Année politique Suisse 2013 : Politique sociale / Population et travail
 
Marché du travail
Selon les relevés de l’Office fédéral de la statistique (OFS), le nombre d’actifs occupés sur le marché du travail a progressé de 1,8% durant l’année sous revue pour atteindre 4,899 millions de personnes au quatrième trimestre 2013. Cet indicateur témoigne de la bonne santé du marché du travail suisse. Il est à souligner que la hausse a été plus importante pour les femmes (+2,8%) que pour les hommes (+1,0%). En outre, le nombre d’actifs de nationalité étrangère a enregistré une hausse conséquente de 3,7%, alors que celle observée pour la main-d’œuvre suisse a atteint 1,1% [4].
En avril, le Conseil fédéral a activé la clause de sauvegarde à l’égard des employés en provenance des 17 anciens membres de l’Union européenne (UE-17). En même temps, celle portant sur les ressortissants des huit pays d’Europe de l’Est (UE-8) a été prolongée. Par ces décisions très attendues au sein de l’élite politique suisse, le Conseil fédéral a contingenté, pour la durée d’une année, les autorisations de séjour de catégorie B (autorisations d'une durée de cinq ans) à 2 180 pour les Etats de l’UE-8 et à 53 700 pour ceux de l’UE 17. Selon les accords sur la libre circulation des personnes (ALCP), le gouvernement suisse avait la possibilité de réintroduire unilatéralement des contingents jusqu'au 31 mai 2014 au plus tard à condition que le nombre d'autorisations de séjour ou d'autorisations de séjour de courte durée dépasse d'au moins 10 % la moyenne annuelle des autorisations émises au cours des trois années précédentes. En revanche, le Conseil fédéral a décidé de ne pas activer la clause de sauvegarde pour ce qui est des autorisations de séjour de courte durée (catégorie L) bien que le seuil permettant d’y avoir recours ait été atteint dans le cas des ressortissants des anciens pays membres de l’Union européenne [5].
Le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) a publié en juin le neuvième rapport de l’Observatoire sur la libre circulation des personnes relatif aux répercussions de la libre circulation des personnes. L’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) conclu entre l’Union européenne (UE) et la Suisse, qui est en vigueur depuis onze ans, a eu pour conséquence une forte augmentation de l’immigration en provenance des Etats de l’UE et de l’Association européenne de libre-échange (AELE). Celle-ci s’est élevée en moyenne à 38 400 personnes par année, alors que le solde migratoire était légèrement négatif en ce qui concerne ces pays avant que l’ALCP ne prenne effet. Le rapport dresse un bilan largement positif. Face à cette hausse sensible de l’immigration, le marché suisse du travail a fait preuve d’une bonne capacité d’absorption. De manière générale, les observations à long terme tenant compte de plusieurs cycles conjoncturels indiquent que l’immigration induite par la libre circulation des personnes n’a pas augmenté le taux de chômage. L’analyse plus détaillée révèle que la seule exception concerne cependant les personnes hautement qualifiées nées en Suisse. Pour cette catégorie, le taux de chômage a augmenté de 0,2%. Le rapport établit par ailleurs que les mesures d’accompagnement ayant pour but de lutter contre la baisse des salaires se sont révélées efficaces. Finalement, l’immigration a ralenti le vieillissement de la population en Suisse et a amélioré les comptes de l’AVS [6].
La libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne (UE) devra être étendue à la Croatie suite à l’adhésion de ce pays à l’UE le 1er juillet 2013. Comme cela fut le cas pour les Etats de l’Europe de l’Est (UE-8) et pour la Roumanie et la Bulgarie (UE-2), la Suisse a négocié avec Bruxelles un protocole additionnel qui fixe les modalités de cette extension. L’ouverture du marché suisse de l’emploi aux ressortissants croates se fera de manière progressive. En principe, la Suisse pourra restreindre unilatéralement l’immigration des employés croates pendant une période de dix ans. Plus précisément, le protocole additionnel prévoit que la Suisse aura le droit de restreindre l’accès de la main-d’œuvre croate à son marché du travail notamment par l’instauration de contingents. A l’issue de ces sept ans, la Suisse aura la possibilité, sous certaines conditions quantitatives, d’activer unilatéralement la clause de sauvegarde à l’égard de la Croatie [7].
