Année politique Suisse 2007 : Infrastructure, aménagement, environnement / Energie / Politique énergétique
Lors de la session de printemps, les Chambres fédérales ont repris leurs débats concernant la loi sur l’approvisionnement en électricité (LApEI) et la loi sur l’énergie (LEn). Des divergences subsistaient alors principalement sur les modalités du soutien aux énergies renouvelables (art. 7a, al. 5, let. b LEN) ainsi que sur le rythme d’ouverture du marché (art. 6, al. 5 LApEI). Le Conseil des Etats est revenu sur la question du soutien à l’énergie photovoltaïque. Lors d’une session antérieure, la Chambre haute avait décidé de restreindre le cercle des énergies renouvelables qui bénéficieraient d’un soutien financier par l’édiction d’un prix de revient maximal de 40 centimes par kilowattheure (5 fois le prix du marché). Or, l’adoption de cette valeur-limite aurait exclu l’énergie photovoltaïque de toute mesure d’encouragement. Considérant cette technologie comme fort prometteuse, le Conseil des Etats s’est rallié, par 29 voix contre 13, à la décision de la Chambre basse. Il a par contre refusé de la suivre au sujet du rythme de la libéralisation. À l’unanimité, la Chambre haute a rejeté la proposition d’ouvrir le marché dès la première étape pour les groupements d’entreprises ayant une consommation commune égale ou supérieure à 100 mégawattheures (mWh) par an.
Le règlement de cette divergence majeure et de quelques autres de moindre importance a nécessité la convocation d’une Conférence de conciliation. La proposition finalement soumise aux deux Chambres reprenait la solution du Conseil des Etats concernant l’ouverture du marché électrique. Elle fut approuvée par les deux conseils, notamment par 123 voix contre 31 au Conseil national. En conséquence, dans un premier temps, seuls les clients consommant plus de 100 mWh/an pourront choisir librement leur fournisseur, alors que dans un second les autres clients (petites et moyennes entreprises et ménages) le pourront également. Sur deux autres points de désaccord, on a retenu la solution proposée par le Conseil national, notamment un programme de renforcement de l’efficacité énergétique. Au vote final, le Conseil des Etats a adopté unanimement le projet, tandis que le Conseil national l’a approuvé par 166 voix contre 27 (principalement des membres du groupe UDC favorables à une libéralisation plus rapide et des représentants de l’extrême gauche hostiles à toute libéralisation).
Le délai référendaire ayant expiré sans avoir été utilisé, le Conseil fédéral a fixé au 1er janvier 2008
l’entrée en vigueur de la loi sur l’approvisionnement en électricité et de la modification de la loi sur l’énergie. Dès lors, à la session d’automne, le Conseil des Etats, sur proposition de sa commission, a refusé d’entrer en matière sur le
projet de modification de la loi sur les installations électriques à faible et fort courant (LIE). En effet, cette modification étant censée réglementer le commerce transfrontalier d’électricité jusqu’à l’entrée en force de la LApEI et de la LEN, les membres de la Chambre haute l’ont jugée désormais inutile. Enfin, l’adoption de la LApEI a également rendu caduque l’initiative Dupraz (prd, GE), que le Conseil national a donc décidé de classer lors de la session d’automne
[12].
À l’approche de l’ouverture du marché suisse, le surveillant des prix, Rudolf Strahm, a mis en garde contre un alignement à la hausse des prix estimé à 10%. La libéralisation n’est pas seule en cause, puisqu’on observe une forte croissance de la demande énergétique en général tant en Europe que dans le monde. Monsieur Prix a cependant critiqué la mise en œuvre de la LApEI telle que planifiée par le Conseil fédéral, car aucune
régulation du prix du courant électrique n’est prévue. Le gouvernement a réagi en annonçant le transfert de la compétence de contrôler le prix de l’électricité du surveillant des prix à la
Commission de l’électricité. Afin d’éviter toute hausse injustifiée, la commission pourra annuler des hausses survenues avant l’entrée en force de la loi et décider des baisses de tarifs, alors que jusque là le surveillant des prix ne pouvait qu’émettre des recommandations
[13].
Les groupes
Atel et Energie Ouest Suisse (EOS) ont repris leurs travaux en vue d’une fusion et de la constitution du groupe Ouest Energie. Le projet a pris une année de retard suite au recours déposé par un petit actionnaire et finalement rejeté par le Tribunal fédéral. La création du nouveau groupe est désormais prévue pour le milieu de l’année 2008 et l’intégration des activités industrielles des partenaires pour fin 2008
[14].
L’achèvement du
réseau à très haute tension (380 kilovolts) ne se déroule pas sans encombre. En Valais, le projet d’EOS de construire une ligne entre Chamoson et Chippis (28 km) est fortement contesté par des groupements d’habitants et des organisations écologistes qui dénoncent les atteintes au paysage et à la qualité de vie et réclament l’enterrement de la ligne. La direction d’EOS objecte que l’enterrement coûterait de 8 à 15 fois plus cher que le tronçon aérien. Après de multiples tentatives de conciliation, l’Inspection fédérale des installations à courant fort (ESTI) a transmis le dossier à l’OFEN
[15].
En novembre, le Conseil fédéral a entamé des
négociations avec l’UE en vue d’un accord bilatéral censé garantir la sécurité de l’approvisionnement électrique des parties dans un contexte de libéralisation. Cet accord doit réglementer l’accès au réseau pour le transit transfrontalier du courant et harmoniser les normes de sécurité des réseaux de transit. Des divergences se sont faites jour. L’UE souhaite que la Suisse adopte telles quelles les règles communautaires. Or, les contrats d’approvisionnement avec Electricité de France (EdF) (qui courent pour certains au-delà de 2020), qui permettent à la Suisse d’exporter du courant de pointe à prix d’or et d’importer du courant bon marché aux heures creuses, sont considérés par Bruxelles comme des entraves à la libre concurrence. Aucune solution n’est apparue lors de la première rencontre, mais les négociations se poursuivront en 2008
[16].
[12]
BO CE, 2007, p. 43 ss., 210 ss., 286 ss. et 3087;
BO CN, 2007, p. 166 ss., 461 ss. et 593 s. ; presse du 08.03.07 (soutien du CE à l’énergie photovoltaïque). Concernant le refus d’entrer en matière sur la LIE:
BO CE, 2007, p. 927;
BO CN, 2007, p. 1818. Sur le classement de l’initiative Dupraz:
BO CN, 2007, p. 1709. Cf.
APS 2005, p. 135 s. et
2006, p. 138 s.
[13]
NZZ et
QJ, 14.11.07 (surveillant des prix);
NZZ, 29.11.07 (commission de l’électricité); DETEC,
communiqué de presse, 28.11.07.
[14]
AZ et
LT, 9.10.07; cf.
APS
2006, p. 137 s.
[16] Presse du 9.11.07; OFEN,
communiqué de presse, 8.11.07.
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