Année politique Suisse 2008 : Infrastructure, aménagement, environnement / Energie / Politique énergétique
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Mesures destinées à réduire la consommation
À l’instar de l’année précédente, le parlement a poursuivi ses travaux sur la problématique de l’efficacité énergétique. La presse a interprété cet investissement comme une marque de soutien à Moritz Leuenberger et à son plan d’action dans ce domaine. Les parlementaires ont d’abord débattu de mesures visant à améliorer l’information des consommateurs. Ils ont ainsi décidé d’étendre le champ d’application de l’étiquette Energie aux installations électriques, véhicules et appareils non soumis à un régime harmonisé de l’Union européenne. Les chambres ont transmis au Conseil fédéral une motion en ce sens déposée par la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil des Etats (CEATE-CE), malgré le préavis contraire de la CEATE-CN, laquelle a critiqué le caractère superflu et redondant de cette proposition, puisqu’elle figure déjà dans les plans d’action « efficacité énergétique » et « énergies renouvelables » adoptés par le gouvernement fin février (cf. supra) [7].
Les chambres ont en outre transmis au Conseil fédéral une deuxième motion de la CEATE-CE visant à introduire un certificat énergétique pour les bâtiments. Obligatoire dans la version adoptée par le Conseil des Etats, cette nouvelle étiquette Energie est cependant devenue facultative à l’initiative de la CEATE-CN, qui a ainsi voulu éviter des complications lors d’assainissements importants ou de transferts d’immeubles, par exemple. La chambre des cantons s’est ralliée à celle du peuple, non sans avoir exprimé une certaine déception vis-à-vis de ce « pas en arrière ». Enfin, le Conseil national a refusé, par 99 voix contre 67, de créer une base légale obligeant les publicités pour des appareils et véhicules à indiquer clairement la consommation énergétique de ces derniers, comme le demandait une initiative parlementaire Teuscher (pe, BE) [8].
Le parlement a également débattu de mesures concernant les prescriptions de consommation. Il a ainsi transmis une motion de la CEATE-CN visant à simplifier la procédure de définition de valeurs-cibles. Par une modification de la loi sur l’énergie (LEn), les chambres veulent généraliser l’objectif de réduction de la consommation à l’ensemble des installations, véhicules et appareils produits en série, et non plus seulement à ceux gourmands en énergie. La motion prévoit en outre l’application de ces prescriptions dès la procédure de mise sur le marché, sans obligation de négocier préalablement avec les acteurs de la branche concernée. Enfin, les dispositions d’application porteront non seulement sur l’efficacité en mode utilisation, mais également sur les pertes en mode veille [9].
Les chambres ont aussi chargé le Conseil fédéral d’édicter des prescriptions de consommation pour les appareils ménagers et de bureau, les sources lumineuses, les moteurs électriques standard et les installations techniques des bâtiments. Elles ont approuvé une motion en ce sens émanant de la CEATE-CE. Ces prescriptions sont censées garantir que seuls les appareils présentant une efficacité énergétique conforme à l’état de la technique puissent être mis sur le marché. Le Conseil des Etats a cependant refusé de confier au gouvernement le mandat d’édicter des prescriptions dans le domaine du bâtiment comme le demandait une motion Teuscher (pe, BE) approuvée par la chambre basse l’année précédente. Le plénum a ainsi suivi l’avis de sa CEATE, laquelle a rappelé que, selon l’art. 89 al. 4 de la Constitution fédérale, l’édiction de normes en ce domaine relève de la compétence exclusive des cantons [10].
Enfin, le parlement a débattu des propositions d’incitations à destination des privés. Le Conseil des Etats a approuvé, par 26 voix contre 7, une motion Simonetta Sommaruga (ps, BE) visant à encourager les propriétaires à améliorer le rendement énergétique de leurs bâtiments par une meilleure information, par des incitations fiscales, ainsi que par l’affectation d’une partie du produit de la taxe sur le CO2. La chambre haute a en outre traité les motions en cette matière adoptées par le Conseil national l’année précédente. Elle a ainsi adopté la motion Leutenegger (prd, ZH) visant à modifier l’ordonnance sur la déduction des frais relatifs aux immeubles privés dans le cadre de l’impôt fédéral direct pour permettre une répartition de l’investissement déductible sur plusieurs années (une seule actuellement). Sur proposition de sa CEATE et à la demande du Conseil fédéral, elle l’a cependant transformée en mandat d’examen, de sorte qu’elle soit examinée dans le contexte plus large des mesures de performance énergétique. Elle a fait de même avec la motion du groupe démocrate-chrétien du Conseil national visant à réviser la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID) pour exonérer de l’impôt le capital épargné destiné à financer des assainissements améliorant l’efficacité énergétique des immeubles. Le Conseil fédéral a reçu le mandat d’examiner et de faire rapport sur l’opportunité d’une telle révision de la LHID. Dans les deux cas, la CEATE-CE a rappelé que, depuis le dépôt et l’adoption de ces motions par le Conseil national, le DETEC a présenté un plan d’action et qu’un programme de mesures concrètes était en préparation. Elle a également souligné que les déductions existantes entraînent une complexification excessive du système fiscal et que ces incitations ne sont ni efficaces, ni efficientes. Le Conseil des Etats a en outre rejeté une motion Müller (prd, AG) allant dans le même sens, au motif qu’elle aurait permis de déduire un montant supérieur à l’investissement consenti pour la rénovation [11].
