Année politique Suisse 2010 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Politique des transports
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Coûts et financement
Lors de l’examen des projets d’arrêtés relatifs aux programmes d’agglomération et au programme d’élimination des goulets d’étranglement (cf. infra), la CTT-CE a constaté que le fonds d’infrastructure ne disposait pas des ressources nécessaires. Aussi a-t-elle présenté une initiative parlementaire en faveur du versement d’une contribution extraordinaire de 850 millions de francs au fonds d’infrastructure, de telle sorte qu’il puisse remplir ses engagements sans que les projets ne soient retardés et, si possible, sans recours au préfinancement par les cantons. Ce montant est prélevé sur le financement spécial pour la circulation routière (FSCR). Cette modification de la loi fédérale sur le fonds d’infrastructure (LFInfr) n’apporte cependant qu’une solution provisoire, la CTT-CE estimant en effet qu’un nouvel apport sera nécessaire dès 2014.
Le Conseil fédéral a émis un avis favorable sur le projet de la CTT-CE, tout en mettant en garde contre ses conséquences potentiellement négatives pour les finances de la Confédération. En vertu du mécanisme de frein à l’endettement, cette contribution extraordinaire doit en effet être compensée par des excédents structurels du budget fédéral, c’est-à-dire des mesures d’économie d’un montant correspondant. En outre, le prélèvement sur le FSCR nécessitera probablement une hausse anticipée de l’impôt sur les huiles minérales. À ces réserves près, le gouvernement a jugé que la proposition de la CTT-CE constituait la solution la plus opportune pour permettre au fonds de verser aux cantons la contribution que la Confédération s’est engagée à leur fournir.
Au Conseil des Etats, l’entrée en matière n’a pas suscité d’opposition. Lors de la discussion par article, une minorité de la CTT emmenée par Hans Hess (plr, OW) a proposé de ramener le montant de la contribution extraordinaire à 570 millions de francs, craignant que les autres projets en matière de transports (notamment l’achèvement du réseau des routes nationales et les routes principales des régions périphériques et de montagne) ne pâtissent de ce soutien aux programmes d’agglomération et d’élimination des goulets d’étranglement. Par 23 voix contre 13, les sénateurs ont préféré suivre la majorité de la commission. Au vote sur l’ensemble, ils ont adopté cette modification de la LFInfr à l’unanimité.
Au Conseil national, une minorité Gabi Huber (plr, UR) de la CTT-CN a présenté une proposition identique à celle défendue par la minorité Hess à la chambre des cantons. Malgré le soutien d’une majorité du groupe UDC et de la moitié du groupe PLR, cet amendement a été rejeté par 116 voix contre 57. Au vote sur l’ensemble, la chambre du peuple a approuvé le projet de la CTT-CE par 153 voix contre 23. En votation finale, les deux chambres ont confirmé leur décision, respectivement à l’unanimité et par 179 voix contre 6 [7].
Lors des entretiens de Watteville, à l’automne, les partis gouvernementaux ont convenu de l’objectif à long terme d’instaurer une taxation de la mobilité (« Mobility Pricing ») afin de financer l’entretien et le développement des infrastructures de transports. Une contribution accrue des usagers est notamment privilégiée par rapport aux diverses taxes et fonds dont dépendent la route, le rail et l’aviation actuellement et qui forment un système jugé excessivement complexe. Des propositions en ce sens sont attendues du Conseil fédéral dès 2011 et le message concernant Rail 2030 (cf. infra) [8].
Economiesuisse a plaidé pour une réforme globale du système de financement des transports routiers et ferroviaires. L’association faîtière du patronat a fustigé le régime actuel et ses diverses taxes, en raison de sa complexité et de son manque de transparence. Elle a préconisé de le remplacer par une nouvelle tarification des différents modes de transports en fonction du principe de causalité, c’est-à-dire mettant plus fortement à contribution les usagers. Dans la perspective du remplacement de Moritz Leuenberger à la tête du DETEC, economiesuisse a par ailleurs clairement exprimé, à plusieurs reprises, son souhait que le successeur du socialiste accorde plus d’attention aux besoins de l’économie, accusant au passage ce dernier d’avoir privilégié le rail au détriment de la route et de l’aviation par idéologie [9].
À l’automne, l’initiative populaire fédérale « pour les transports publics », lancée l’année précédente par l’ATE, avec le soutien du PS, des Verts, des Verts libéraux et du parti évangélique, a abouti. Elle propose une réforme de la répartition du produit des taxes routières (vignette autoroutière exceptée) afin d’en attribuer la moitié aux transports publics, contre un quart actuellement. L’ATE a estimé qu’un montant de 800 millions de francs par an pourrait ainsi être investi pour développer l’offre des transports publics. L’USAM et le TCS ont réaffirmé leur rejet catégorique du texte, au motif qu’il induirait une hausse insupportable des taxes sur les carburants [10].
