Année politique Suisse 2010 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications / Poste et télécommunications
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Télécommunications
Le Conseil fédéral a présenté le rapport sur la libéralisation du marché des télécommunications en réponse au postulat de la CTT-CE que lui avait transmis le Conseil des Etats l’année précédente. L’analyse de la mise en œuvre de la révision de la loi sur les télécommunications (LTC) a conclu que le pays était bien desservi notamment grâce aux prestations de base fournies à travers le service universel. Le gouvernement a estimé que l’ouverture du marché a produit d’excellents résultats dans le domaine de la téléphonie fixe. Il s’est en outre réjoui de l’actuelle dynamique d’investissements en faveur de l’extension du réseau à fibre optique (cf. infra). Il s’est par contre montré insatisfait de l’évolution des marchés de la téléphonie mobile et des connexions à large bande sur les réseaux fixes, dont les niveaux de prix sont jugés excessifs en comparaison européenne. Afin d’y remédier, plusieurs options ont été évoquées, notamment l’extension du droit de co-utilisation des réseaux de l’opérateur historique, actuellement limité au réseau de lignes en fil de cuivre. L’opportunité d’octroyer à la Commission de la communication (Comcom) la compétence d’intervenir d’office est également envisagée. Par ailleurs, la complexification du marché résultant du progrès technologique exige une meilleure protection des consommateurs et des mineurs, exposés à de nouvelles pratiques abusives ou indésirables de la part de fournisseurs peu scrupuleux (démarchage téléphonique non souhaité, services à valeur ajoutée non sollicités, etc.). Bien qu’il ait souligné que les solutions à ces divers problèmes exigeraient une nouvelle révision de la LTC, le Conseil fédéral s’y est dit défavorable, craignant que les profondes incertitudes provoquées par une telle révision ne se révèlent préjudiciables aux investissements. Si Swisscom a accueilli positivement ce rapport, les organisations de protection de consommateurs ont exprimé leur colère face à l’inaction prônée par le gouvernement, exigeant notamment une extension des compétences de l’autorité de régulation. Cette dernière a quant à elle exprimé son incompréhension face à l’attitude ambiguë du Conseil fédéral et plaidé pour une révision ciblée de la LTC afin d’éviter une monopolisation de l’accès à la fibre optique de la part des exploitants de réseaux et d’améliorer la protection des consommateurs par la simplification des conditions de changement de fournisseurs. La Comcom a également revendiqué le droit d’intervenir d’office si elle soupçonne des abus [72].
Le Conseil national a décidé d’améliorer la couverture à large bande relevant du mandat de service universel. En ce sens, il a adopté tacitement une motion Cathomas (pdc, GR) chargeant le Conseil fédéral d’augmenter le débit de transmission minimal garanti par l’ordonnance sur les services de télécommunication afin de l’adapter aux progrès techniques récents [73].
La Commission de la concurrence (Comco) a interdit la fusion de Sunrise et Orange au motif qu’elle conduirait à la constitution d’un duopole sans réelle concurrence, dans la mesure où tant Swisscom que la nouvelle société auraient eu intérêt à maintenir un niveau de prix élevé plutôt qu’à essayer de se prendre des parts de marché l’une à l’autre. Les organisations de protection des consommateurs ont applaudi cette décision, tout en rappelant que la position dominante de Swisscom demeure éminemment problématique. Après avoir annoncé dans un premier temps le dépôt d’un recours auprès du TAF, Orange a finalement renoncé à l’acquisition de Sunrise [74].
La Comcom a abaissé les tarifs du dégroupage et de l’interconnexion du réseau fixe facturés par Swisscom aux autres opérateurs pour les années 2009 et 2010. L’opérateur historique a facturé l’accès au dernier kilomètre respectivement à hauteur de 18,80 et 18,40 francs par mois en 2009 et 2010. Saisie par Sunrise, l’autorité de régulation a ramené ces tarifs à 17,30 et 16,70 francs sur la base des analyses de coûts effectuées par l’Office fédéral de la communication (OFCOM). La Comcom a par ailleurs apporté une correction modérée au prix d’interconnexion [75].
