Année politique Suisse 2013 : Politique sociale / Population et travail
Relations collectives du travail
Début juin, les partenaires sociaux de
l’industrie MEM (machines, équipements électriques et métaux) se sont entendus sur une nouvelle convention collective du travail (CCT). L’accord est intervenu au terme de négociations ardues ayant nécessité la médiation de la part de Jean-Luc Nordmann, l’ancien directeur du Secrétariat d’Etat à l‘économie (SECO). Selon le texte entériné, les entreprises soumises à la CCT bénéficieront d’une plus grande flexibilité au niveau du temps de travail afin qu’elles puissent mieux adapter leur capacité de production aux fluctuations du marché. En contrepartie, la nouvelle CCT prévoit pour la première fois des salaires minimaux dont le montant a été fixé en fonction des régions économiques. Par exemple, le personnel non qualifié touchera au moins 3 850 francs dans l’espace économique zurichois ainsi que dans l’arc lémanique et au moins 3 300 francs dans les régions périphériques (Tessin, arc jurassien et sud des Grisons). Dans le but de tenir compte des besoins de la société moderne, les partenaires sociaux se sont par ailleurs mis d’accord sur des améliorations au niveau des conditions de travail (congé paternité de cinq jours ainsi que l’encouragement du « home office », du « job sharing », du temps partiel et de la garde d’enfants extrascolaire). La nouvelle convention est entrée en vigueur le 1er juillet pour une durée de cinq ans
[27].
Au 1er octobre, la nouvelle CCT de
la branche de la coiffure est entrée en vigueur (CCN 2013). Le texte, qui a abouti en mai de l’année sous revue, prévoit des améliorations pour les salariés, notamment en matière de vacances et de rémunération. Ainsi, les employés ayant terminé leur formation et travaillant pendant au moins 5 ans dans la même entreprise auront droit à cinq semaines de vacances et leur salaire de base sera progressivement porté de 3 400 francs en 2013 à 3 800 francs en 2015. Afin de lutter contre les abus, les contrôles concernant l’exécution de la CCN 2013 seront renforcés
[28].
En novembre, le Conseil fédéral a décidé de prolonger de trois ans l’ordonnance sur le contrat-type de travail (CTT) relatif à
l’économie domestique. Il a estimé que le maintien du CTT était nécessaire dans le cadre des mesures d'accompagnement à la libre circulation des personnes. Dans le même temps, le gouvernement a augmenté les salaires horaires minimaux à partir du 1er janvier 2014. Ceux-ci passent de 18.20 francs à 18.55 francs pour les employés non qualifiés n’ayant pas d’expérience professionnelle et de 22 francs à 22.40 francs pour ceux ayant bénéficié d'une formation professionnelle initiale de trois ans et disposant d'un certificat fédéral de capacité (CFC)
[29].
Les partenaires sociaux de la
presse écrite romande ont signé en fin d’année une nouvelle convention collective de travail. L’association patronale Médias Suisses, qui avait résilié la CCT au cours de l’année dernière, a obtenu l’abandon de la grille salariale. Le texte fixe un salaire d’entrée dans la profession à hauteur de 5 842 francs. Malgré le fait que la convention maintient les droits acquis par les journalistes, elle a été loin de faire l’unanimité parmi ces derniers. Les délégués du syndicat Impressum ont néanmoins approuvé la convention par 16 voix contre 7 lors d’une assemblée générale exceptionnelle. La CCT sera effective dès le 1er janvier 2014 pour une durée minimale de trois ans
[30].
A Delémont (JU), les quinze employés de l’entreprise
Berger & Co., spécialisée dans le décolletage de précision pour pièces automobiles, ont entamé une grève le 23 janvier, suite à la décision prise par la direction de délocaliser les activités en Allemagne et en Pologne. Reconnaissant la légitimité du syndicat Unia, la direction a accepté de s’asseoir à la table des négociations le lendemain. Les employés ont dans la foulée repris le travail et obtenu un plan social. Les conditions n’ont pas été dévoilées, mais elles ont pleinement satisfait les ouvriers
[31].
Le conflit social à l’hôpital neuchâtelois de
La Providence qui a éclaté en automne de l’année passée a pris fin le 4 février de l’année sous revue. Au bout de 72 jours de grève, l’hôpital a décidé de licencier les 22 employés qui se battaient pour que le groupe Genolier, le repreneur désigné de l’établissement, applique la convention collective du travail « CCT 21 » au-delà de 2013. C’est de cette manière abrupte que s’est terminé le plus long mouvement de grève que le canton de Neuchâtel ait connu. Le 26 janvier, une manifestation de plusieurs centaines de personnes avait pourtant attiré des syndicalistes et des militants politiques de toute la Suisse
[32].
Les syndicats SSP et SUD ont appelé
les fonctionnaires du canton de Vaud à manifester contre un plan d’assainissement de la caisse de pension de l’Etat signé entre le gouvernement et l’association faîtière des fonctionnaires (FSF Vaud). Près de 1 500 personnes, principalement des enseignants, étaient présentes le 11 mars dans les rues de Lausanne
[33].
