Année politique Suisse 2012 : Chronique générale / Politique étrangère suisse / Europe: UE
Suite au référendum sur l’adhésion à l’UE,
le peuple croate a décidé de rejoindre l’UE en janvier 2012 par 66% des voix. Cette décision a réveillé les opposants suisses à la libre circulation des personnes. Face à la colère des zones frontalières, premières concernées par les pressions salariales, le président du PS, Christian Levrat, a également reconnu que la question de l’introduction d’un contingentement régional des travailleurs européens devait se poser
[21].
L’introduction de la
clause de sauvegarde permettant à la Suisse d’introduire un contingentement de travailleurs étrangers a été au centre des débats du gouvernement au printemps. Des discussions similaires avaient eu lieu en 2009, mais le Conseil fédéral avait finalement renoncé à activer cette clause. Bien qu’economiesuisse et les représentants de l’agriculture et de l’hôtellerie aient clairement déclaré leur opposition à un tel scénario, le PLR a reconnu que l’activation de cette clause de sauvegarde permettrait de contrer l’initiative de l’UDC « contre l’immigration de masse » qui signerait la fin de la libre circulation
[22].
Dans le courant du mois d’avril, le Conseil fédéral a annoncé
l’activation de la clause de sauvegarde envers les Etats de l’UE-8 (Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Slovénie et République Tchèque). Cette activation a signé la réintroduction de contingents pour les autorisations de séjours de catégorie B délivrées aux ressortissants estoniens, hongrois, lettons, lituaniens, polonais, slovaques, slovènes et tchèques durant une année. Le Conseil fédéral a relevé les effets économiques positifs de la libre circulation des personnes, mais a également noté l’importance de mener un débat sur les questions de l’immigration et de la politique économique. Cette activation a contrarié non seulement les pays concernés, mais également l’UE. En effet, la clause de sauvegarde peut être activée si le nombre d’autorisations délivrées en une année dépassent de 10% la moyenne des permis délivrés au cours des trois dernières années. Ce dépassement est observé en Suisse pour les pays concernés, mais non si l’on tient compte de l’ensemble des arrivants de nationalité européenne. Cette différence a amené Bruxelles à qualifier la décision suisse de discriminatoire. Les effets de cette décision devraient cependant être minimes, car elles ne concerneraient que 4 000 personnes. Bien que conscients de la portée limitée et symbolique de cette décision, qualifiée même de « non-événement qui ne résoudra rien » par le président du PS, tous les partis ont reconnu la nécessité d’intervenir dans ce dossier. La presse a également relayé la position de Natalie Rickli (udc, ZH) qui a déclaré que la Suisse aurait également dû appliquer la clause de sauvegarde à l’Allemagne pour limiter l’importante immigration allemande: « Les Allemands pris séparément ne me dérangent pas. La masse me dérange ». Les réactions ont été vives autant en Suisse qu’en Allemagne où le
Spiegel Online a titré « Eclat autour d’une discrimination des Allemands »
[23].
L’arrêté fédéral concernant la
modification de l’annexe III à l’accord sur la libre circulation des personnes a été accepté à l’unanimité au Conseil des Etats et par 189 voix contre 5 au Conseil national. L’objectif de ce changement est de mettre en place un système non seulement de reconnaissance, mais aussi de contrôle des qualifications professionnelles acquises par des citoyennes ou citoyens de pays de membres de l’UE ou de l’AELE qui souhaiteraient exercer une profession règlementée en Suisse
[24].
[22]
BZ, 28.1.12;
TG, 31.1.12;
LT, 29.2.12;
APS 2009, p. 62s.
[23] Communiqué du DFAE du 18.4. et 27.6.12;
LT, 19.4., 20.4. et 2.5.12 (citation);
24H, 29.4.12 (citation).
[24] MCF 12.047:
FF, 2012, p. 4103ss., 8989ss.;
BO CE, 2012, p. 867ss., 1261;
BO CN, 2012, p. 2034ss., 2283.
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