Année politique Suisse 2012 : Chronique générale / Politique étrangère suisse / Europe: UE
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Voie bilatérale et rapport sur la politique européenne
En début d’année, le nouveau ministre des affaires étrangères, Didier Burkhalter, a présenté sa stratégie sur les relations avec l’UE. Là où son prédécesseur prônait une approche simultanée et coordonnée de tous les dossiers, Didier Burkhalter souhaite se concentrer sur un dossier, celui de l’électricité, afin de trouver une solution qui pourrait servir de modèle aux autres dossiers en suspens. L’accord sur l’électricité permettrait également de régler les questions institutionnelles, dont la discussion fait office de condition sine qua non pour Bruxelles. L’idée de régler les questions institutionnelles par un accord particulier a rencontré le scepticisme des experts, des politiciens, ainsi que de l’ambassadeur de l’UE en Suisse [18].
Au mois de février, le Conseil fédéral a présenté une feuille de route concernant les prochaines étapes des négociations bilatérales avec l’UE. Les négociations actuelles portent sur l’agriculture, sur la sécurité des produits alimentaires et de la santé publique, sur le commerce des droits d’émission de CO2, sur les programmes de navigation par satellite Galileo et EGNOS, sur la collaboration en matière de concurrence et enfin sur l’électricité/énergie. Ce dernier dossier a été qualifié de prioritaire par le Conseil fédéral, puisqu’il devrait servir de modèle pour les autres négociations. Le gouvernement a également rappelé son intention de suivre une stratégie qui permette d’apporter des solutions aux questions institutionnelles, ainsi que son refus de toute reprise automatique du droit européen. L’accueil bruxellois à cette feuille de route a été plutôt réservé. En effet, les Européens ont regretté que la Suisse poursuive une stratégie qui met sur la table des questions procédurales au détriment des questions substantielles. De plus, le refus helvétique d’instaurer des mécanismes garantissant l’adaptation des accords bilatéraux aux avancées législatives et juridiques européennes, ainsi que l’opposition à l’établissement d’un organe de contrôle judiciaire efficace ont créé des tensions lors de la rencontre entre l’UE et la Suisse en mars. Afin de répondre aux exigences européennes, le Conseil fédéral a transmis des propositions pour résoudre ces questions institutionnelles dans le courant du mois de juin. A Bruxelles, l’évaluation de ces propositions par l’UE a été très critique. La Commission a jugé ces propositions insuffisantes, un avis partagé par les Vingt-Sept. Dans un rapport rendu à la fin de l’année sous revue, les Etats-membres ont exclu la conclusion de nouveaux accords bilatéraux d’accès au marché intérieur européen tant que ne seront pas réglées les fameuses questions institutionnelles, soit la reprise la plus automatique possible par la Suisse de la législation européenne pour les domaines concernés, ainsi que l’établissement d’un organe de surveillance et d’un tribunal pour régler les litiges. Les discussions reprendront l’année prochaine [19].
En 2009, le groupe libéral radical déposait une motion demandant au Conseil fédéral d’entrer en négociation avec l’UE pour garantir l’accès réciproque au marché des services financiers transfrontaliers. Au courant de l’année 2011, cette motion avait été largement acceptée par le Conseil national malgré une opposition de l’UDC. Au cours de l’année sous revue, le Conseil des Etats n’a pas suivi cette voie. En effet, ce dernier a refusé la motion par 27 voix contre 7. La principale crainte du Conseil des Etat et de sa commission s’est révélée être la reprise automatique du droit européen dans des domaines particulièrement sensibles, tels la concurrence ou la protection des consommateurs. Il semblerait également que les tensions survenues suite aux différents fiscaux avec l’UE aient amené le Conseil des Etats à rejeter la motion en mars de l’année sous revue. Le Conseil des Etats a cependant exprimé son soutien à la politique bilatérale du Conseil fédéral qui permet de conclure des accords plus spécifiques avec chaque état de l’Union [20].
 
[18] LT, 13.1. et 14.5.12; NZZ, 2.2.12; TA, 14.5.12.
[19] Communiqué du DFAE du 1.2. et 30.11.12; LT, 17.3., 19.9. et 21.12.12; Lib, 12.3.12.
[20] Mo. 09.3811: BO CN, 2011, p.1039; BO CE, 2012, p. 96ss.; APS 2011, p.140.