À l’automne, la CEATE-CE a mis en consultation son avant-projet de loi concrétisant l’initiative cantonale déposée par le canton de Berne en 2005, laquelle proposait d’introduire au niveau fédéral un système de bonus/malus à l’importation destiné à promouvoir les véhicules à moteur les plus efficients sur le plan énergétique et les plus respectueux de l’environnement. Elle a en outre obtenu du plénum la prorogation du délai de deux ans prévu par la loi sur le parlement et devra présenter son projet d’ici à la session d’hiver 2010. Contrairement à la chambre du peuple l’année précédente, le Conseil des Etats a rejeté la motion Donzé (pev, BE) visant à inciter les cantons à prendre en compte la consommation dans le calcul de l’impôt cantonal sur les véhicules, afin de promouvoir les véhicules à faible consommation. Le plénum a suivi sa CEATE, qui a rappelé que le Conseil fédéral ne peut pas intervenir dans ce domaine de la stricte compétence des cantons. La CEATE-CN a pour sa part obtenu du plénum la prorogation jusqu’à l’été 2010 du délai imparti pour lui présenter un projet de loi modifiant la loi sur le CO2, pour y introduire des incitations en faveur de mesures d’économie d’énergie dans le bâtiment, conformément au mandat défini dans l’initiative parlementaire Hegetschweiler (prd, ZH) [12].
Toujours dans le domaine de la construction, les chambres ont approuvé une motion de la CEATE-CN chargeant le Conseil fédéral de présenter un catalogue de mesures en faveur de l’utilisation des énergies renouvelables pour la production de chaleur, notamment lors de rénovations. Le Conseil national a également adopté une motion Chevrier (pdc, VS) visant à introduire des aides financières destinées à l’assainissement thermique du parc immobilier suisse. Financées paritairement par les cantons et la Confédération, ces aides prendront notamment la forme d’avances remboursables sans intérêts. Enfin, la chambre des cantons a rejeté la motion Bäumle (verts libéraux, ZH) adoptée par le Conseil national l’année précédente. Les sénateurs ont en effet jugé excessivement coûteux le soutien financier proposé pour la construction et la transformation de bâtiments selon les standards Minergie et Minergie-P [13].
Parallèlement aux travaux de l’Assemblée fédérale, la Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie a adopté des prescriptions plus strictes pour les bâtiments. La consommation maximale pour la production d’eau chaude est désormais fixée à 4,8 litres d’équivalent à l’huile de chauffage pour les bâtiments neufs et à 9 litres pour ceux assainis. Un certificat énergétique unique et facultatif sera en outre introduit dans tous les cantons au cours de l’année 2009. Ces mesures complètent le programme de soutien à l’assainissement énergétique des bâtiments. Par cette stratégie d’ensemble, les cantons espèrent atteindre une efficacité similaire à celle du programme fédéral SuisseEnergie, soit une réduction de la consommation de l’ordre de 4 milliards de kWh ou des 350 000 tonnes d’équivalent à l’huile de chauffage (1,5% de la consommation totale annuelle en Suisse). La Conférence a en outre exprimé sa volonté de financer l’assainissement des bâtiments par une hausse du « centime climatique » de 1,5 à 1,99 centimes par litre d’essence [14].
 
[7] BO CN, 2008, p. 558 s.; BO CE, 2008, p. 138 s.; presse du 28.5.08.
[8] BO CN, 2008, p. 556 s. et 1068 s. (Teuscher); BO CE, 2008, p. 129 ss. et 1012 s.
[9] BO CN, 2008, p. 551 s. et 558; BO CE, 2008, p. 1011 s.
[10] BO CE, 2008, p. 137 s. et 140 (Teuscher); BO CN, 2008, p. 553 s. Cf. APS 2007, p. 155.
[11] BO CE, 2008, p. 468 ss. (PDC et Müller), 686 s. (Leutenegger), 1013 ss. (Sommaruga) et Annexes III, p. 62 ss. (CEATE-CE). Voir également supra, partie I, 5 (Indirekte Steuern) et infra, partie I, 6c (Wohnen). Concernant les motions Leutenegger, Müller et PDC, cf. APS 2007, p. 142, 156 et 190 s. Selon les définitions retenues par le CF, une mesure (par ex. une incitation fiscale) est efficace, dans la mesure où elle permet de résoudre (au moins partiellement) le problème identifié. Elle est dite efficiente si son efficacité est plus grande que celle d’autres instruments politiques.
[12] FF, 2008, p. 8011 (consultation); BO CE, 2008, p. 144 s. (Donzé), 1015 (Berne) et Annexes V, p. 10 (CEATE-CE); BO CN, 2008, p. 1002 (CEATE-CN). Cf. APS 2007, p. 156.
[13] BO CN, 2008, p. 560 et 1749 (Chevrier); BO CE, 2008, p. 139 s. (Bäumle) et 1010 s. Cf. APS 2007, p. 155 s.
[14] NZZ, 10.4.08 (prescriptions); LT, 26.8.08 (financement).