Selon des enquêtes menées de part et d'autre de la Sarine, la décriminalisation de l'objection de conscience et la création d'un service civil constituent, pour l'opinion publique, un problème et une tâche majeurs de la défense nationale. Egalement sensibilisées, les autorités fédérales ont accepté l'initiative de Münchenstein déposée en 1972. Les débats des Chambres ont cependant révélé les multiples réticences et difficultés auxquelles se heurte sa réalisation: risque d'accroissement du nombre des objecteurs (par l'adoption éventuelle du critère d'objection politique et du libre choix entre service militaire et service civil), crainte en conséquence d'un affaiblissement de l'armée, ambiguïté du texte de l'initiative (l'expression «objection de conscience» n'y figure pas), difficulté surtout d'une définition juridique de cette notion de conscience, longueur de la procédure institutionnelle, etc. Ce dernier point s'explique par le fait que l'initiative, formulée en termes généraux, ne pourra faire l'objet d'une votation populaire avant 1975. Raison pour laquelle, entre autres, plusieurs propositions, au National comme aux Etats, ont été présentées afin de la soumettre préalablement au souverain, sans attendre le projet d'article constitutionnel (revision de l'article 18 sur l'obligation du service militaire) à élaborer par le Conseil fédéral. Elles ont toutes été rejetées, en vertu principalement de la formulation, considérée comme imparfaite et incomplète, de l'initiative. Se pose dès lors, durant la période intérimaire, la question délicate de la poursuite des objecteurs par la justice militaire. Plusieurs suggestions ont été formulées qui visent à suspendre et l'activité des tribunaux et l'exécution des peines. En dépit de l'accroissement du nombre des condamnations d'objecteurs – 450 en 1973, contre 352 en 1972 et 227 en 1971 – le gouvernement les a écartées au nom du principe de la séparation des pouvoirs. Décision parfaitement fondée du point de vue du droit, mais qui contribue à envenimer la querelle autour de l'existence même des tribunaux militaires. Si une telle institution apparaît à certains milieux, de gauche surtout, comme anachronique et même antidémocratique, le sondage de Lausanne a montré au contraire que 65 pour cent des personnes interrogées estimaient «normal» leur fonctionnement en temps de paix. De son côté, une commission d'étude du DMF s'est prononcée en faveur de leur maintien. Le Conseil national a accepté en revanche deux démarches en faveur d'une revision du droit de recours et du régime pénal militaires.
Signalons ici que l'écrivain Friedrich Dürrenmatt a flétri les tribunaux militaires à la suite de la condamnation de son fils, objecteur. Notons en revanche l'acquittement des dix accusés de l'affaire de la caserne des Vernets (école de recrues de protection aérienne de Genève, 1972).
Sondage par IMR AG, Institut für Marktforschung Zürich, du 13 au 23.06.73, échantillon: 2'942 personnes de plus de 17 ans, 55.8 pour cent des personnes interrogées saluent l'introduction d'un service civil. Aussi le sondage de Lausanne selon lequel 58 pour cent de l'opinion serait opposée au principe d'une condamnation pénale pour refus de servir.
Bundesbeschluss über die Einführung eines zivilen Ersatzdienstes auf der Basis der Volksinitiative «für die Schaffung eines Zivildienst (Münchensteiner Initiative)» (76.060)
Dossier: Einführung des Zivildienstes