Le 3 juin, une dizaine d’employés du
supermarché Spar
de la station-service de Baden-Dättwil (AG) ont entamé un mouvement de grève. En occupant le magasin et en barricadant son accès, les grévistes demandaient une hausse de leurs salaires et davantage de personnel. Malgré un climat tendu, la direction de Spar, des grévistes ainsi que le syndicat Unia se sont retrouvés autour d’une table ronde le 11 juin à Zurich. Les négociations n’ont cependant pas abouti. Alors que l’entreprise était prête à accorder une augmentation salariale, les différences se sont révélées insurmontables quant à la question des effectifs. Le 13 juin, les dix protestataires ont été licenciés avec effet immédiat. Le même jour, le Tribunal de district de Baden a ordonné le déblocage du magasin. Face à cette décision de justice, les grévistes ont quitté les lieux et terminé leur mouvement de grève. Par la suite, une médiation qui s’est tenue à l’office de conciliation du canton d'Argovie a également échoué. La plupart des grévistes ont néanmoins retrouvé un emploi au bout de quelques semaines
[34].
En été de l’année sous revue, environ 80
jardiniers du canton de Schaffhouse ont cessé le travail afin d’obtenir une augmentation de leurs salaires. Organisée par Unia, la grève a débuté le 3 juillet pour se terminer cinq jours plus tard, après qu’un accord ait vu le jour entre le syndicat et les neuf entreprises horticoles touchées par l’arrêt de travail. L’accord prévoit une hausse progressive des salaires minimaux. Ainsi, le salaire pour un jardinier non qualifié s’élèvera à 4 200 francs à partir de 2015, contre 3 450 francs en 2013. Entre temps, les partenaires sociaux officiels avaient également trouvé un terrain d’entente. Les salaires négociés par l’association patronale JardinSuisse et « Grüne Berufe », le représentant des employés, se sont nettement rapprochés de ceux imposés par Unia
[35].
Le 22 octobre, Unia a bloqué
le chantier de la nouvelle gare souterraine de Zurich. Le syndicat a ainsi dénoncé la sous-enchère salariale sur le plus grand projet de construction du pays. Des « faux indépendants » polonais qui exécutaient des travaux pour le compte d’un sous-traitant touchaient des salaires se situant entre 5 et 11 euros de l’heure, au lieu des 30 francs requis
[36].
Dans le canton de Genève, cinq mouvements de grève ont été recensés au cours de l’année 2013. Le 10 avril, une quinzaine d’employés de l’hôtel
Capitole ont cessé leur travail durant 24 heures. Les salariés se trouvaient sous la menace d’un licenciement à l’approche de travaux de rénovation et de la reprise probable de l’établissement par le groupe français Accor. Selon la presse locale, cette grève a constitué une première dans l’hôtellerie genevoise
[37].
Sous l’impulsion du syndicat SIT, une quinzaine d’employés de l’association
Partage, qui occupe des chômeurs en fin de droit dans le cadre des emplois de solidarités (EdS) du canton de Genève, s’est mise en grève le 23 août. C’est la mauvaise ambiance de travail qui semble avoir déclenché ce conflit social. Mis à part les « salaires de misère », les grévistes ont évoqué un manque de respect de la part de la direction. L’arrêt de travail a surtout été suivi dans le secteur du ramassage des ordures et du compost. Le mouvement de grève a conduit à la dénonciation des contrats de prestations de service par les six communes genevoises clientes. Etant donné que ces dernières ont coupé leurs subventions, Partage a procédé le 28 octobre au licenciement collectif des dix-sept personnes en charge de ces prestations pour des motifs économiques. Malgré cela, le bras de fer n’a pas pris fin dans l’immédiat. En effet, la grève ne s’est éteinte qu’à son 105ème jour
[38].
En septembre,
Gate Gourmet a fait part à ses employés basés en Suisse de sa volonté de résilier la convention collective de travail au 31 décembre. Afin de la remplacer par un nouveau contrat, l’entreprise de restauration aéronautique a procédé à un licenciement collectif et a aussitôt réembauché son personnel à de nouvelles conditions. A l’aéroport de Genève-Cointrin, cette manœuvre a provoqué une grève de plusieurs employés. Entamée le 14 septembre, celle-ci s’est poursuivie au-delà de la fin de l’année. Suite à une manifestation le 28 septembre durant laquelle des participants ont pénétré dans le siège de la société, six grévistes ont été licenciés avec effet immédiat
[39].
Dans le domaine de
l’administration cantonale, une partie du personnel de deux services a fait grève début novembre. Dénonçant une surcharge de travail, les employés du Service de la protection des mineurs (SPMi) et du Service de la protection des adultes (SPAd) ont revendiqué de meilleures conditions de travail et une augmentation salariale
[40].
Sept ferrailleurs travaillant sur un chantier de la Radio Télévision Suisse (RTS) se sont mis en grève le 12 décembre de l’année sous revue pour protester contre le fait qu’ils n’avaient pas touché de salaires pendant trois mois de la part d’une entreprise sous-traitante. Dans la journée, le syndicat SIT et l’entreprise générale Induni ont trouvé une solution à ce problème
[41].
[27]
NZZ, 3.6. et 4.6.13;
TA, 7.6.13.
[29] Communiqué du SECO du 13.11.13;
TA, 14.11.13.
[30]
Lib., 14.12.13; NZZ, 16.12.13; cf.
APS 2012, p. 276.
[31]
QJ, 24.1. et 25.1.13.
[32]
Exp, 4.1. et 28.1.13;
TdG 11.4.13; cf.
APS 2012, p. 277.
[34]
AZ, 6.6., 8.6, 12.6, 14.6, 21.6. et 12.9.13.
[35]
SN, 4.7. et 10.7.13.
[38]
TdG, 27.8., 21.9. et 15.10.13.
[39]
TdG, 19.9. et 30.10.13.
[40]
TdG, 4.11., 5.11. et 9.11.13.
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