Année politique Suisse 2010 : Chronique générale / Défense nationale / Organisation militaire
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Armée
Le Conseil des Etats a transmis une motion Eichenberger-Walther (plr, AG) demandant au gouvernement de mettre en place des mesures plus exigeantes en matière de non-recrutement ou d’exclusion de l’armée. Le Conseil national a par contre rejeté son initiative parlementaire visant à mieux repérer les délinquants mineurs lors du recrutement [13].
Le Conseil des Etats a adopté tacitement deux motions identiques de Felix Gutzwiller (plr, ZH) et d’Urs Schwaller (pdc, FR) chargeant le Conseil fédéral de présenter un plan de mesures visant à remédier aux carences observées au sein de l’armée avec les moyens à disposition. Ce plan doit notamment proposer de nouveaux modèles de services militaires plus économiques. Les motionnaires répondent ainsi au chef du DDPS qu’ils accusent de se plaindre de ne pas avoir assez d’argent sans faire de proposition concrète. En mai, le PLR a appuyé cette offensive contre Ueli Maurer en l’accusant de jouer un jeu de provocation et de faire des propositions hâtives au lieu de faire un travail consciencieux. Le Conseil national a également décidé de transmettre les deux motions [14].
Au mois d’octobre, après plusieurs reports, le Conseil fédéral a présenté son message concernant le rapport sur l’armée 2010 faisant suite au rapport sur la politique de sécurité (voir supra). Au niveau des principes de base, le gouvernement souhaite maintenir ceux de neutralité, de milice ainsi que d’obligation générale de servir. S’il relève que l’armée a répondu à tous ses engagements, il constate une insuffisance de personnel pour l’instruction de base et l’entretien du matériel ainsi que des problèmes infrastructurels. Il souligne également que le financement est insuffisant et ne correspond plus aux prestations que l’armée doit fournir. Toutefois, il considère comme possible de stabiliser les besoins financiers autours de 4,4 milliards de francs par an et de garantir des finances équilibrées grâce à des économies massives. Le gouvernement a donné une année au DDPS pour faire des propositions de rééquilibrage. Le Conseil fédéral a encore estimé qu’au vu des menaces et des dangers, l’armée doit maintenir le développement de la défense comme compétence clé et collaborer à l’intérieur ainsi qu’à l’extérieur du pays. Aussi, il a jugé pertinent de continuer d’orienter la défense vers une mission de protection globale et d’élever le nombre et la qualité des engagements de promotion de la paix. Du reste, le Conseil fédéral a décidé de diminuer les effectifs à 80 000 soldats. Les troupes consacrées à la défense traditionnelle du territoire doivent ainsi être réduites à 22 000 militaires de réserve opérationnelle, celles de soutien aux autorités civiles à 35 000, et celles assumant des tâches de renseignements, d’aide électronique au commandement et de service de santé à 22 000 spécialistes. Les troupes engagées à l’étranger ont encore été limitées à un maximum de 1000 militaires.
L’UDC a considéré le rapport comme une menace pour la défense nationale. Elle a rejeté le texte et exigé une armée de 120 000 hommes, dont 40% intégrés aux troupes de combat, ainsi que la fin des engagements à l’étranger. Elle a également estimé que l’armée ne doit s’occuper que de défense territoriale et mieux cibler ses moyens. Elle a été soutenue dans ce sens par le groupe Giardino créé par des hauts gradés principalement retraités et proches des thèses de l’UDC. Il s’oppose à la réduction des effectifs et des moyens de l’armée, et envisage de lancer une initiative populaire inscrivant l’armée de milice dans la Constitution. Si les verts ont critiqué le rapport, le PS, le PDC ainsi que le PBD l’ont plutôt bien accueilli tandis que le PLR a un avis partagé. Lors du traitement du rapport en fin d’année, la CPS-CE a exigé unanimement l’élaboration de rapports complémentaires sur les coûts, les structures, les profils de prestations et les priorités d’engagement pour quatre variantes de l’armée comprenant respectivement 60 000, 80 000, 100 000 ou 120 000 militaires. Au demeurant, elle souhaite également un positionnement plus clair au niveau international et l’examen du remplacement des avions de combat.
A la suite de cette publication, Ueli Maurer a présenté un mandat d’économie pour le chef de l’armée proposant de réduire d’un quart le personnel du DDPS, de supprimer un tiers des places d’armes, de réduire le nombre de chars d’assaut et de pièces d’artillerie blindée et de supprimer l’artillerie de forteresse. [15].
Le GSsA a lancé une initiative populaire « Oui à l’abrogation du service militaire obligatoire ». Le contexte a été considéré comme favorable au vu des atermoiements de la politique nationale de sécurité et de la publication prochaine du rapport sur l’armée [16].
Le Conseil des Etats a transmis un postulat Konrad Graber (udc, LU) qui invite le gouvernement à énumérer les dysfonctionnements de l’armée qui ne seraient pas supprimés par le rapport sur la sécurité. Il demande également de déterminer les modifications à apporter ainsi que les scenarii permettant à l’armée de remplir sa mission sans augmentation de budget et tout en maintenant l’obligation de servir. Le conseiller aux Etats a effectivement estimé qu’il y a un manque de volonté politique pour résoudre les problèmes rencontrés [17].
 
[13] BO CE, 2010, p. 248; BO CN, 2010, p. 1124. Voir APS 2009, p. 88.
[14] BO CE, 2010, p. 249 ss.; BO CN, 2010, p. 1270 ss.; TG, 17.3.10; LT, 26.5.10.
[15] FF, 2010, p. 8109 ss.; NZZ, 25.9, 2.10, 5.10, 6.10 et 20.11.10 (CPS-CE); LT, 2.10, 11.11 et 23.11.10 (mesures d’économie); TG, 23.11.10 (mesures d’économie).
[16] FF, 2010, 4005 ss.; NZZ, 19.4.10; presse du 6.7.10.
[17] BO CE, 2010, p. 550 ss.