Année politique Suisse 2010 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Chemin de fer
Les CFF ont annoncé la création par
CFF Cargo et Hupac d’une société commune pour le trafic alpin de marchandises entre l’Allemagne et l’Italie, baptisée SBB Cargo International. Les deux entreprises suisses entendent par là unir leurs forces face à la concurrence croissante des compagnies étrangères actives sur l’axe nord-sud, notamment dans la perspective de l’ouverture du tunnel de base du Gothard. Selon les deux parties, la nouvelle entreprise, forte de 480 emplois, aura l’avantage de bénéficier à la fois du savoir-faire ferroviaire de CFF Cargo et de l’expérience d’Hupac en matière de transport combiné. La filiale de l’ancienne régie espère ainsi réduire ses frais structurels de moitié et accroître sa productivité en se concentrant sur le trafic national. Ce transfert des activités internationales de CFF Cargo entraînera la suppression de 157 emplois au sein de celle-ci d’ici à 2013, mais sans licenciement, a assuré le directeur de CFF Cargo, Nicolas Perrin
[63].
Le Tribunal fédéral a finalement donné raison à l’OFT dans l’affaire du passager muni d’un billet de 2e classe mais circulant en 1ère classe. Les CFF ne peuvent pas infliger une sanction identique à un passager circulant sans billet et à un autre circulant avec un billet pour une prestation de valeur inférieure et doivent instituer un
système de sanction différencié afin de respecter le principe d’égalité garanti par la Constitution fédérale. En fin d’année, l’UTP a annoncé l’instauration d’un nouveau régime de sanction. À compter de juin 2011, les resquilleurs devront s’acquitter d’une amende de 100 francs, tandis que les voyageurs en possession d’un billet insuffisant devront payer un supplément de 75 francs
[64].
Au terme d’âpres négociations, les CFF et les organisations du personnel ont conclu une
nouvelle convention collective de travail réformant totalement le système salarial de l’ancienne régie. En lieu et place d’un régime à 29 classes de salaires récompensant l’ancienneté à travers une progression automatique, le nouveau système se fonde principalement sur les exigences des postes de travail, les prestations individuelles des collaborateurs et les conditions du marché pour fixer la rémunération. Cette réforme, en particulier la généralisation du salaire au mérite, vise à accroître la productivité et la compétitivité de l’entreprise
[65].
Le tribunal arbitral a tranché le litige entre la direction des CFF et les syndicats au sujet des
négociations salariales pour 2010, en décidant une hausse de 0,5% de la masse salariale et l’octroi d’une prime unique de 650 francs par collaborateur au titre de gratification pour le bon exercice 2009. Les syndicats, qui réclamaient une augmentation compensant au minimum le renchérissement, ont fait part de leur déception
[66].
Les CFF ont conclu le
« contrat du siècle » avec la firme Bombardier pour la livraison de 59 rames de train à deux niveaux pour un montant de 1,9 milliard de francs. L’annonce du choix de l’entreprise canadienne, au détriment de l’allemande Siemens et de la suisse Stadler Rail, a suscité une brève polémique, initiée par le conseiller national Peter Spuhler (udc, TG), par ailleurs patron de Stadler Rail, lequel a dénoncé une décision contraire aux intérêts de l’économie suisse et exprimé des doutes sur le prix relativement bas proposé par Bombardier (de 200 millions de francs inférieur aux offres de Siemens et Stadler). Stadler et Siemens ont toutefois décidé de ne pas recourir contre la décision des CFF
[67].
Le TAF a enjoint les CFF de respecter la loi fédérale sur le travail en ramenant le
temps de travail quotidien moyen de leurs collaborateurs à 9 heures au maximum. La direction de l’ancienne régie n’avait jusque là appliqué cette règle qu’aux employés travaillant par série de 7 jours consécutifs sans congé. Donnant raison à l’OFT, les juges ont rappelé la validité générale de la limite légale de la durée quotidienne moyenne du travail
[68].
L’annonce, à quelques jours d’intervalle, des démissions de Jürg Schmid et Thomas Remund, respectivement directeur de la division voyageurs et responsable des finances des CFF, a suscité passablement de commentaires et d’interrogations dans la presse comme au parlement. Six cadres supérieurs ont en effet quitté la
direction du groupe depuis l’accession de Andreas Meyer à la direction générale exécutive, en 2007. La presse a évoqué la manière relativement brutale avec laquelle Meyer assume la conduite du groupe et la faible marge de manœuvre laissée aux directeurs de division pour expliquer ces départs. Interpellé par la conseillère nationale Chiara Simoneschi-Cortesi (pdc, TI), le Conseil fédéral a tout d’abord souligné les causes fort diverses de ces démissions avant de rappeler que leur nombre n’a rien d’inhabituel s’agissant d’une entreprise confrontée à des défis importants, comme le sont les CFF actuellement. En tant que propriétaire, il a par ailleurs exclu toute intervention dans la politique du groupe en matière de recrutement du personnel dirigeant, cette compétence incombant au Conseil d’administration
[69].
