En vue des élections de mars 2022, 972 candidates et candidats, dont 38.7 pour cent étaient des femmes, se sont pressés au portillon afin d'accéder à l'un des 150 sièges du Grand Conseil vaudois. Pour rappel, le Grand Conseil a penché à droite durant la législature 2017-2022. Logiquement, la droite a donc eu pour but de conserver son ascendant, alors que la gauche souhaitait progresser au législatif tout en conservant sa majorité au Conseil d'État. En outre, les Vert'libéraux espéraient jouer les trouble-fête au centre de l'échiquier politique afin de s'assurer un rôle de pivot pour la nouvelle législature.
Entre 2017 et 2022, il a manqué deux sièges au PLR et à l'UDC pour détenir à eux deux la majorité absolue. En effet, 74 parlementaires formaient le bloc bourgeois, 49 dans les rangs du PLR et 25 dans ceux de l'UDC. Durant la campagne, la droite a fait valoir que la solidité affichée par le canton au sortir de la pandémie devait une fière chandelle à la politique économique et financière menée au Grand Conseil. Afin de faire passer leurs projets durant la législature, les partis bourgeois ont fréquemment eu besoin de l'appui de député.e.s centristes. Ce rôle de «faiseur de roi» a été partagé par les Vert'libéraux, le Centre et les Libres (qui s'appelaient Vaud libre lors des élections précédentes). Alors qu'ils avaient présenté des listes communes avec leurs alliés du centre lors des élections précédentes, les Vert'libéraux se sont cette fois-ci lancés seuls dans la course, espérant surfer sur la progression des partis écologistes constatée lors des derniers scrutins cantonaux à Fribourg et Neuchâtel. En visant quinze mandats, le parti s'est montré ambitieux. Il en avait glané sept en 2017. L'arrondissement d'Aigle a cependant constitué une exception, puisqu'une liste commune a été déposée par les Vert'lib, le Centre et les Libres. Celle-ci s'est dénommée ACDC, pour Alliance centriste du Chablais. Présents dans cinq districts, les Libres souhaitaient défendre leurs quatre sièges. Dans cette optique, la députée Circée Barbezat-Fuchs était également candidate au gouvernement, avec l'objectif de tirer les listes au Grand Conseil. Le Centre, qui n'avait plus aucun député depuis les départs d'Axel Marion et Manuel Donzé en cours de législature, a compté sur sa présidente Valérie Dittli, candidate au gouvernement, pour jouer le rôle de locomotive et lui donner de la visibilité.
À gauche, le but avoué était de ravir sa majorité à la droite. Les Vert.e.s souhaitaient ainsi se donner les moyens de mener une politique climatique ambitieuse sur le plan cantonal. Dans les rangs du PS, il s'agissait également de se maintenir face aux alliés écologistes, qui ont progressé aux dépens des socialistes lors de divers scrutins cantonaux. 35 fauteuils étaient revenus aux socialistes en 2017, et 21 aux Vert.e.s. Quant à la gauche de la gauche, elle possédait cinq sièges. Le POP, Ensemble à Gauche et les autres formations d'extrême-gauche ont présenté des listes communes dans certains districts qui leur sont favorables, comme Lausanne ou l'Ouest lausannois, mais ont en revanche renoncé à déposer des listes dans la Broye ou la Vallée de Joux. Enfin, diverses listes citoyennes ont été déposées. Celles-ci ont notamment émergé suite à la pandémie, à l'image de l'Alliance des Libertés, contestataire des mesures sanitaires.
Peu avant l'élection, le journal le Temps a calculé la proportion de femmes parmi les candidates et candidats des quatre partis les plus représentés dans l'hémicycle. L'UDC a fait figure de mauvais élève, avec seulement 16 pour cent de femmes sur ses listes. En particulier, la liste agrarienne du sous-arrondissement de Vevey ne comptait aucune femme, pour 14 hommes. 37 pour cent de femmes ont été recensées sur les listes PLR, alors que la parité a régné du côté des Vert.e.s. Enfin, les listes socialistes comptaient 53 pour cent de candidates. Selon Roberto Di Capua, politologue de l'université de Lausanne, le profil social des candidates et candidats était supérieur à la moyenne de la population. 52 pour cent des postulant.e.s avaient un profil universitaire, contre 26 pour cent dans la population. Les professions libérales étaient, sans surprise, également surreprésentées, tout comme les agriculteurs et agricultrices, qui étaient 5 pour cent parmi les candidat.e.s contre 2 pour cent dans la population. En outre, près de la moitié des candidat.e.s siégeaient dans un organe politique communal.
À quelques jours de l'échéance électorale, l'inscription «mort aux communistes Marendaz, Dridi &co» a été taguée sur l'hôtel de ville de Lausanne. Cette menace était adressée à Mathilde Marendaz, candidate d'Ensemble à Gauche au Conseil d'État et au Grand Conseil, et à Zakaria Dridi, candidat POP au Grand Conseil. Suite à cela, des plaintes ont été déposées par les candidat.e.s et par la ville. Ces menaces ont été attribuées à des individus issus de groupuscules néonazis, s'opposant aux mouvements écologistes, féministes et antiracistes, selon Marendaz.

Comme attendu, les partis écologistes ont progressé. Les Vert.e.s ont dépassé l'UDC et sont devenus la troisième force du canton. Quatre sièges supplémentaires ont été glanés par rapport à 2017. Cette progression s'est faite au détriment du PS, qui a perdu cinq mandats. Ainsi, les Vert.e.s possèdent désormais 25 sièges et les socialistes 32. La gauche de la gauche a également réalisé une belle affaire. Deux sièges supplémentaires sont en effet tombés dans son escarcelle, ce qui lui permet de compter sept représentantes et représentants au total. Les mandats sont répartis entre Ensemble à Gauche, le POP, Solidarité & Écologie et SolidaritéS. Sans atteindre leur objectif de quinze sièges, les Vert'libéraux ont néanmoins progressé et possèdent désormais onze sièges. Parmi les autres formations centristes, les Libres n'ont conservé que deux sièges, alors que le Centre n'a vu aucun de ses candidat.e.s se faire élire. L'élection surprise de sa présidente Valérie Dittli au gouvernement engendre une situation singulière, avec une conseillère d'État orpheline de soutien au Grand Conseil. L'UDC a perdu deux sièges (23 au total) et le PLR en a remporté un (50 au total). Les rapports de force entre blocs de droite et de gauche n'ont donc presque pas évolué. Les partis bourgeois, avec 73 député.e.s, conservent l'ascendant sur la gauche, qui en compte 64. Grâce à leur progression, les Vert'libéraux confirment leur rôle d'arbitre au milieu de l'échiquier politique. Les observateurs et observatrices de la politique vaudoise ont déploré la faible participation de 34.28 pour cent. Au total, 53 femmes ont été élues, cinq de plus qu'en 2017. De plus, un léger rajeunissement est à souligner. En effet, la moyenne d'âge des parlementaires passe de 51 à 49.7 ans.

Élection Grand Conseil vaudois 2022
Dossier: Kantonale Parlamentswahlen 2022
Dossier: Kantonale Wahlen - Waadt