Année politique Suisse 2007 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Poste et télécommunications
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Poste
En début d’année, la direction de l’ancienne régie et le Syndicat de la communication sont parvenus à un accord au sujet de la réforme Ymago. Le plan social ainsi ratifié prévoit que la suppression des 400 à 500 emplois s’accomplira sans licenciements économiques ni réduction des taux d’activité. Les salaires des responsables d’office âgés de plus de 55 ans seront garantis jusqu’à la retraite, et ceux des plus jeunes jusqu’en 2011. Se félicitant du résultat des négociations, le syndicat a toutefois rappelé son opposition à la transformation de 200 offices en agences dans des épiceries [60].
L’autorité de régulation du marché postal PostReg a critiqué la décision de la Poste d’augmenter de 30 centimes les frais de traitement pour les versements en espèces au guichet. Jugeant la hausse disproportionnée (+23%), l’autorité de contrôle a estimé qu’un renchérissement de 10 centimes aurait été acceptable. Elle a également contesté la nécessité économique de cette mesure, en soulignant les excellents résultats d’ensemble de PostFinance. Le directeur général de la Poste, Ulrich Gygi, a réagi en niant la compétence de PostReg. La Poste occupant une position dominante sur le marché postal, Monsieur Prix est la seule autorité compétente pour se prononcer sur les tarifs postaux. Or, le surveillant des prix, Rudolf Strahm, a étudié la décision de la Poste et conclu que le prix de la prestation concernée avait été fixé correctement. Le directeur de l’ancienne régie a par conséquent refusé de revenir sur sa décision [61].
En avril, la Poste a lancé un service de signature électronique. Premier pas sur la voie vers un système d’échanges en ligne sécurisés, le nouveau service permet notamment l’envoi de courriers électroniques recommandés. Dans une première phase dite « d’essai », ces nouvelles prestations ne seront disponibles que dans les cantons de Zurich et Saint-Gall [62].
Lors de la session de printemps, le Conseil national a approuvé sans discussion un postulat du groupe radical-libéral demandant au Conseil fédéral de présenter un rapport sur l’avenir de la Poste dans un marché libéralisé. Le gouvernement doit notamment étudier les effets d’une libéralisation totale du marché postal sur l’ensemble des acteurs concernés (la Poste et ses concurrents, ainsi que leurs clients). Le rapport doit également proposer une définition du service public compatible avec un marché totalement libéralisé et évaluer les avantages et inconvénients d’une privatisation de la Poste [63].
L’Assemblée fédérale a transmis au Conseil fédéral une motion Germanier (prd, VS) le chargeant de présenter un projet sur l’organisation et les compétences de l’autorité de régulation du marché postal qui garantisse son indépendance vis-à-vis du législateur, du DETEC et du propriétaire de la Poste. L’autorité de régulation actuelle, PostReg, est rattachée administrativement au DETEC et ne peut, selon le motionnaire, pas accomplir sa mission avec l’impartialité nécessaire [64].
En septembre, le Conseil fédéral a établi la feuille de route pour l’ouverture du marché postal suisse. Début 2008, il mettra en consultation un projet de nouvelle législation prévoyant une ouverture en deux étapes. Dès 2011, le monopole des lettres sera abaissé de 100 à 50 grammes. Puis, deux à cinq ans plus tard, le parlement se prononcera sur la libéralisation complète et sa décision sera soumise au référendum facultatif. La future loi prescrira le respect par toutes les entreprises des conditions de travail usuelles dans la branche et garantira, au besoin, le financement du service universel par un fonds alimenté par les entreprises de la branche ou par des indemnités de l’Etat. La Poste, aujourd’hui établissement de droit public, sera transformée en société anonyme de droit public dont la Confédération sera obligatoirement l’actionnaire majoritaire. Les réactions n’ont pas tardé. Le PS, les Verts et le Syndicat de la communication ont répété leur opposition à toute libéralisation, tandis que les partis bourgeois ont fait part de leur satisfaction, PRD et UDC appelant même à accélérer le processus d’ouverture. Du côté de l’ancienne régie, on s’est dit prêt à la poursuite de la libéralisation [65].
