Année politique Suisse 2011 : Economie / Agriculture / Production animale
Le Conseil des Etats a adopté par 23 voix contre 13 une motion d’ordre Frick (pdc, SZ) afin de renvoyer à la CER-CE la motion Aebi (udc, BE) adoptée par le Conseil national l’année précédente chargeant le Conseil fédéral d’accorder le statut de force obligatoire au modèle de
régulation des quantités de lait basé sur les droits de livraison. Ce renvoi vise à élaborer une nouvelle proposition en partenariat avec les acteurs concernés dans un contexte où la fin des contingents laitiers en 2009 a engendré une production laitière en constante augmentation poussant ainsi les prix et les revenus des producteurs à la baisse
[25].
Le Conseil des Etats a adopté une motion Büttiker (plr, SO) chargeant le Conseil fédéral de proposer des mesures liant davantage la
production laitière à la surface fourragère des producteurs laitiers dans l’objectif de réduire la surproduction structurelle de lait. Le Conseil fédéral a estimé que la politique agricole 2014-2017, alors en consultation (voir supra : Politique agricole), fait des propositions allant dans le même sens que le motionnaire en encourageant une production laitière et de viande basée sur les herbages et en réattribuant les contributions pour animaux à la sécurité de l’approvisionnement. En effet, il considère que les contributions pour animaux participent à la surproduction de lait. Il juge toutefois que la proposition du motionnaire d’intervenir directement sur le marché ne répond pas aux défis rencontrés
[26].
L’Interprofession du lait (IP Lait) a élaboré un
accord visant à désengorger la filière des 5000 tonnes annuelles de beurre issues de la surproduction de la branche et a débloqué 6,8 millions de francs afin de soutenir l’écoulement des stocks excédentaires à l’étranger. L’organisation a également décidé de créer un fonds de régulation afin de soutenir le marché à hauteur d’environ 42 millions de francs par an pour faciliter l’écoulement des stocks de beurre en compensant le différentiel de prix entre la Suisse et le marché international. Ce fonds vise à être alimenté par les producteurs à hauteur de 1 centime par litre sur la totalité de la production et de 4 centimes par litre dépassant les quantités produites lors de la dernière année des contingents laitiers. L’IP-Lait a encore décidé d’augmenter le prix du lait aux producteurs de 3 centimes par litre. La Fédération des producteurs suisses de lait (FSPL) considère que l’urgence est à l’arrêt de la surproduction de lait et soutient donc les mesures prise par l’IP-Lait. Le Conseil fédéral a décidé de rendre de force obligatoire le prélèvement de 1 centime par litre produit mais a repoussé sa décision en ce qui concerne les 4 centimes par litre produit en trop, car quatre organisations de producteurs de Suisse orientale ont fait recours contre cette mesure au nom de la liberté d’entreprise. L’IP-Lait a accusé le gouvernement de démanteler le paquet de mesures élaboré
[27].
En automne, la
FPSL s’est résolue à se retirer de l’IP Lait suite à une décision de baisser les prix du lait de 4 centimes après avoir décidé de nouvelles ponctions auprès des producteurs dans le cadre du fonds de régulation. La FPSL estime que les 60 centimes payés par kilo au producteur sont soutenus par 15 à 20 centimes de paiements directs mais que le total ne couvre pas les coûts de production de 1 franc par kilo. En début d’année,
Prolait, la fédération laitière regroupant les producteurs vaudois, neuchâtelois et fribourgeois, avait également quitté l’IP-Lait jugeant l’organisation incapable de réguler le marché du lait destiné à la transformation. Une partie des producteurs ne se sentent ainsi plus représentés par l’IP-Lait qui défend selon eux les intérêts de l’industrie laitière. Parallèlement à ces retraits, le syndicat
Uniterre a estimé que le marché libre détruit l’agriculture suisse et a accusé l’industrie de pousser à la production afin d’abaisser les prix. Le syndicat souhaite donc une régulation de la production par les producteurs. L’IP-Lait a finalement décidé de revoir ses structures de fonctionnement en réintégrant les fédérations ayant démissionné dans un délai de cinq mois. Elle a ainsi décidé de donner la possibilité d’exclure les membres ne respectant pas ses décisions, puis a augmenté le prix aux producteurs du lait destiné au marché intérieur de deux centimes au vu de la stabilisation de l’euro par rapport au franc
[28].
La
crise du franc a également touché les producteurs de lait. En effet, le franc fort a engendré une chute des exportations helvétiques de fromage (-3,7%). L’Emmental, qui représente 26% des exportations de fromages, a vu ses exportations chuter de 19,5% dans le premier trimestre. Par ailleurs, cette situation a également rendu les fromages importés plus attractifs. De nombreuses exploitations ont ainsi été mises en danger car 50% du lait suisse est transformé en fromage dont 70% de la production est exportée. La FPSL, l’association des artisans suisses du fromage, Fromarte, et l’UPS ont écrit à Johann Schneider-Ammann pour exiger des mesures de soutien supplémentaires
[29].
[25] Mo. 10.3472 :
BO CE, 2011, p. 309 ss.;
QJ, 25.2.11; voir
APS 2010, p. 139 et
APS 2009, p. 119.
[26] Mo. 11.3066 :
BO CE, 2011, p. 331 ss.
[27]
Lib., 19.3.11;
NZZ, 21.3.11;
BZ, NZZ et Lib., 4.5.11;
QJ, 5.5.11; Presse du 1.9.11 (force obligatoire); voir
APS 2010, p. 138 s.
[28]
QJ, 19.2.11 (Prolait), 15.10.11 (FPSL), 18.11.11;
Lib., 14.4.11 (FPSL);
LT, 11.11.11 (FPSL et Uniterre);
NZZ, 8.12.11 (augmentation);
NZZ et
QJ, 29.11.11 (révision fonctionnement).
[29]
BZ et
NLZ, 27.7.11;
Lib.,
TA et
BZ, 5.8.11.
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