L’autorité de régulation a également décidé d’abaisser les tarifs d’accès au réseau à large bande de Swisscom de 15 à 30% pour les années 2007, 2008 et 2009, de telle sorte que les prix facturés par l’opérateur historique soient alignés sur les coûts [76].
Alors que de nombreux projets d’antennes de téléphonie mobile sont contestés dans la plupart des cantons, l’OFCOM a publié un guide concernant la procédure d’octroi des autorisations de construire à destination des communes. Cette aide pratique est censée permettre aux autorités communales de prendre en compte simultanément les exigences en matière d’environnement et d’aménagement du territoire, ainsi que les besoins des opérateurs de téléphonie mobile et la nécessité d’adapter les infrastructures aux progrès technologiques, lors de l’évaluation des projets d’antennes [77].
Au printemps de l’année sous revue, le TAF a annulé l’amende de 333 millions de francs à laquelle la Comco avait condamné Swisscom en 2007 pour la facturation de frais de terminaison abusifs aux autres opérateurs du marché de la téléphonie mobile. Soulignant que les concurrents de l’opérateur historique (Orange et Sunrise) avaient la possibilité de saisir la Comcom pour contester ces tarifs, mais qu’ils ne l’avaient pas fait, les juges ont estimé que Swisscom n’avait pas abusé de sa position dominante. Souhaitant que la jurisprudence définisse clairement la notion d’abus ainsi que le rôle des autorités de la concurrence, la Comco a recouru contre cet arrêt auprès du Tribunal fédéral. Elle a par ailleurs une nouvelle fois regretté que la Comcom ne puisse pas intervenir d’office contre ce type d’abus afin de protéger les consommateurs. Pour leur part, Swisscom, Orange et Sunrise ont conclu un accord en vue d’une baisse des frais de terminaison pour les appels du réseau fixe vers le réseau mobile [78].
En fin d’année, la Comcom a lancé un appel d’offres publics en vue de la réattribution des concessions GSM et UMTS expirant respectivement au 31 décembre 2013 et au 31 décembre 2016. Afin de stimuler la concurrence, cette réattribution procède d’une mise aux enchères. La Comcom espère ainsi garantir une offre de qualité à un prix avantageux. L’échéance des nouvelles concessions a été fixée à 2028 afin de permettre aux concessionnaires de planifier leurs investissements à long terme en toute sécurité. Le délai pour le dépôt des dossiers de candidature échoit quant à lui au 18 mars 2011, la mise aux enchères étant prévue d’ici la fin du premier semestre 2011 [79].
La Comcom a organisé une cinquième table ronde dédiée à l’extension du réseau à fibre optique et réunissant, comme précédemment, toutes les entreprises actives sur le marché suisse. Cette réunion a été consacrée à divers modes de collaboration avec Swisscom, toujours avec le double objectif d’éviter les doublons dans l’infrastructure de réseau et de garantir la concurrence. Selon la Comcom, les contrats de coopération qui ont ainsi été conclus assureront à terme le raccordement au réseau de près de 20% des ménages suisses. À cette occasion, les participants ont par ailleurs lancé un projet pilote de plateforme commune réalisée au prix d’une uniformisation des formulaires de commandes des fournisseurs de services, de telle sorte que les consommateurs puissent rapidement changer de fournisseurs [80].
 
[72] Presse du 18.9.10; NZZ, 9.11.10 (Comcom). Cf. APS 2009, p. 167. Le rapport répond également à un postulat Simonetta Sommaruga (ps, BE) en faveur de mesures destinées à accroître la concurrence, que le CE a transmis au CF lors de la session de printemps de l’année sous revue (BO CE, 2010, p. 187 s.).
[73] BO CN, 2010, p. 2160.
[74] Presse du 23.4, du 21.5 (recours) et du 4.6.10. Cf. APS 2009, p. 167 s.
[75] NZZ, 15.12.10.
[76] NLZ et NZZ, 12.3.10.
[77] AZ, NZZ et TA, 15.1.10.
[78] Presse du 10.3, du 23.3 (Comco) et du 10.9.10 (accord).
[79] Presse du 27.11.10.
[80] NZZ, 6.2.10. Cf. APS 2009, p. 167.