A l’automne, une polémique a éclaté au sujet des coûts réels du service universel. En cause, la non publication par le DETEC d’un rapport des consultants BDO Visura et Wik-Consult sur le modèle comptable de la Poste qui relève que les charges des bureaux de poste pourraient avoir été surévaluées. Le directeur de la Poste, Ulrich Gygi, a toujours insisté sur le fait que l’entretien du réseau postal (environ 400 millions de francs) devait être financé grâce au monopole sur les lettres jusqu’à 100 grammes. Pour les partis bourgeois et Economiesuisse, si ce coût est moindre, il ne peut plus justifier les précautions avec lesquelles le Conseil fédéral a planifié la libéralisation du marché postal. À l’inverse, la gauche et les syndicats dénoncent une manipulation de la Poste pour justifier la fermeture de 1150 bureaux de postes. Pour faire toute la lumière sur cette affaire, la CTT-CN a demandé et reçu ledit rapport. En décembre, le chef du DETEC a présenté une étude approfondie sur les répercussions de l’ouverture du marché postal. Censée servir de référence dans la révision de la législation postale, cette étude prospective montre que le financement du service universel peut être garanti par le monopole sur les lettres de moins de 50 grammes. En cas de libéralisation complète, le maintien des prestations excédant les exigences légales minimales et des conditions de travail actuelles de la Poste nécessiterait une compensation financière de l’Etat. Sans contribution étatique, la Poste pourrait seulement financer les prestations minimales prévues dans la loi [66].
En 2007, La Poste a bouclé son bilan avec un bénéfice consolidé de 909 millions de francs. En progression de 10,3% par rapport à 2006, les produits d’exploitation s’établissent à 8,712 milliards de francs. Cet excellent résultat provient principalement de la croissance de PostFinance (+350 millions de francs de chiffre d’affaires) et de l’intégration du groupe GHP à l’unité Clients stratégiques et solutions (+296 millions). Toutes les unités proposant des produits ont contribué, à des degrés divers, au bénéfice consolidé. Les frais dûs à la mise en service des nouveaux centres de tri du courrier (projet REMA) ont toutefois occasionné une baisse du résultat d’exploitation de PostMail (236 millions de francs contre 383 en 2006). PostLogistics et Swiss Post International ont aussi enregistré un recul de leur résultat, en raison de l’accroissement des coûts respectivement dans le secteur du dépôt et de la distribution et dans celui de l’exportation (frais de transport). CarPostal et, surtout, PostFinance ont par contre accrû leur marge bénéficiaire. Le transport des voyageurs affiche un excédent de recettes de 32 millions de francs (2006: 28 millions), tandis que PostFinance établit un nouveau record avec un résultat d’exploitation de 318 millions de francs (2006: 245 millions). Grâce au bénéfice réalisé, La Poste entend augmenter ses fonds propres, assainir sa caisse de pension et, pour la première fois, redistribuer une partie du bénéfice à la Confédération (250 millions de francs) [67].
 
[60] LT, 27.2.07. Cf. APS 2006, p. 155 s.
[61] NZZ et TA, 21.3.07; Lib., 24.3.07 (Ulrich Gygi).
[62] Presse du 5.4.07.
[63] BO CN, 2007, p. 576.
[64] BO CN, 2007, p. 573; BO CE, 2007, p. 939.
[65] Presse du 22.9.07. Cf. APS 2006, p. 155.
[66] Presse des 17.10, 10.11 et 20.12.07 (étude); DETEC, communiqué de presse, 19.12.07.
[67] Presse du 20.3.08. Concernant l’acquisition du groupe GHP, cf. APS 2006, p. 156.