Année politique Suisse 2011 : Politique sociale / Population et travail
 
Salaires
D’après les calculs de l’Office fédéral de la statistique (OFS), les salaires nominaux ont augmenté en moyenne de 1,0% en 2011. Cette hausse, légèrement supérieure à celle observée en 2010 (+0,8%), est restée cependant en net recul par rapport à 2008 (+2,0) et 2009 (+2,1%). Les incertitudes liées à la crise économique et financière ainsi qu’un taux d’inflation très bas ont donné lieu à une certaine modération salariale. Les services et l’industrie ont tous deux également connu une croissance des salaires nominaux de 1,0%. Parmi les branches du secteur tertiaire, ce sont les activités informatiques et des services d’information (+2,5%) et de l’assurance (+2,3%) qui ont le plus fortement contribué à cette hausse. A l’autre bout de l’échelle, l’administration publique ainsi que l’hébergement et la restauration ont stagné (0,0%). Quant aux services financiers, ils ont enregistré une progression salariale de 1,1%, ce qui est très inférieur aux augmentations accordées avant la crise de 2008. Pour ce qui est des branches du secteur secondaire, les salaires de la chimie et de la pharmacie ont progressé de 1,4% et ceux de la fabrication des machines et équipements de 1,1%.
En 2011, les salaires réels ont enregistré une progression de 0,7%. Ce chiffre découle d’une augmentation des salaires nominaux (+1,0%), conjuguée à un taux d’inflation de l’ordre de 0,2%. Les salaires réels ont connu, au niveau de l’ensemble des branches économiques, une hausse sensible par rapport à l’année précédente (+0,1%) [10].
Le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) a publié le 3 mai un rapport sur les mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes. Ce rapport a établi que 38% des entreprises étrangères contrôlées ayant détaché des travailleurs en Suisses n’ont pas respecté les salaires minimaux fixés par les conventions collectives de travail (CCT). Le bâtiment, les métiers liés à la sécurité, le nettoyage et le jardinage étaient les domaines les plus touchés. Dans la foulée de ce rapport, le Conseil fédéral a décidé de renforcer la lutte contre les abus liés à la libre circulation des personnes. Le 6 juillet, il a chargé le Département fédéral de l’économie (DFE) d’élaborer un projet de loi permettant de combler les lacunes légales concernant l'exécution des mesures d'accompagnement. Il a notamment été question d’élargir les possibilités de sanction face aux abus des contrats types de travail ou des conventions collectives ainsi que de lutter contre le phénomène des « faux indépendants ». Certaines entreprises étrangères font travailler leurs employés en Suisse sous le statut d'indépendants alors que ces personnes sont salariées. De cette manière, ces entreprises échappent aux conditions salariales minimales imposées. Lors d’une session extraordinaire sur la situation économique et sociale de la population qui a eu lieu dans le cadre de la session d’automne, le Conseil national a adopté quatre motions destinées à combattre le recours à ces indépendants fictifs. La motion Hiltpold (plr, GE) a eu pour but de charger le Conseil fédéral d'apporter des précisions sur le statut des indépendants et notamment sur les contrôles à effectuer pour déceler les faux indépendants. La motion Lustenberger (pdc, LU) a exigé que le Conseil fédéral prenne en considération le renvoi rapide des fautifs, des sanctions plus sévères l’obligation de fournir des documents attestant le statut d’indépendant. La motion Moret (plr, VD) a réclamé l’introduction d’une caution d’un montant important afin de lutter contre les faux indépendants. La motion Estermann (udc, LU) a demandé au Conseil fédéral de combattre ce problème sans dépenses supplémentaires notables. Dans le même contexte, le Conseil national a par ailleurs accepté une motion Pelli (plr, TI) visant à sanctionner le non-respect des salaires minimaux prévus par les conventions collectives de travail (CCT). Le Conseil des Etats ne s’est pas prononcé sur ces quatre interventions parlementaires en 2011 [11].
Lors de la session d’hiver, le Conseil national a en outre approuvé, par 161 voix contre 28, un postulat Favre (plr, NE) chargeant le Conseil fédéral d’examiner l’évolution du marché du travail frontalier et ses conséquences sur le niveau des salaires [12].
En janvier, l’Union syndicale suisse (USS) a lancé son initiative populaire intitulée « pour la protection de salaires équitables ». Cette initiative a pour but d’encourager les conventions collectives de travail prévoyant des salaires minimums et d’introduire un salaire minimum légal national de 22 francs de l’heure, ce qui correspond à un salaire mensuel de 4 000 francs pour une durée de travail de 42 heures. Jusqu’à présent, un employé sur dix gagne moins de 4000 francs bruts par mois pour un poste à plein-temps, dont deux tiers sont des femmes [13].
Après le Jura, Neuchâtel a introduit comme deuxième canton un salaire minimum dans sa constitution cantonale. Le 27 novembre, 54,6% des participants ont voté en faveur d’un projet de décret déposé par la députée Marianne Ebel (Sol.). Comme le texte n’a fixé aucun montant, les autorités doivent mettre en place une loi d’application. A l’inverse, les citoyens vaudois et genevois ont rejeté des initiatives ayant le même objectif durant l’année sous revue [14].
En ce qui concerne les rémunérations des dirigeants d’entreprises privées, voir partie I, 4a Politique économique générale (« Gesellschaftsrecht »).
Pour ce qui est de la motion Teuscher (verts, BE) relative au « dialogue sur l’égalité des salaires », voir partie I, 7d Groupes sociaux (« Frauen und Gleichstellungspolitik ») .
 
[10] Communiqué de l’OFS du 27.4.2012.
[11] Mo. 11.3604 (Estermann): BO CN, 2011, p. 1506; Mo. 11.3629 (Pelli): BO CN, 2011, p.1507; Mo. 11.3704 (Hiltpold): BO CN, 2011, p. 1508; Mo. 11.3707 (Moret): BO CN, p. 1508; Mo. 11.3703 (Lustenberger): BO CN, p. 1508 ; Lit. SECO; Communiqué du SECO du 6.7.11; LT, 4.5. et 7.7.11, NZZ, 14.7.11.
[12] Po. 11.3999, BO CN, 2011, p. 2223.
[13] FF, 2011, p. 853 ss.
[14] 24h,16.5.11; LN, LT et TdG, 28.11.11.