Le Conseil fédéral a adopté le message sur la modification de la loi fédérale sur les Chemins de fer fédéraux (LCFF) relative l’assainissement de la caisse de pension des CFF (CP CFF). Conformément à ce qu’il avait annoncé au terme de la consultation, l’année précédente, le gouvernement propose que la Confédération contribue à l’assainissement à hauteur de 1,148 milliard de francs. Ce montant couvre les surcoûts liés aux prestations vieillesse versées jusqu’en 2006, lors du passage du système de primauté des prestations à celui de primauté des cotisations, ainsi que les pertes générées par l’abaissement du taux d’intérêt technique de 4% à 3,5%. Il ne permettra pas à lui seul de redresser le taux de couverture de la CP CFF, qui s’élevait à 84,4% à fin 2009. C’est pourquoi le conseil de fondation de la caisse et la direction des CFF ont annoncé, en 2009 déjà, des mesures complémentaires consistant en une participation substantielle des CFF (1,32 milliard) et de leur personnel (1,22 milliard), de sorte à retrouver une couverture complète d’ici à 2019.
Lors de la session d’hiver, le
Conseil des Etats est entré en matière sur cette modification de la LCFF. Lors de la discussion par article, une minorité Stähelin (pdc, TG) a proposé d’introduire une disposition excluant explicitement la possibilité pour les institutions de prévoyance d’autres entreprises concessionnaires de solliciter une contribution similaire de la part de la Confédération. Jugeant inutile cette précision, dans la mesure où la LCFF ne concerne en aucune manière ces autres entreprises, les sénateurs ont rejeté, par 26 voix contre 15, cette proposition d’amendement et adopté, sans autre débat et à l’unanimité, la loi telle que présentée par le Conseil fédéral
[70].
Pour la cinquième année consécutive, les CFF ont réalisé un
exercice bénéficiaire en 2010 avec un excédent de recettes de 298,3 millions de francs (2009: 369,8
millions). Ce bénéfice est principalement imputable aux bons résultats des segments voyageurs et immobilier. Le nombre de voyageurs a crû de 6% pour s’établir à 347,1 millions (2009: 327,5 millions) et le nombre de voyageurs-kilomètres parcourus a augmenté de 5% à 17,5 milliards (2009: 16,677 milliards). Le résultat net du segment voyageurs a une nouvelle fois progressé pour s’établir à 292,6 millions de francs contre 280,6 millions en 2009. Bien que, contrairement à l’année précédente, les CFF n’aient pas réalisé de ventes immobilières majeures en 2010, le segment immobilier a dégagé un résultat d’exploitation de 246,7 millions de francs (2009 : 361,9 millions). Après versement des indemnités compensatoires au segment infrastructure (150 millions de francs) et paiement des intérêts et mensualités de remboursement du prêt accordé par le groupe CFF pour l’assainissement de la caisse de pension (79,2 millions de francs), le résultat du segment immobilier a régressé de 46,4% pour atteindre 3,3 millions de francs (2009: 6,2 millions). En dépit de la hausse de sa prestation de transport, le trafic des marchandises est demeuré nettement déficitaire avec un résultat de -64 millions de francs (2009: -62,5 millions), notamment en raison de la faiblesse de l’euro. CFF Cargo a pourtant enregistré une hausse de ses prestations de 12,3% pour atteindre 13 milliards de tonnes-kilomètres nettes (2009: 11,67 milliards). La direction du groupe a rappelé son objectif d’un résultat équilibré à moyen terme grâce à la réorientation stratégique en cours depuis 2009. La dette du groupe s’est par ailleurs une nouvelle fois péjorée de 763,2 millions de francs pour s’inscrire à 8,068 milliards de francs (2009 : 7,304 milliards). Cela résulte particulièrement d’investissements à hauteur de 965,8 millions pour le renouvellement du matériel roulant et de la contribution du groupe à l’assainissement de la CP CFF pour un montant de 938 millions de francs. Enfin, après la perte de 6,5 millions enregistrée l’année précédente, le segment infrastructure a retrouvé les chiffres noirs, affichant un bénéfice de 4,8 millions de francs
[71].
[63] Presse du 5.2 et du 6.7.10. Cf.
APS 2009, p. 165.
[64] Presse du 9.9 (TF) et du 11.11.10 (UTP). Cf.
APS 2009, p. 164 s.
[65]
AZ,
NZZ,
QJ et
TG, 27.11.10.
[67] Presse du 31.3, du 14.5 (décision), du 28.5 (Stadler) et du 2.6.10 (Siemens).
[69]
BO CN, 2010, p. 785; presse du 27.5 au 5.6.10.
[70]
FF, 2010, p. 2295 ss.;
BO CE, 2010, p. 1145 ss. Cf.
APS 2009, p. 165 s.
[71] Presse du 31.3.11. CFF,
communiqué de presse, 30.3.11. Cf.
APS 2009, p. 166 s.
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