Le Conseil national a adopté à une majorité confortable la loi sur le service civil. La majorité des députés a en effet estimé qu'il était temps – 92 ans après la première pétition à ce sujet et trois ans après l'adoption par le peuple du mandat constitutionnel – de décriminaliser l'objection de conscience, mettant ainsi fin à un des particularismes helvétiques. Le projet du Conseil fédéral a été globalement adopté sans grandes modifications, même si les points fondamentaux de la loi, à savoir les articles ayant trait aux critères d'admission, à la durée du service civil ainsi qu'à la procédure d'admission, ont été à l'origine de vives discussions de la part tant de ceux qui estimaient la loi trop libérale que de ceux pour qui celle-ci instaurait un simulacre de service civil. Ainsi, au sujet de la question concernant les motifs invocables pour refuser de servir, l'aile droite de la grande Chambre (UDC, DS, PL, et la plupart des radicaux) a vivement critiqué le fait que le projet gouvernemental prévoie que tout conflit de conscience, qu'il soit d'origine religieuse, éthique ou politique, puisse justifier le refus de servir s'il est allégué de manière crédible. Estimant que cette conception libérale permettait à tout un chacun de se prévaloir d'un conflit de conscience et qu'elle faisait, par conséquent, courir le risque que des milliers de jeunes se détournent de leur devoir militaire, les députés bourgeois ont proposé de revenir aux conditions énoncées par la loi Barras, qui ne reconnaît le statut d'objecteurs de conscience qu'à ceux dont les motivations ne sont pas «entachées» de considérations politiques. La proposition fut cependant rejetée par une alliance de la gauche, des écologistes, des indépendants et des démocrates-chrétiens, qui ont souligné qu'on ne pouvait distinguer les motifs éthiques de ceux politiques, ces derniers comprenant une dimension morale évidente.
Au sujet de la durée du service civil (1.5 fois celle du service militaire pour les soldats), la loi n'apportant aucune modification par rapport à la situation en vigueur, les attaques sont venues de la gauche et des écologistes. Estimant qu'une telle durée réintroduisait par la bande un élément punitif – ce qui allait à l'encontre du but principal de cette loi, à savoir la dépénalisation de l'objection de conscience – les députés écologistes et socialistes ont proposé d'abaisser le coefficient de 1.5 à 1.3, voire à 1.2. La majorité de la Chambre du peuple a néanmoins estimé que le coefficient proposé par la loi se justifiait, référence faite au moins grand confort de la vie en caserne. Elle a en outre fait valoir que la plus grande durée du service civil constituait une preuve par l'acte de l'authenticité de l'objection de conscience, preuve rendue d'autant plus nécessaire du fait de l'assouplissement des critères.
Le troisième pilier de la loi, celui concernant la procédure d'admission et prévoyant que les demandes seraient traitées par une commission civile, n'a pas fait, dans son principe, l'objet de discussions. La question du caractère obligatoire de l'audition devant cette commission fut en revanche débattu, certains députés bourgeois voulant supprimer de la loi la possibilité, certes exceptionnelle, de ne pas avoir à passer un examen de conscience, alors que d'autres, à l'image du socialiste Gross (ZH), voulaient supprimer toute audition. A ce sujet également, c'est la voie médiane proposée par le Conseil fédéral qui l'a emporté. Aussi, la seule modification relativement importante apportée par la Chambre du peuple a porté sur la possibilité de pouvoir effectuer son service civil à l'étranger. Craignant l'attrait d'«un service sous les palmiers», la majorité bourgeoise du Conseil national a en effet décidé de souligner, sur proposition de sa commission, le caractère exceptionnel de cette opportunité. Elle a en revanche rejeté une proposition Fehr (udc, ZH) visant à supprimer toute possibilité de service à l'étranger ainsi qu'une proposition Tschuppert (pdc, LU) demandant de limiter cette possibilité à l'aide en cas de catastrophe.

Bundesgesetz über den Zivildienst (ZDG) (BRG 94.063)
Dossier: Einführung des Zivildienstes