Sur préavis favorable du Conseil fédéral, la chambre des cantons a adopté tacitement un postulat Bieri (pdc, ZG) chargeant le gouvernement d’étudier les moyens d’améliorer la transparence du système de prix des transports publics et la possibilité d’instaurer une billetterie électronique [11].
Dans le cadre du programme de consolidation des finances fédérales, le Conseil fédéral a annoncé, en début d’année, des coupes dans les subventions de la Confédération pour les lignes régionales de transports publics effectives dès le budget 2011. À compter de 2011, seules les lignes comptant au minimum 100 passagers par jour continueront de bénéficier du soutien fédéral, alors que la limite minimale était jusque là fixée à 32 passagers en moyenne par jour. Cette mesure doit permettre d’alléger les charges de l’Etat fédéral de quelque 15 millions de francs par an. Les cantons, l’Union des villes suisses et l’ATE ont vigoureusement réagi, dénonçant un transfert de charges et rappelant les engagements pris par la Confédération lors des négociations concernant la nouvelle répartition des tâches (RPT). L’ATE a estimé que près de 160 lignes régionales étaient menacées par cette mesure d’économie. Lancée par diverses associations et soutenue par des parlementaires écologistes et socialistes, une pétition munie de 34 000 signatures a été adressée au Conseil fédéral pour qu’il revienne sur sa décision. Face à cette levée de boucliers, le gouvernement a finalement renoncé en fin d’année à ces mesures d’économie [12].
En début d’année, l’Union des transports publics (UTP) a annoncé une hausse de 6,4% en moyenne des tarifs des transports publics à partir du 12 décembre de l’année sous revue. Cette hausse est particulièrement forte pour l’abonnement demi-tarif et les cartes journalières. L’UTP et les CFF l’ont justifiée par l’augmentation de l’offre et des coûts y relatifs en personnel et en énergie, ainsi que par l’ampleur des investissements à venir en matière de matériel roulant (20 milliards de francs d’ici à 2030). Afin de décharger les trains transportant les pendulaires vers leur lieu de travail, l’UTP et les CFF ont en outre décidé de restreindre la validité des cartes journalières proposées par les communes. À compter de l’entrée en vigueur de l’horaire 2011, les titulaires de ces cartes ne pourront plus voyager en bus et en train avant 9 heures du matin du lundi au vendredi. L’annonce de cette décision a suscité un véritable tollé auprès des communes. La hausse des prix a quant à elle essuyé les critiques des organisations de défense des consommateurs (FRC), qui l’ont jugée très préjudiciable pour le pouvoir d’achat. Au terme de six mois de négociations entre l’UTP et le surveillant des prix, la hausse des prix a été ramenée à 5,9%. La hausse des billets et abonnements de parcours a ainsi été abaissée de 3,4 à 2,4%. L’augmentation des tarifs des abonnements général (+6,7% en moyenne) et demi-tarif (+10-20% selon la durée de validité) a par contre été maintenue. Si le renchérissement des cartes journalières demeure tel que souhaité par les CFF, ces derniers ont toutefois renoncé à restreindre la validité des cartes proposées par les communes. Le surveillant des prix a par ailleurs obtenu de l’UTP et des CFF la publication de données concernant le système de prix afin d’en améliorer la transparence [13].
 
[7] FF, 2010, p. 3099 ss. (CTT-CE) et 3111 ss. (CF); BO CE, 2010, p. 677 ss., 689 ss. et 1012; BO CN, 2010, p. 1408 ss., 1417 ss. et 1677; FF, 2010, p. 5977 ss.
[8] LT, 13.11.10.
[9] LT et, SZ, 30.6.10; SoS, 10.7.10; NZZ, 13.8.10.
[10] FF, 2010, p. 6049 s.; presse du 7.9.10. Cf. APS 2009, p. 155 s.
[11] BO CE, 2010, p. 1325.
[12] SoS, 26.2.10; NZZ, 27.2.10; Exp. et Lib., 4.3.10; 24h, 5.3.10; Lib. et SGT, 6.3.10; QJ, 16.3.10; LT, 22.3.10; presse du 13.8.10 (ATE); NF et SoS, 25.8.10 (pétition); NZZ et TA, 27.8.10 (UVS); presse du 10.11.10.
[13] Presse des 15 et 16.1, du 5.3, du 23.4 (communes) et du 5.8.10.