Dans le cadre de la lutte contre les abus, les activités de contrôle liées aux mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes ont augmenté de 22% en 2013 par rapport à 2012 selon le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO). Ces contrôles ont débouché sur des constats de sous-enchères salariales dans 8% des cas et sur des soupçons d’infraction aux minima fixés par les conventions collectives du travail (CCT) dans 25%. Le SECO a fait savoir que ces contrôles allaient être renforcés en 2014 [8].
Afin d’améliorer l’exécution des mesures d’accompagnement dans le cadre de la libre circulation des personnes, le parlement a adopté, au cours de l’année sous revue, une motion émanant de la commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE). Par cette décision, le Conseil fédéral a été chargé d’exposer de manière détaillée les lacunes existantes et de présenter, au niveau de la Confédération et des cantons, un plan de mesures visant à y remédier. Il est à relever que le Conseil national a supprimé une partie du texte déposé. En effet, les députés bourgeois de la chambre du peuple ont rejeté en décembre le renforcement des instruments du partenariat social. Sous l’influence de l’acceptation de l’initiative populaire sur les rémunérations abusives en mars et à titre de concession à celle sur les salaires minimums, la motion sous sa forme originale demandait au Conseil fédéral de proposer également des mesures permettant d’accélérer la conclusion des conventions collectives du travail (CCT) et des contrats-types de travail (CTT) [9].
S’agissant de l’initiative du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) visant à combattre la pénurie de main d’œuvre qualifiée, le Conseil fédéral Johann Schneider-Amman a réuni en mai autour d’une table ronde les représentants des cantons et des partenaires sociaux. Sur la base d’un rapport datant de 2011, les participants ont déterminé quatre champs d’action visant à promouvoir le recours au potentiel offert par la main-d’œuvre suisse. Les parties prenantes ont convenu de relever le niveau de qualification et de formation, d’améliorer la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, de créer de meilleures conditions de travail pour les employés plus âgés et d’encourager l’innovation en vue d’accroître la productivité. En novembre, le Conseil fédéral a adopté un ensemble de mesures portant sur une durée de quatre ans (2015 à 2018). Les cantons et les partenaires sociaux se sont engagés à prendre des mesures supplémentaires dans leurs domaines de compétences respectifs [10].
Le Conseil fédéral a adopté en août son message portant sur la ratification de la convention de l’Organisation internationale du travail (OIT) concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques. Cette convention, signée en 2011, a pour but de garantir aux travailleurs domestiques un traitement qui ne soit pas moins favorable que celui accordé aux autres travailleurs. Elle comporte également des dispositions au niveau des conditions de vie et de travail (temps de travail, rémunération, sécurité et santé au travail). C’est le Conseil des Etats qui se penchera le premier sur cet objet a priori peu controversé, étant donné que la ratification n’entraînerait aucune modification des dispositions législatives du droit suisse [11].
Une motion déposée par le groupe PBD visant à augmenter les chances des personnes âgées sur le marché du travail a obtenu une majorité au sein du Conseil national lors de la session de printemps. Le texte prévoit que le Conseil fédéral examine une harmonisation des taux de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle (LPP). Le parti bourgeois démocratique estime que les contributions qui augmentent en fonction de l’âge sont en partie responsables des difficultés que l’ancienne génération rencontre sur le marché du travail, notamment lorsqu’il s’agit de retrouver un emploi. Le Conseil des Etats ne s’est pas encore prononcé sur cette motion [12].
Le Conseil des Etats a transmis au cours de la session d’automne un postulat Keller-Sutter (plr, SG) ayant pour but une meilleure exploitation du potentiel de la main-d’œuvre suisse sur le marché du travail. Par cette décision, le Conseil fédéral a été chargé de rédiger un rapport consacré aux mesures destinées à promouvoir la formation professionnelle ainsi qu’une participation accrue des femmes et des personnes âgées [13].
