclure des rachats ou des alliances dans des domaines spécifiques, pour autant que ces opérations répondent à une logique industrielle ou contribuent directement à baisser les coûts en Suisse. Les expansions sont possibles notamment dans Internet et la distribution de services télévisés. Le Conseil fédéral limite la marge de manœuvre de Swisscom, en lui demandant de reverser aux actionnaires tous ses fonds propres jusqu’à concurrence d’un milliard de francs
[59], et en restreignant son droit de s’endetter à 5 milliards. Cette dernière somme correspond à 1,5 fois le résultat opérationnel (bénéfices avant impôts et amortissements). Concernant le désengagement de la Confédération de Swisscom, Hans-Rudoph Merz a indiqué qu’il présentera la mouture finale du projet au mois de janvier 2006
[60].
Au cours de l’année sous revue, la Confédération a vendu 3,1 millions de titres Swisscom pour un montant de 1,35 milliards de francs. Sa
participation a été réduite de 66,1%
à 62,45% [61].
Dans le cadre de la privatisation du radiodiffuseur hongrois
Antenna Hungaria, le gouvernement hongrois a retenu l’offre de 286 millions de francs de Swisscom Broadcast. La filiale de Swisscom a supplanté deux autres enchérisseurs étrangers pour s’emparer de 75% du capital plus une action. Antenna Hungaria est spécialisée dans la diffusion de chaînes de radio et de télévision, mais elle est aussi active dans Internet à haut débit et la téléphonie mobile, en tant qu’actionnaire de la filiale hongroise de l’opérateur anglais Vodafone. Fin octobre, les autorités de la concurrence ont donné leur feu vert à Swisscom pour la reprise du radiodiffuseur hongrois, jusqu’à présent en mains étatiques
[62].
[57] Presse du 24.11 au 26.11 et du 28.11 au 1.12.05. Ip. Groupe socialiste: 05.3712; Ip. Groupe démocrate-chrétien: 05.3723; Ip. Groupe UDC: 05.3724; Ip. Groupe radical-libéral: 05.3729; Ip. Groupe des Verts: 05.3730.
[58] Presse du 3.12, 6.12, 8.12 et 13.12 au 16.12.05.
[59] La politique de distribution des bénéfices sera discutée en janvier 2006 entre le CF et le Conseil d’administration de Swisscom.
[61] Malgré la préparation du projet de loi de désengagement, la Confédération sera contrainte de conserver une partie de ses actions Swisscom jusqu’à fin 2007. Le CF doit respecter les conditions d’un emprunt de la Confédération convertible en actions Swisscom. Lancé en décembre 2003 pour une durée de quatre ans, cet emprunt oblige le DFF à détenir 300 millions de francs de titres Swisscom jusqu’à fin décembre 2007 (presse du 21.12.05).
[62] Presse du 22.7.05 (offre);
24h, 26.10.05 (feu vert).
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