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Chômage
Malgré une accélération de la croissance économique, le taux de chômage a augmenté en 2013 par rapport à l’année précédente. La moyenne annuelle a atteint 3,2%, contre 2,9% en 2012. Cette hausse de 0,3 point de pourcentage correspond à une progression de 11 000 chômeurs. Le nombre moyen s’est ainsi élevé aux alentours de 136 500. Une nette hausse en début d’année a porté le nombre de personnes inscrites auprès des offices régionaux de placement (ORP) à plus de 148 000. Toutefois, le nombre de chômeurs officiels a sensiblement baissé durant le printemps de l’année sous revue pour atteindre environ 126 500 personnes à la fin du mois de juin. Ce recul de 21 500 personnes a cependant été contrecarré par une hausse enregistrée de 23 000 personnes au fil du deuxième semestre. Les chiffres du chômage sont repartis à la hausse dès juillet. Renforcé par l’influence de facteurs saisonniers, l’accroissement a été particulièrement prononcé en novembre et en décembre. Le chômage des jeunes a affiché une légère hausse de 0,2 point de pourcentage pour atteindre 3,4%. Il est à relever que la progression aura été bien moins importante en Suisse alémanique (+0,1 point de pourcentage) qu’en Suisse latine (+0,3 point de pourcentage), accentuant ainsi le clivage au niveau des régions linguistiques. En effet, le chômage des jeunes se chiffre à 2,8% en Suisse alémanique contre 5,0% en Suisse romande et au Tessin. Pour ce qui concerne la nationalité, l’on observe également un phénomène d’amplification. Alors que le chômage des citoyens suisses n’a progressé que de 0,1 point de pourcentage pour s’élever à 2,2%, celui des étrangers s’est inscrit en nette hausse (+0,5 point de pourcentage) et affiche un taux de 6,0% [14].
Selon la définition du Bureau international du Travail (BIT), 193 000 personnes se trouvaient au chômage à la fin de l’année 2013, soit 10 000 de moins qu’un an auparavant. Le taux de chômage est ainsi passé à 4,1% de la population active, contre 4,4% au quatrième trimestre de l’année passée. A titre de comparaison, le taux de chômage n’a pas bougé au sein des ressortissants des pays de l’Union européenne (10,7%) alors qu’il a augmenté de 0,2 point de pourcentage pour ceux des 18 pays de la zone euro, s’élevant ainsi à 12,0% [15].
Durant la session d’automne, le Conseil national a transmis un postulat Carobbio Guscetti (ps, TI) au sujet des entreprises sociales. Le texte invite le Conseil fédéral à rédiger un rapport sur ces entreprises dont le but consiste à réinsérer dans le monde du travail les personnes sans emploi en leur permettant d'exercer une activité productive [16].
 
[4] Communiqué de l’OFS du 13.2.14.
[5] Communiqué du DFJP du 24.4.13; Presse du 25.4.13.
[6] Communiqué du Seco du 11.6.13; NZZ, 12.6.13; Litt. Seco, Favre et al.
[7] Communiqué du DFJP du 28.8.13; NZZ, 29.8.13. 
[8] Communiqué du Seco du 5.5.14; NZZ et TdG, 6.5.14. 
[9] Mo. 13.3668: BO CE, 2013, p. 870; BO CN, 2013, p. 2149.
[10]Communiqués du Seco du 21.5. et 6.11.13 ; Litt. DFE.
[11] MCF 13.067: FF, 2013, p. 6215 ss.
[12] Mo. 12.4129: BO CN, 2013, p. 508.
[13] Po. 13.3382: BO CE, 2013, p. 920 s.
[14] Communiqué du SECO du 10.1.14.
[15] Communiqué de l’OFS du 13.2.14.
[16] Po. 13.3079: BO CE, 2013, p. 1743 s.